DOSSIER Le rachat d’actions témoigne de l’intérêt également des managers à la gestion et à la tenue de leurs cours de bourse. Ils l’apprécient d’autant plus que certains bénéficient de plan de rémunération indexé à la performance du titre. « Cela peut être une tactique pour un groupe qui estime que sa valeur boursière ne reflète pas sa valeur réelle, explique Arnaud Chesnay. Nous oublions souvent que le rachat correspond à une sortie de trésorerie de l’entreprise et donc sa valeur diminue d’autant. D’un point de vue comptable, la valeur d’entreprise reste identique après l’opération, seulement si la société décide d’annuler les actions qu’elle a racheté. Elle n’a donc pas forcément besoin de faire cela. » Les opérations de rachat ne sont donc pas à l’abri des critiques. Dans l’esprit de certains investisseurs, elles traduisent l’absence de projets de l’entreprise. « Les politiques monétaires à taux zéro peuvent avoir des effets pervers. Elles peuvent inciter les entreprises à acheter des actifs existants et satisfaire l'actionnaire via des rachats d'actions (ou distribution de dividendes) et cela s'effectue au détriment d'investissements nouveaux. Il y a un effet d’aubaine avec des coûts d’emprunt très bas », déclare Loïc L’Hermitte. « Avec cette vague de rachats, il ne faut pas voir un manque d’imagination de la part des entreprises en matière d’investissement. En raison des valorisations élevées, les acquisitions sont limitées », nuance Jean-Marc Maringe. Les rachats interviennent souvent après une cession d’actifs ou une réorganisation du capital. Ils sont accompagnés également par le versement de dividendes exceptionnels. Ils peuvent être motivés pour compenser la dilution entrainée par l’utilisation d’autres produits financiers, comme la conversion d’obligations convertibles et l’attribution gratuite d’actions. Les titres rachetés sont souvent annulés et ainsi, l’équilibre actionnariale est maintenu. Pour d’autres, au contraire, ces opérations permettent de renforcer le contrôle des actionnaires majoritaires qui n’apportent pas leurs titres. Vincent Bolloré a opéré ainsi sur Vivendi. Depuis 2015, le groupe de médias a racheté ses propres actions pour un montant d’environ 2,3 milliards d’euros et a versé 5,8 milliards sous forme de dividendes. La dernière assemblée générale a approuvé une nouvelle résolution donnant la possibilité au groupe de procéder au rachat de ses propres actions dans la limite de 10% du capital au prix maximum de 20 euros. En revanche, la famille Mittal ne voulant pas accroître sa participation chez Aperam, le fabricant d’acier inoxydable, qu’il contrôle apportera des titres au marché pendant le programme de rachat. Les rachats d’actions peuvent entrer dans une multitude de stratégies. Si la présentation d’un programme est souvent appréciée par les investisseurs, ceux-ci privilégient encore et de loin le dividende. Le marché français n’est pas prêt d’adopter les habitudes américaines. M € 20 000 18 000 16 000 14 000 12 000 10 000 8 000 6 000 4 000 2 000 0 7 618 <12> Novembre 2017 - N°62 - INFORM@CTIONS Les rachats d’actions par le menu détail Les rachats « au fil de l’eau » J'2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 Source : Vernimmen 4 L’Assemblée générale décide 4 Le programme d’une société cotée ne porte pas sur plus de 10% du total de ses propres actions, le maximum que l’émetteur peut détenir (autocontrôle). L’entreprise doit tenir compte des titres qu’elle détient déjà. 4 Objectif admis - Réduire le capital de l’émetteur. Celui-ci a deux ans pour annuler effectivement les titres rachetés. Il peut annuler ainsi jusqu’à 10% de son capital tous les deux ans. - Satisfaire aux obligations découlant de titres de créance, qui sont échangeables en titres de propriété - Satisfaire aux obligations découlant des programmes d’options sur actions ou autres allocations d’actions, aux salariés, ou aux membres des organes d’administration, de gestion ou de surveillance de l’émetteur ou d’une entreprise associée - Autres objectifs dès lors qu’ils ne sont pas considérés comme un abus de marché Animation du marché de l’action par un prestataire de services d’investissement Opérations de croissance externe L’émetteur doit indiquer dans son programme la répartition des titres rachetés en fonction des objectifs admis. 4 Les transactions déclarées à l’AMF à la fin du septième jour de négociation suivant la réalisation de la transaction 4 La durée du programme est de 18 mois maximum L’Offre publique de rachats d’actions (OPRA) Contrairement aux rachats d’actions, l’offre se déroule à un prix donné et sur une période de temps plus courte, vingt à trente jours calendaires, comme lors d’une offre publique d’achat, et non au fil de l’eau. Les actionnaires peuvent apporter les titres qu’ils veulent. S’il y en a trop, le prorata s’impose à tous. Lorsque l’émetteur veut procéder à un rachat supérieur à 10% de ses titres, il lance une OPRA. La fiscalité Rachats d’actions au sein du cAc 40 depuis 2003 9 209 6 264 7 869 19 200 11 240 1 952 5 699 Les rachats d’actions sont considérés comme des cessions de valeurs mobilières et sont donc soumis à l’impôt sur les plusvalues Lorsque la réduction de capital lors d’une OPRA, par annulation des titres, n'est pas motivée par des pertes, l'investisseur individuel relève à la fois du régime des plus-values et de celui des revenus des valeurs mobilières. La répartition entre les deux régimes est systématiquement détaillée dans la notice AMF accompagnant l'opération, à laquelle il convient de se référer. 4 591 6 573 10 189 5 507 9 511 |