Eva Stefani POÈTE VISUELLE DE LA SOCIÉTÉ GRECQUE CONTEMPORAINE Cinéaste-documentariste et « visual artiste », Eva Stefani utilise vidéo et super-8 pour créer des films documentaires et poèmes visuels. Née « par erreur » aux États-Unis, elle n’y reste qu’une petite année puis sa famille rentre en Grèce, où elle passe toute son enfance. C’est au moment de devenir étudiante qu’Eva renoue avec le continent américain et le reste du monde, multipliant ses formations académiques. Après des études de sciences politiques à Athènes, elle s’inscrit à l’université de New York, puis suit un cursus à l’École nationale du film à Londres. Et c’est en France qu’elle va faire la connaissance de ce qu’elle nomme « amour principal »  : le documentaire. Elle découvre ce genre cinématographique grâce à Jean Rouch, célèbre cinéaste et ethnologue français connu pour sa pratique du cinéma direct. Sur le conseil d’un ami, elle s’inscrit aux Ateliers Varan, école professionnelle de formation au documentaire en France. Dans ses créations expérimentales, elle aime mélanger les formats et les images. Elle combine des archives super-8 qu’elle chine aux puces, mais aussi des archives nationales relatant des faits historiques, et des images filmées avec son iPhone. Ses films sont un collage d’images réelles et imaginées très poétiques, qui parlent tous de la société grecque actuelle. Si elle devait retenir un réalisateur grec, ce serait Alexis Damianos, un cinéaste atypique pour son époque, annonciateur de la Nouvelle Vague. Son travail l’inspire, elle apprécie chez lui son approche anthropologique et tout particulièrement le film Jusqu’au bateau, sorti en 1966. Il filme le réel et non des idées illustrées, une démarche proche de Jean Rouch. Eva Stefani reçoit de nombreux prix prestigieux, notamment celui du Meilleur court métrage au Cinéma du réel à Paris et ses films sont sélectionnés dans des festivals de renommée internationale  : IDFA à Amsterdam, Margaret Mead Film Festival, DocLisboa, FIPA… Par son activité à la limite entre art visuel et cinéma, elle participe aussi régulièrement à des expositions, à Athènes essentiellement. En ce moment, elle prépare une exposition pour la prochaine Biennale de Venise… Outre ses activités de cinéaste, Eva enseigne également à la faculté d’études théâtrales de l’université d’Athènes. Une façon de transmettre à son tour tout ce qu’elle a pu apprendre et voir aux quatre coins de la planète cinéphile. Parmi ses étudiants, elle remarque que les femmes sont de plus en plus présentes, contrairement à sa génération où dominait la gent masculine. Des jeunes femmes réalisatrices, dont le talent n’a rien à envier à celui de leurs homologues masculins. Pourtant les difficultés sont nombreuses en Grèce, et peu importe le sexe. Toute la profession souffre d’une absence quasi totale de subventions. Heureusement, l’énergie et l’inventivité débordante de ses étudiants ne sont pas à l’image des budgets gouvernementaux ! Les adresses d’Eva Stefani  : Institution en Grèce et synonyme des beaux jours  : une séance de cinéma en plein air. Parmi les 90 salles d’Athènes, Eva aime aller au Nea Panathinaia (165, rue Mavromihali), pour voir un vieux film tout en buvant une bière ou un verre de vin. Les quartiers de Plateia Mavili et Neapoli sont ceux où elle construit sa vie quotidienne. Ses quartiers sont situés en contrebas du mont Lycabette, qui offre une vue magnifique à 360 degrés sur la capitale. Page de gauche  : Vue de nuit sur l’Acropole. ÉVASION Fragonard magazine 33