6 Chine www.lagrandeepoque.com ÉDITORIAL Neuvième commentaire II. Le PCC sacrifie le développement économique 1. Appuyer sa crédibilité sur le dur labeur des autres La revendication de légitimité du PCC réside dans le développement économique des quelque vingt dernières années. Mais en réalité, c’est le peuple chinois qui a progressivement atteint ce développement lorsque l’étau du PCC s’est un peu desserré et cela n’a donc rien à voir avec le propre mérite du PCC. Malgré tout, le PCC a revendiqué ce développement économique comme étant sa propre réussite, exigeant qu’on lui en soit reconnaissant. Il espère que les gens vont croire qu’aucun de ces développements économiques n’aurait pu avoir lieu sans lui. Nous savons tous que des pays non communistes sont parvenus à une croissance économique plus rapide il y a déjà longtemps. Lorsque des athlètes gagnent des médailles d’or olympiques, ils doivent remercier le Parti. Le Parti n’a pas hésité à utiliser l’image fabriquée d’une « grande nation du sport » pour faire son propre éloge. La Chine a fortement souffert de l’épidémie du SRAS, mais le People’s Daily a plusieurs fois rapporté que la Chine avait vaincu le virus « en se conformant à la théorie, à la ligne de conduite, aux principes et à l’expérience du Parti ». Ce sont des professionnels en science astronautique et en technologie qui ont réalisé le lancement du vaisseau spatial Shenzhou-V mais le PCC a utilisé cet événement pour démontrer que seul le PCC pouvait hisser les Chinois au rang des grandes puissances du monde. Quant à l’obtention des Jeux Olympiques 2008 par la Chine, ce sont en réalité les pays occidentaux qui ont offert un « rameau d’olivier » à la Chine pour l’encourager à respecter les droits de l’homme. Le PCC l’a utilisé pour rehausser sa prétention à la légitimité et comme prétexte pour réprimer le peuple chinois. Le « grand marché potentiel » chinois, que recherchent les investisseurs étrangers, provient du pouvoir de consommation de la population chinoise qui atteint 1,3 milliard de personnes. Le PCC a détourné ce crédit à son avantage et le transforme en arme pour contraindre les pays occidentaux à coopérer selon des règles imposées par le PCC. Le PCC attribue tout ce qui est mauvais aux forces réactionnaires et aux mobiles cachés d’individus et il met tout ce qui est positif au crédit des dirigeants du Parti. Le PCC va utiliser la moindre petite réussite pour rendre plus attrayante sa prétention à la légitimité. Le Parti peut même utiliser et détourner les erreurs qu’il a commises pour servir ses objectifs. Par exemple, lorsqu’il n’a plus pu cacher la vérité sur l’épidémie du sida, le PCC s’est soudainement créé une nouvelle identité. Il a soigneusement mobilisé sa machine de propagande, utilisant tout le monde – des acteurs connus au Secrétaire du Parti – pour faire passer le principal responsable, le PCC lui-même, comme un bienfaiteur des malades, un ennemi du sida et un combattant de la maladie. En se confrontant à cette grave affaire de vie et de mort, tout ce que le PCC a trouvé de mieux à faire a été de profi ter du sujet pour se glorifi er lui-même. Seuls des manipulateurs aussi vicieux que le PCC sont capables de comportements aussi impitoyables et imprudents, tirant sournoisement profi t de tout et trahissant ainsi une indifférence totale pour la vie humaine. 2. Les désavantages économiques d’une vision à court terme En Chine, les instructions pour la censure sont publiées par différentes autorités du gouvernement et du Parti communiste chinois (PCC). Le site China Digital Times (CDT) en a traduit certaines en janvier 2011 pour illustrer la portée des pratiques en matière de censure en Chine. Les instructions sélectionnées ont été publiées par le Bureau d'information du Conseil d'Etat, le ministère de la Sécurité Publique, l'Offi ce central pour la propagande du PCC, le Bureau de surveillance d'Internet et le Bureau de propagande provincial. Comme l'explique le CDT, « en Chine, plusieurs institutions politiques ont la responsabilité du contrôle du contenu d'Internet. Au plus haut niveau, il y a le Département central pour la propagande, qui s'assure que les contenus culturels et des médias appliquent la ligne offi cielle recommandée par le PCC. Il y a ensuite le Bureau d'information du Conseil d'Etat (SCIO), à l’origine du Bureau des affaires d'Internet » pour surveiller tous les sites web qui publient des nouvelles, y compris les sites offi - ciels des médias publics qui publient des contenus d'information ». « Ce « Bureau des affaires d'Internet » a envoyé des instructions strictes à tous les sites publiant des informations quotidiennes et souvent plusieurs fois par jour. Ces instructions ne signifi ent pas toujours que ces contenus sont totalement interdits, mais elles demandent aux sites web de souligner ou de supprimer certains types d'opinions ou d'informations de manière très détaillée. » Comme pour la révolte égyptienne de 2011, les autorités gouvernementales ont menacé de fermer les sites web qui manqueraient de rigueur dans leurs reportages : « Désordres en Egypte. De l'Offi ce d'information du Conseil d'Etat et du Bureau 11 du ministère de la Sécurité publique : concernant les désordres en Egypte, les médias de tout le pays doivent utiliser les dépêches de l'agence Xinhua. Les sites web doivent renforcer [la surveillance] des articles, forums, blogs et particulièrement des billets sur les micro-blogs. Nos bureaux fermeront d'offi ce les sites web qui manqueront de rigueur dans ce contrôle. » GlobalVoicesOnline.fr NEUF COMMENTAIRES Faisant face à une sérieuse « crise de légitimité » le PCC a mené des politiques de réformes et d’ouverture dans les années 1980 afi n de se maintenir au pouvoir. Son avidité à obtenir des succès rapides a mis la Chine dans une position désavantageuse qualifiée par les économistes de « malédiction du retardataire ». Les concepts de « malédiction du retardataire » ou « avantage du retardataire », comme disent d’autres intellectuels, fait référence au fait que les pays en voie de développement, qui entament tardivement le développement, peuvent imiter les pays développés dans beaucoup d’aspects. L’imitation peut prendre deux formes : imiter le système social ou imiter les modèles technologiques et industriels. Imiter un système social est généralement diffi cile, car la réforme de ce système met en danger les intérêts acquis par certains groupes sociaux ou politiques. C’est pourquoi les pays en voie de développement sont enclins à imiter la technologie des pays développés. Bien que l’imitation technologique puisse générer une croissance économique à court terme, il peut en résulter beaucoup de risques cachés ou même un échec du développement à long terme. C’est précisément la « malédiction du retardataire », un chemin vers l’échec, que le PCC a suivi. Durant les deux dernières décennies, « l’imitation technologique » de la Chine a mené à certaines réussites, dont le PCC a tiré profi t pour justifi er sa légitimité et pour continuer à rejeter des réformes politiques qui ébranleraient ses propres intérêts. Ainsi les intérêts à long terme de la nation ont été sacrifiés. Le développement économique du PCC est cher payé Si le PCC se vante sans cesse de ses progrès économiques, en réalité l’économie actuelle de la Chine est moins bien classée au niveau mondial que sous le règne de Qianlong (1711-1799) pendant la dynastie des Qing. Pendant la période de Qianlong, le PNB de la Chine s’élevait à 51% du PNB total mondial. Dans les premières années qui ont suivi l’établissement de la République de la Chine (Kuomintang) en 1911 par Sun Yat-sen, le PNB de la Chine s’élevait à 27% du total mondial. En 1923, le pourcentage est tombé, mais était encore supérieur à 12%. En 1949, lorsque le PCC a pris le pouvoir, le pourcentage était de 5,7%, mais en 2003 le PNB de la Chine n’atteignait plus que 4% du total mondial. En contraste avec le déclin économique pendant la période du Kuomintang - dû à plusieurs décennies de guerre – le déclin économique continuel pendant le règne du PCC est survenu en temps de paix. Aujourd’hui, dans le but de légitimer son pouvoir, le PCC est avide de succès rapides et de profi ts instantanés. La réforme économique boiteuse qu’il a entamée dans le but de sauvegarder ses intérêts a coûté cher au pays. La croissance économique rapide de ces 20 dernières années est en grande partie due à l’usage excessif ou même au gaspillage des ressources, et a été obtenue au prix de la destruction de l’environnement. Une partie considérable du PNB de la Chine est obtenue en sacrifi ant les opportunités des générations futures. En 2003, la Chine a contribué pour moins de 4% à l’économie mondiale, mais sa consommation d’acier, de ciment et d’autres matières s’est élevée à un tiers de la consommation mondiale. En Chine, depuis les années 1980 jusqu’à la fi n des années 1990, la désertifi cation est passée d’un peu plus de 1.000 à 2.460 kilomètres carrés. La proportion de terres arables par personne a « Je m’appelle Willa… j’ai huit ans. Mon grand-père a fait appel à la justice il y a six ans mais n’a toujours pas reçu les compensations attendues ». Willa est de Kunshan, dans la province de Jiangsu et probablement une des plus jeunes porte-paroles de l’histoire. Elle lit dans la vidéo postée sur internet un message, avec en arrière-plan les pages du jugement auquel elle fait référence, et une banderole : « conférence de presse d’un enfant de 8 ans ». La jeune fille demande de prêter attention aux conséquences de la démolition forcée de sa maison. Le grand-père de la fillette, M. Cai, explique que la « conférence de presse » a été réalisée suite aux demandes répétées de Willa et après une longue discussion en famille. Willa a appris à son école les règles des conférences de presse et a décidé d’utiliser ce moyen pour défendre sa famille. M. Cai explique que Willa a préparé le texte, qui a ensuite été revu par les adultes du foyer. Mission réussie puisque plusieurs journalistes ont appelé après que la vidéo soit apparue sur le web. 16 – 28 FÉVRIER 2011 ● La Grande Époque Chine : instructions pour la censure en janvier 2011 La conférence de presse d’une fillette de huit ans Ode à l’aviation chinoise… avec des images de Top Gun C’est un blogueur chinois – sans doute fan du fi lm de Tony Scott – qui le montre, images à l’appui : un reportage de la télévision offi cielle CCTV sur l’armée de l’air chinoise reprend des images de Top Gun pour illustrer un prétendu exercice militaire. Liu Yi, sur le blog satirique « Le ministère du fromage de soja », place côte-à-côte des images d’explosion, avec fumée, feu et débris provenant du reportage CCTV du 23 janvier, et les images d’une scène de combat impliquant Tom Cruise et Val Kilmer. Elles sont rigoureusement identiques. Par ailleurs, « l’avion prétendument frappé par l’[avion de combat chinois] J10 est un modèle F5 de l’aviation de combat américaine. C’est aussi un F5 que Tom Cruise abat dans Top Gun », explique Liu Yi. Une source anonyme de la BBC, présentée comme proche de la CCTV, explique que la télévision d’Etat chinoise manipule des images dans ses reportages. « Il y a bien d’autres exemples », dit Liu Yi, expliquant que ceci est généralement expliqué par la paresse des journalistes ou par le manque d’images de qualité, en particulier pour les reportages scientifi ques ou militaires. En 2008 par exemple, lors de la première sortie spatiale chinoise – Shenzhou VI –, de nombreuses spéculations avaient vu le jour sur les images de l’événement, qui pourraient avoir été fi lmées en piscine et pas dans l’espace. JACK PHILLIPS La blogosphère chinoise a également réagi à cette nouvelle forme d’appel au public : « Nous avons encore aux oreilles les cris de ceux qui se sont immolés », commente un internaute « et les familles fabriquent maintenant leurs propres armes pour résister aux démolitions. Aujourd’hui c’est une fillette de huit ans qui avec sa voix fl uette appelle à l’aide, que verrons ou entendronsnous demain ? » Le thème des démolitions forcées n’a effectivement rien de neuf en Chine. La maison des Cai a été détruite en 2002 et la famille a fait appel à la justice pendant six ans, se présentant à cinq auditions, sans recevoir au fi nal la moindre compensation pour leur expulsion. SUNNY CHAO 89.290.332 de Chinois ont démissionné du Parti après avoir lu les Neuf commentaires sur le Parti Communiste. Ce mouvement de démissions reste pour le peuple un moyen d’expression non violent, apolitique et sans précédent dans la société chinoise. La Grande Époque publie un extrait traduit de cette série éditoriale chinoise dans chacun de ses numéros. aussi chuté de 2 mu en 1980 à 1,43 mu en 2003. Le grand courant d’enclosure des terres pour le développement a fait perdre à la Chine 100 millions de mu de terres arables en seulement quelques années. Cependant, seuls 43% des terres confi squées sont utilisées. Actuellement le montant total d’émission d’eaux usées s’élève à 43,95 milliards de tonnes, dépassant la capacité environnementale de 82%. Dans les sept principales rivières, 40,9% de l’eau n’est pas potable que ce soit pour les hommes ou pour le bétail ; 75% des lacs sont pollués et leur eau manque d’oxygène, produisant un phénomène d’eutrophisation. Les confl its entre l’homme et la nature en Chine n’ont jamais été aussi graves qu’à notre époque. Ni la Chine ni le reste du monde ne peut supporter un développement aussi malsain. Trompé par l’éclat superfi ciel des gratte-ciel et des riches demeures, les gens ne sont pas conscients de l’imminence de la crise écologique. Quand le temps sera venu pour la nature de se venger des hommes, les conséquences en seront désastreuses pour la nation chinoise. En comparaison, la Russie, après avoir abandonné le communisme, a mené simultanément des réformes politiques et économiques. Après avoir vécu une courte période d’agonie, elle a entamé un développement rapide. De 1999 à 2003, le PNB de la Russie a augmenté de 29,9%. Le niveau de vie de ses citoyens a aussi augmenté de manière signifi cative. Les cercles économiques occidentaux ont non seulement commencé à discuter du « phénomène de l’économie russe » mais ont aussi commencé à investir à grande échelle en Russie, le nouvel endroit à la mode. Le classement de la Russie parmi les nations les plus attrayantes a fait un bond de la 17 e place en 2002 à la 8 e en 2003, rejoignant pour la première fois de son histoire les dix nations qui attirent le plus les investissements. Même l’Inde, un pays qui dans l’esprit de la plupart des Chinois est lié à la pauvreté et secoué d’innombrables confl its ethniques, a bénéfi cié d’un développement accéléré et a atteint une croissance économique de 7 à 8% par an depuis ses réformes économiques en 1991. L’Inde dispose d’un système légal relativement complet d’économie de marché, d’un système fi nancier en bonne santé, d’un système démocratique bien développé et d’une mentalité publique stable. L’Inde a été reconnue par la communauté internationale comme un pays disposant d’un fort potentiel de développement. D’autre part, le PCC n’a engagé que des réformes économiques sans faire de réformes politiques. L’apparence trompeuse d’une économie fl orissante à court terme qui a créé l’illusion d’un système social, a entravé « l’évolution naturelle des systèmes sociaux ». C’est cette réforme incomplète qui a causé un accroissement du déséquilibre de la société chinoise et a renforcé les confl its sociaux. Les gains fi nanciers ne sont pas systématiquement protégés par les systèmes sociaux. De plus, dans le processus de privatisation des propriétés étatiques, les dirigeants du PCC ont tiré parti de leur statut pour s’enrichir. Pour en savoir plus : Les neuf commentaires sur www.lagrandeepoque.com |