6 Chine www.lagrandeepoque.com Comment Twitter change la société chinoise Qui aurait pu prédire qu’un système de messagerie textes de 140 caractères – généralement utilisés aux Etats-Unis pour raconter les aléas de son quotidien – deviendrait un symbole d’espoir pour les militants des droits civiques sous un régime quasi-dictatorial ? Après l’annonce de dix directives s’appliquant à la presse pour l’année 2011, le Département de la propagande poursuit sa campagne de contrôle des médias. Cette instance de censure, directement liée au Parti communiste chinois, vient de mettre en place une session de formation d’une durée de six mois, qui enseignera aux journalistes comment « éradiquer les fausses informations, améliorer le sentiment de responsabilité sociale, et renforcer l’éthique journalistique ». Bref, à faire des journalistes mêmes, les acteurs de la censure. Reporters sans frontières dénonce cette escalade dans le contrôle de l’information. Le Département de la Propagande se montre toujours un peu plus inventif dans l’élaboration de nouvelles directives qui ÉDITORIAL Neuvième commentaire Que ferait la Chine sans le Parti communiste ? La liberté, c’est simple comme un tweet. Twitter, le système de messagerie en question est un service Internet permettant à ses utilisateurs d’envoyer de courts messages textes et de les partager avec des milliers d’abonnés. Ce système devient en Chine un puissant outil qui aide les dissidents à rester connectés et à se mobiliser. Les utilisateurs de Twitter peuvent suivre les mises à jour (ou « tweets ») des personnes qu’ils suivent et sont tout de suite au courant lorsque ces dernières sont harcelées par la police chinoise et peuvent ainsi leur porter secours immédiatement si le tweet appelle à l’aide. C’est justement ce qui s’est passé dans la nuit du 23 Décembre dernier lorsque Teng Biao, avocat des droits civiques et professeur d’université à Pékin et son ami Zhang Yongpan ont rendu visite à la mère d’un ami Fan Yafeng. Arrivés à son domicile, les deux amis sont tombés sur la police qui a réclamé leurs papiers d’identité. Teng, l’avocat leur a rétorqué que les policiers n’avaient pas le droit d’exiger leurs papiers d’identité. Furieux, ces derniers se sont saisis des deux amis et les ont conduits au poste où ils ont été battus et maltraités. Alors que les choses tournaient mal à la suite de l’arrestation, Teng a utilisé son téléphone portable pour envoyer des tweets aux quelques 20 000 abonnés qui le suivent (qui ont relayé à leur tour les tweets à leurs propres abonnés) pour les informer qu’il était en danger. Les bloggeurs ont eu vite fait de trouver l’adresse du poste de police incriminé et l’ont publié ainsi que les coordonnés du contact et du chef de police. En peu de temps, le poste de police a été assiégé par des militants et des avocats, et avant minuit Teng et son ami étaient libres. Autre exemple, dans la nuit du 18 décembre, un groupe d’avocats des droits de l’homme de Pékin dont Zhang Kai, Li Heping, Wang Quanzhang et d’autres se rendaient au Centre de Recherche de la Montagne Sainte (Shengshan) voir le Dr Fan Yafeng qui venait d’être libéré après une arrestation illégale. Ils ont été arrêtés font pression sur les journalistes. Cette formation tente d’interdire, chez les journalistes, tout esprit critique et à faire d’eux des fonctionnaires au service de l’idéologie de l’État. Le 26 janvier 2011, le secrétaire général de l’Association offi cielle des journalistes chinois, Zhai Huisheng a présenté cette nouvelle campagne de contrôle des médias. Ce dispositif d’encadrement sera géré par plusieurs organismes tels que le Bureau central de la propagande, l’Association des journalistes chinois, le Renmin Ribao (Quotidien du peuple), l’agence de presse Xinhua,... Il leur revient d’exercer un contrôle dans 14 provinces et de veiller au bon déroulement de cette formation qui doit permettre aux journalistes de « reconnaître et éviter les sujets politiques A mesure que le PCC se dirige vers le déclin, les gens découvrent de façon inattendue que pendant des décennies le spectre pervers du PCC a, par ses méthodes scélérates toujours changeantes, injecté ce qu’il a de nuisible dans tous les aspects de la vie des citoyens. A la mort de Mao Tse Toung, tant de Chinois ont pleuré amèrement devant le portrait de Mao et se sont demandé : « Que va devenir la Chine sans le président Mao ? » De manière assez ironique, vingt ans plus tard, alors que le monde s’interroge sur la légitimité politique du Parti communiste, le PCC lance une nouvelle vague de propagande, incitant les gens à se poser une nouvelle fois la question : « Que va devenir la Chine sans le Parti communiste ? » En réalité le contrôle politique omniprésent du PCC a tellement marqué au fer rouge la culture chinoise actuelle et l’état d’esprit des Chinois que même les critères avec lesquels les Chinois jugent le PCC proviennent du PCC. Si par le passé le PCC contrôlait les gens en leur injectant ce qu’il a de nuisible, il en vient maintenant à récolter ce qu’il a semé, parce que toutes ces choses injectées dans l’esprit des gens ont maintenant été digérées et absorbées dans chacune de leurs cellules. Les gens pensent selon la logique du PCC se mettant ainsi eux-mêmes à la place du PCC pour distinguer le vrai du faux. A propos du massacre des étudiants protestataires du sensibles ». L’organisation dénonce également l’utilisation abusive de la notion de « fausse information », qui justifi e de nombreux abus de la part des autorités envers les défenseurs de la liberté d’expression, tels que Long Can du Chengdu Shangbao (Chengdu Commercial Daily), et Chang Ping du Nanfang Baoye Jituan, injustement démis de leurs fonctions. Long Can, célèbre journaliste d’investigation du quotidien Chengdu Shangbao, a été licencié, le 21 janvier, accusé d’avoir produit de « fausses informations ». Long Can avait révélé, dans un article, que les autorités de Huangshan, dans la province du Sichuan, avaient ignoré trois appels au secours des 18 étudiants de l’université de Fudan à Shanghai dont la vie était en NEUF COMMENTAIRES 4 juin 1989, certains ont dit : « Si j’étais à la place de Deng Xiaoping, j’aurais moi aussi écrasé les protestations avec des tanks ». A propos de la persécution du Falun Gong, certains disent : « Si j’étais à la place de Jiang Zemin, j’éliminerais aussi le Falun Gong. ». A propos de l’interdiction de la liberté d’expression, certaines personnes disent : « Si j’étais à la place du PCC, j’agirais de la même manière ». La vérité et la conscience se sont évanouies, ne laissant de place qu’à la logique du PCC. C’est la conséquence des méthodes perverses et extrêmement violentes appliquées par le PCC. Aussi longtemps qu’il pourra injecter sa morale toxique dans l’esprit des gens, il continuera à accumuler de l’énergie pour se maintenir en vie. « Que ferait la Chine sans le PCC ? » Ce mode de pensée reste précisément dans le cadre voulu par le PCC, les gens raisonnent selon sa propre logique. La Chine a traversé 5 000 ans d’histoire sans le PCC. Aucun pays dans le monde n’arrêterait son progrès social à cause de la chute d’un régime, quel qu’il soit. Toutefois, après des décennies sous la férule du PCC, les gens ne sont plus à même de reconnaître cela clairement. La propagande martelée par le PCC a amené les gens à penser au Parti comme à leur propre mère. La politique omniprésente du PCC a rendu les gens incapables de concevoir leur vie sans le PCC. Sans Mao Tse Toung, la Chine n’a pas sombré. La Chine s’effondrera-elle sans le PCC ? Quelle est la vraie source de l’agitation ? Beaucoup de gens connaissent le comportement machiavélique à leur tour et conduit au poste de police. De la même manière, les avocats ont envoyé des tweets et ils ont été libérés grâce à l’aide des avocats de Pékin, des bloggeurs et des journalistes qui se sont rendus au poste de police réclamer leur libération. L’adoption d’outils comme Twitter aide à promouvoir une véritable société civile en Chine, malgré tous les efforts des autorités pour la contrecarrer. C’est en tout cas ce que pense l’avocat des droits de l’homme de Pékin Jiang Tianyong : « Il y a un éveil des consciences civiques à grande échelle, et de nombreux groupes se sont formés, tel que les avocats des droits humains, les médias privés ainsi que des journalistes citoyens » explique t-il. « Grâce à Twitter ils restent en contact pour diffuser leurs messages et organiser des activités ». Certains utilisateurs de Twitter avaient peur au début, concède Jiang, mais ils ont pris confi ance par la suite en voyant les autres réussir. « C’est la preuve qu’un petit groupe de gens qui ose entreprendre des actions peut grandement motiver et devenir une source d’inspiration pour beaucoup d’autres ». Lorsque les militants, utilisateurs de Twitter se retrouvent face à la police, à la police secrète ou à d’autres groupes de fonctionnaires corrompus de la bureaucratie chinoise, ils ont le sentiment que ce sont 1 – 15 FÉVRIER 2011 ● La Grande Époque AFP/Getty Images danger, lors d’une excursion dans la montagne de Huangshan. Sous les pressions du Département central de la propagande, le Chengdu Shangbao aurait été forcé de licencier son salarié. Au sein du journal, le rédacteur Zhang Feng a dû payer une amende de 1000 yuan (100 euros). Le rédacteur exécutif, Zeng Xi a été également licencié. Zhang Quanhong, membre du bureau de rédaction en charge de l’information a été démis de ses fonctions et soumis à une enquête sévère. Membre du bureau de rédaction, Wang Qi, a dû payer une amende de 3000 yuan (300 euros) de même que le rédacteur en chef, Chen Shuping. Le 28 janvier 2011, Chang Ping, journaliste talentueux et audacieux, a été « Il y a un éveil des consciences civiques à grande échelle, et de nombreux groupes se sont formés, tel que les avocats des droits humains, les médias privés ainsi que des journalistes citoyen. » Jiang Tianyong, avocat les autorités qui ont peur. Il l’explique ainsi : « Les menaces des autorités n’ont généralement aucune base juridique, et une fois que les menaces s’avèrent ineffi caces, les autorités n’ont plus aucun moyen de pression sur les utilisateurs de Twitter ». Zhang Jianping, directeur exécutif du Mouvement de Droits confi e que les gens qui voient ou assistent à un incident peuvent le diffuser et faire de la défense du droit une affaire publique. Il pense que dans la mesure où les protestations et les poursuites s’avèrent de plus en plus ineffi caces, plus de chinois utiliseront Twitter, plus il y aura de personnes pour suivre ou être témoin d’un événement, plus grand sera son impact. Cette possibilité unique qu’offre twitter de créer des groupes de participation demeure pour l’instant une mouvance timide, mais Jiang croit que son impact va grandir dans les années qui viennent. « Twitter est en train de changer la société chinoise. Avec un simple téléphone, les gens peuvent envoyer des tweets ou des photos en direct du lieu de l’événement, et réduire à néant le blocus de l’information imposé par le gouvernement. » RONA RUI Le Département central de la propagande lance une croisade contre la « fausse information » contraint de quitter ses fonctions du groupe Nanfang Baoye Jituan (Groupe de presse du Sud), pour avoir refusé de changer certains passages dans ses articles. Chang Ping a pour ligne de conduite de refuser tout compromis avec le gouvernement. Son groupe de presse, basé à Canton, est d’ailleurs connu pour la qualité de ses enquêtes et l’audace de ses choix éditoriaux. Encore une fois, les autorités ont fait pression sur les responsables du groupe de presse pour qu’il renvoie le journaliste après qu’il ait divulgué de « fausses informations ». Chang Ping avait déjà perdu ses fonctions de rédacteur en chef pour ses articles qui pointaient le rôle du gouvernement chinois lors des révoltes tibétaines de 2008. Reporters Sans Frontières 88.604.332 de Chinois ont démissionné du Parti après avoir lu les Neuf commentaires sur le Parti Communiste. Ce mouvement de démissions reste pour le peuple un moyen d’expression non violent, apolitique et sans précédent dans la société chinoise. La Grande Époque publie un extrait traduit de cette série éditoriale chinoise dans chacun de ses numéros. du PCC et ne l’apprécient pas, ils sont las de ses luttes et de ses mensonges. Mais ils ont peur de ses mouvements politiques et de l’agitation qui en résulte, et craignent que le chaos ne règne une fois de plus en Chine. C’est pourquoi, lorsque le PCC menace les gens d’agitation, ils acceptent silencieusement son autorité, se sentant impuissants face au despotisme du PCC. En réalité, la vraie source de l’agitation, c’est le PCC avec ses quelques millions de troupes et sa police armée. Les citoyens ordinaires n’ont aucun intérêt à susciter l’agitation, ils n’en ont pas les moyens non plus. Seul le PCC sur le déclin est suffi samment irréfl échi pour mener la nation vers le trouble. « La stabilité est au dessus de tout » et « écraser dans l’œuf tous les éléments instables » sont des slogans devenus la base théorique du PCC pour réprimer les gens. Qui est le plus grand responsable de l’instabilité qui règne en Chine ? N’est-ce pas le PCC qui s’est spécialisé dans la tyrannie ? Le PCC instaure l’agitation, puis en retour utilise le chaos pour maintenir les gens sous sa coupe. C’est un comportement commun à tous les malfrats. Pour en savoir plus : Les neuf commentaires sur www.lagrandeepoque.com |