AU-DELÀ LE GARDE DU ROBE CLICHÉ DE FRÉDÉRIQUE QUESTIONS D’IDENTITÉ CHERS GAIS, APPRENEZ À ÊTRE DES HOMMES ! Mon titre de chronique est une tactique purement déloyale pour attirer votre attention. Je n’ai pas envie de définir les contours de la masculinité, en prétendant que la carrure de vos épaules, la gravité de votre voix, la neutralité de votre démarche et l’attitude dominante que vous adoptez au lit font de vous des mâles de première catégorie. Parce qu’être un homme, un vrai, c’est faire preuve de droiture, savoir ce qu’on veut et l’assumer ouvertement. Vous savez, ces comportements qui font si souvent défaut dans le monde du dating ? 008 FUGUES.COM NOVEMBRE 2015 Avez-vous déjà été flushé par un silence assourdissant ? Est-ce que cela vous a blessé ? Si vous avez répondu « oui », alors comment justifier que vous fassiez parfois le mort, vous aussi, au lieu d’exprimer clairement que « you are just not that into him » ? Rassurez-vous, je ne fais pas partie des désabusés amoureux qui vengent leurs déceptions en vomissant leur amertume. Au contraire. Comme j’ai assez d’expérience en rendez-vous plus ou moins galants pour être décoré d’un doctorat honorifique en dating, je partage ma vision de la bienséance relationnelle en espérant remettre en question certains de nos comportements. Sur les sites et les applications de rencontres, rien ne nous oblige à répondre à tous ceux qui nous écrivent. Cela fait partie des lois non écrites de la connexion virtuelle : on peut supprimer et bloquer au premier regard ou après trois messages. Nous évitons ainsi d’expliquer les raisons superficielles, mais souvent très instinctives, qui nous poussent à ne pas vouloir connaître certaines personnes. Et nous nous mettons à l’abri des insultes de ceux qui refusent de ne pas plaire à tous. Toutefois, si nous discutons pendant deux heures, trois jours, voire une semaine avec quelqu’un, comment oser disparaître sans rien dire ? Je connais la rengaine : il se peut que nous ayons découvert des éléments irréconciliables, perdu notre intérêt ou rencontré quelqu’un avec qui ça connecte davantage. Mais si le premier nous contacte encore, sans excès ni méchanceté, pourquoi ne pas faire preuve d’un minimum de décence en l’avisant gentiment que nous ne voulons pas aller plus loin ? La recette du désintérêt est la même dans la réalité. Après quelques rencontres, étalées sur une ou plusieurs semaines, prenons la peine d’expliquer pourquoi nous voulons cesser la « fréquentation ». Avec un minimum de maturité et d’habiletés pour communiquer, la discussion peut être menée sans fracas. Légère et amusante ? Probablement pas. Mais nécessaire. Et qu’on se le dise : le silence n’est PAS une forme de communication acceptable. L’humain est une petite bête qui espère, qui imagine des excuses et qui attend le désintérêt officiel pour passer à autre chose. Nous ne pouvons pas sérieusement nous convaincre « que le mec devrait comprendre avec mes réponses froides et espacées que je ne suis pas intéressé, tsé ». Quiconque a déjà été laissé dans l’ignorance sait que la déception du rejet est de loin préférable aux heures passées à essayer de comprendre la situation. Vous croyez que mes mots ne sont que du vent ? Alors, lisez ce qui suit. Févier 2014, je fréquentais quelqu’un depuis trois semaines. Même si l’exclusivité n’avait pas été abordée, je n’ouvrais plus mes applications de rencontres. J’avais envie de voir où cela allait nous mener. Puis, le 14 février (eh oui, le soir de la St- Valentin, ça ne s’invente pas…), il était à l’extérieur pour le week-end et je passais la soirée avec mon meilleur ami dans un café. J’écrivais, il étudiait, on déconnait. Un de ses amis l’a aperçu et s’est assis près de lui. Je les ai laissés discuter, trop concentré par mon boulot. Mais, éventuellement, une force inexplicable m’a poussé à lui parler. D’abord cinq minutes, puis quelques heures. On s’est revu le lendemain, le surlendemain et tous les jours qui ont suivi. Est-ce que j’ai offert mon silence à l’homme que je fréquentais ? Pas du tout ! Je l’ai appelé pour lui expliquer que même si nous passions de bons moments et que je n’avais fait aucun geste pour rencontrer une tierce personne, la vie avait mis sur ma route un coup de foudre. Et comme je ne voulais pas jouer sur deux terrains à la fois, je préférais que nous en restions là. Ai-je eu droit à sa colère ? Non. Il m’a remercié de mon honnêteté et de l’avoir avisé autrement que par un texto désincarné. Quand je repense à cette expérience, je me demande pourquoi tant de gens agissent autrement. Par peur de la confrontation ou de la peine qu’ils peuvent causer ? Par lâcheté ? Imaginez si nous décidions tous de changer… 6 SAMUEL LAROCHELLE samuel_larochelle@hotmail.com |