10 Voyage Le château de Malbork, le plus grand du genre en briques rouges. 9 au 22 mai 2011 ÉpoqueTimes Escapade fluviale en Pologne 1 re partie Christiane Goor Collaboration spéciale Ville mythique au même titre que Varsovie, Cracovie et Wroclaw, Gdansk est l’œuvre commune des Polonais et des Allemands, centre de nombreux conflits qui ont traversé son histoire et délimité son appartenance à un territoire ou à un autre. Sa situation exceptionnelle à l’embouchure de la Vistule, sur la mer Baltique, lui a permis de devenir dès le XIV e siècle une ville portuaire stratégique, d’abord pour les puissants marchands de la Hanse Teutonique, ensuite pour les Prussiens qui lui donnèrent le nom de Dantzig. C’est ici aussi que le premier coup de feu de la Seconde Guerre mondiale a été tiré, le 1er septembre 1939, du haut du phare qui domine le port. C’est encore ici qu’est né « Solidarnosc », la première fédération indépendante de syndicats qui osa lutter contre le pouvoir communiste au nom de la liberté et de la justice, déclenchant un mouvement qui allait déferler sur toute l’Europe jusqu’à en changer la carte. C’est au port de Gdansk que l’aventure commence. Lukasz y conduit ses hôtes qui ont choisi de vivre une croisière sur les rivières qui creusent leur sillon entre les lacs et les marécages qui dessinent le delta de la Vistule. Les nouveaux chefs de bord prennent possession de leur bateau de plaisance et suivent une formation de quelques heures avant de larguer les amarres en toute confiance, munis d’une documentation complète sur la région. Une croisière pastorale La Vistule n’a rien d’un fleuve paisible à son embouchure, elle accueille les marins d’eau douce avec un vent de bourrasque qui soulève des vagues parfois houleuses. Il faut se hâter de lui tourner le dos pour se glisser sur les eaux calmes de la petite rivière Szkarpawa qui serpente au cœur d’une vaste plaine fertile, couverte de céréales blondes. Le minuscule port de Rybina offre une étape accueillante à deux pas de la maison de Marek, un ami de Lukasz, qui n’hésite pas à ouvrir sa maison aux plaisanciers d’un soir. Une belle occasion de saisir toute l’intensité de l’accueil chaleureux d’une famille polonaise. Le soir, tout le monde se retrouve autour de la table dans la pièce de séjour décorée d’images pieuses et de fleurs artificielles. La nourriture proposée est copieuse, simple et succulente : des poissons marinés, du poulet frit, de la macédoine de légumes, des cornichons au vinaigre et les incontournables pierogis, ces raviolis typiques de la cuisine polonaise, farcis de fromage blanc, de chou, de viande ou encore de myrtilles, le tout arrosé de vodka glacée qui délie rapidement la parole, malgré la barrière de la langue. Rybina abrite aussi une station de pompage qui régule jusqu’à 1800 hectares de champ. Il est vrai que cette vaste région limoneuse appelée « Zulawi Wislane » étire un tiers de sa superficie à 1,8 mètres sous le niveau de la mer, ce qui en fait la zone la plus basse de la Pologne. Plusieurs canaux en permettent l’irrigation ou l’assèchement, selon les besoins. Le travail des trois pompes construites au début du siècle dernier était autrefois assuré par de nombreux moulins à vent dont il ne reste rien si ce n’est des photos jaunies qui tapissent les murs des maisons, témoins de l’indéfectible fidélité des Polonais à leur histoire, celle qui a précédé le joug communiste. Seconde étape, Nowy Dwor Gdanski, sur la Tuga, une rivière surréaliste qui étire sur une quarantaine de kilomètres ses eaux vertes, tapissées par la salvinia, une fougère sauvage, envahissante et pourtant protégée. La lente balade au cœur de la petite ville ouvre des perspectives baignées de quiétude, Mahaux Photography Une étape dans le petit port paisible de Rybina. Façade de la grande infirmerie et la tour sanitaire du château. entre des petits potagers fermés par une palissade en bois où des lignes de carottes et des carrés de laitues et de choux côtoient des rangs de lupins, de soucis et de rosiers. Ailleurs, les bas côtés de la berge sont envahis par une volée de poules et de canards. Les saules pleureurs inclinent leurs longues branches sur l’eau, dessinant des anses romantiques qui ralentissent notre allure en alimentant notre imaginaire. Magique et spectaculaire Amarrer son bateau au restaurant flottant Flisaka sur la rivière Nogat qui se jette, elle aussi, dans la lagune de la Vistule, c’est s’offrir un rare moment d’enchantement. Sur l’autre rive, chaque soir par beau temps, s’ouvre un spectacle fantastique. L’immense château-fort de Malbork, le plus grand château en briques du monde, se pare de mille feux entre les rouges flamboyants du crépuscule et l’éclat des lampes qui illuminent ses remparts. Assis sur la proue du bateau, chacun subit l’envoûtement inexprimable du profond silence de la nuit qui tombe tout en douceur. Inscrit sur la prestigieuse liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, cet ancien siège du grand maître de l’Ordre Teutonique, plus connu sous le nom de Marienburg, est le plus grand ouvrage médiéval de ce genre en Europe. À l’extérieur des murs s’étend le bas château où se multiplient aujourd’hui les marchands de souvenirs et de gourmandises. Il est aisé d’imaginer l’animation qui habitait cet La Maison communale de Gdansk sur la Grand-Place date du 16 e siècle. espace occupé autrefois par des commerçants de tout type, des artisans et les palefreniers qui soignaient les 400 chevaux dans les écuries. Les femmes n’avaient pas le droit de passer la porte qui menait à la seconde enceinte où vivaient les moines-soldats qui partageaient leur temps libre entre les prières à la chapelle et les festivités au réfectoire. Une dernière porte conduisait aux appartements privés du grand maître, dans le haut château. À suivre Mahaux Photography Mahaux Photography Mahaux Photography |