2 l’âme à vif N°113/AVRIL 2020/GAD ELMALEH SACRÉ GAD Coproducteur du spectacle Bernadette de Lourdes, le comique le plus célèbre de France a croisé pèlerins et malades le 12 août dernier dans la cité mariale. Il nous raconte comment il s'est laissé convaincre de rejoindre une aventure qui a déjà conquis plus de 70 000 spectateurs. PROPOS RECUEILLIS PAR ALEXANDRE MEYER Avec Gilbert et Nicole Coullier, Eléonore de Galard, le chanteur Grégoire et Roberto Ciurleo, Gad Elmaleh a permis au spectacle Bernadette de Lourdes d’exister. Détendu, sur le chemin de l’école où il allait chercher son fils, il nous a accordé quelques minutes pour parler de ce projet qui lui tient particulièrement à cœur… Pourquoi avez-vous décidé de coproduire le spectacle Bernadette ? En tant qu’artiste, c’est la première fois que je produis un spectacle dans lequel je ne suis pas impliqué : ni sous le feu des projecteurs, ni sur le devant de la scène. J’ai eu quelquefois l’occasion de parrainer de jeunes humoristes, mais c’est la première fois que je fais un truc dans l’ombre. La comédie musicale, le show à l’américaine, est un genre qui m’a toujours fasciné. Je l’ai abordé sous l’angle de la parodie dans mes spectacles, car je suis avant tout un comique, mais je n’ai jamais eu l’occasion d’en faire. Quand la possibilité de faire partie de l’aventure s’est présentée, impossible de refuser. L’histoire vous a convaincu tout de suite ? L’histoire m'a énormément touché. Il y a quelque chose de très pur dans cette histoire. Elle n’est pas un conte, mais une fable moderne sur la parole donnée, la vérité, la foi, le jugement. Elle vous touche quelle que soit votre religion. Je suis de confession juive, mais au cours de mes voyages, j’ai appris à parler plusieurs langues, non pas au sens de la linguistique, mais au sens des langages de la foi et des croyances. Toujours à l’écoute des autres confessions – celles de mes amis, des gens que je côtoie –, j’essaye d’échanger un maximum à ce sujet, pour en apprendre toujours plus. La première fois que j’ai lu le pitch de la pièce, c’est très bizarre, mais j’ai dit à mes coproducteurs : « Moi, l’histoire de Bernadette me rappelle la dérive des réseaux sociaux. » Ils m’ont pris pour un dingue ! « De quoi tu parles ? – C’est bien simple : aujourd’hui si Bernadette existait, on lui aurait collé un hashtag et on l’aurait clouée au pilori, pointée du doigt, on aurait voulu la tuer, se débarrasser de cette chose qui nous dérange. » Cela me touche énormément, ça. La vindicte populaire. Vous en avez souffert ? En tant qu’homme public, j’ai connu des hauts et des bas dans des séquences médiatiques parfois très dures et je sais ce que c’est, je sais les souffrances que cela représente. Loin de moi l’idée de me comparer à Bernadette… Je vois d’ici les moqueries de vos confrères ! (Rire.) Je veux simplement dire par là que l’histoire m’a touché, elle m’a parlé, comme les symboles qui sont représentés dans le spectacle, à savoir avant tout celui de la Sainte Vierge et de la fascination, de la curiosité qu’elle a suscitées… Chacun pourra y trouver ce qu’il veut. Moi, j’ai mon histoire avec elle... « L'histoire m'a touché, elle m'a parlé » LE SPECTACLE BERNADETTE DE LOURDES La fascinante histoire de Bernadette et des apparitions mariales dont elle fut le témoin en 1858. Du 5 avril au 26 octobre 2020 à l'Espace Robert Hossein de Lourdes. www.bernadettedelourdes.fr Racontez-nous ! Un jour, ma sœur et moi sommes dans la voiture et mon père s’arrête pour aller faire une course. À l’époque, on n’avait pas d’iPad ni d'autoradio et on trouve le temps si long qu’on sort de la voiture, on commence à flâner et on tombe sur une église. On se regarde en pensant : « Non, tu sais bien, non, on ne peut pas faire ça… » Les Marocains avaient l'habitude de vivre avec les chrétiens mais pour des raisons obscures, les juifs disaient à leurs enfants : « Ne rentrez pas dans les églises, vous n’en avez pas le droit ! » Et les musulmans disaient : « Ne rentrez pas dans les églises, c’est pécher ! » Évidemment, on a poussé la porte de l’église. Comme dans un film, la porte s'est mise à grincer, et nous sommes tombés nez à nez avec une représentation gigantesque de la Sainte Vierge, qui nous regardait droit dans les yeux. Ce n’était pas une vision, juste une simple statue, mais nous étions pétrifiés ! De peur de nous faire attraper par nos parents, de la superstition, des malédictions, on a fondu en larmes et on est retourné se cacher dans la voiture. C’est resté notre secret pendant toute notre enfance. Des années plus tard, je raconte l’histoire à mon coproducteur Roberto Ciurleo. Bouleversé, il me pose des tas de questions : comment elle était, est-ce qu’elle avait une ceinture bleue autour de la taille… Intrigué, KTO LA TÉLÉVISION CATHOLIQUE - WWW.KTOTV.COM DR |