12 Automobile www.lagrandeepoque.com 16 – 30 NOVEMBRE 2010 ● La Grande Époque Mondial de l’Automobile 2010 L’effort en vue de la préservation environnementale Le Mondial de l’Automobile résulte de l’évolution dès l’issue de la deuxième guerre mondiale de ce qu’il était convenu d’appeler précédemment le Salon de l’Automobile. Il a investi à partir de 1962, sous divers vocables, le Palais des Expositions de la Porte de Versailles à Paris, avant de prendre le titre de Mondial en 1988, où il s’était alors rendu accessible à tous les constructeurs et acteurs du monde entier en tel domaine. Il est désormais l’événement le plus fabuleusement festif voué à la passion automobile. Sous-titrée « Le futur, maintenant », l’édition de 2010, ouverte au public du 2 au 17 octobre dernier et qui a vu affl uer quelque 1,2 million de visiteurs – une fréquentation en sensible repli par rapport à celle de 2008 – s’est voulue spécialement cette année, comme cela a déjà été le cas en 1994 pour la toute première fois, le grand promoteur de l’énergie électrique embarquée appliquée à la propulsion automobile. Autrement dit, sans exclure par ailleurs les motorisations classiques quoique de nouvelle génération dans l’ensemble et, sauf quelques exceptions, sensibles au souci généralisé de la préservation de l’environnement, une part privilégiée a été faite aux véhicules électriques et à toutes leurs possibles variantes comportant combinaisons avec des motorisations thermiques d’appoint éventuelles (systèmes hybrides ou autres). Plus généralement, le Mondial 2010 a réuni toute l’offre potentielle de la plupart des équipementiers et constructeurs du monde (en l’absence des Chinois qui devraient revenir en 2012, de même que les Russes) représentant quelque 322 marques différentes. Il est en quelque sorte le creuset à terme (court ou moyen) de toutes les innovations (une bonne centaine !) et progrès actuellement proposés dont l’avenir dira ce qui peut effectivement en être conservé et adopté au plan quotidien, tout comme bien des solutions ou options naguère considérées à première vue comme très prometteuses sont tombées en désuétude en raison de leur inapplicabilité pratique. En dehors de cet aspect perpétuellement valide des choses se pose la double question du caractère suffi sant ou non des tentatives consenties en faveur de la limitation des dégradations climatiques, et de l’écoulement sur le marché de produits automobiles de plus en plus coûteux, tant à l’achat qu’à l’usage, dans un contexte politique et politico-économique planétaire de moins en moins pérenne et, au contraire, de plus en plus problématique et tendu à tous points de vue. Notre champ d’investigation Il est évidemment hors de question de rendre compte de tout le patrimoine de conceptions technologiques étalé à l’occasion de la session 2010 du Mondial de l’Automobile. Notre choix, que nous considérons raisonnable, est de nous limiter aux modèles de quelque catégorie que ce soit (sauf les 100% électriques, le « bilan carbone » de leur fabrication et de leurs recharges étant discutable) émettant moins de 100 gr de CO2 par kilomètre, le CO2 (ou gaz carbonique) étant le principal des gaz à effet de serre (GES) et les consommations correspondantes de carburants étant alors corollairement diminuées de façon notable. Là encore, nous ne citons que quelques constructeurs ou marques à titre d’illustration, l’ensemble des firmes en lice, confrontées inévitablement aux mêmes conditions physiques et physico-chimiques ayant abouti à des performances logiquement assez proches les unes des autres. Nous nous intéressons du même à trois berlines grand tourisme électriques de très haut de gamme (et de prix pharamineux !) aptes à étendre très signifi cativement l’autonomie due à leurs seules batteries grâce à une petite centrale électrique (thermique) embarquée. Les contraintes spécifiquement liées à la voiture électrique La voiture électrique est un élément d’hétérogénéité au sein d’un trafi c dit normal, car ses comportements sont différents. On ne l’entend pas venir, ce qui la rend dangereuse et des sonorisations sont à l’étude pour pallier cet inconvénient. La batterie de traction intégrée au véhicule est, malgré les progrès accomplis depuis une bonne quinzaine d’années, lourde et fort encombrante et représente au moins 40% de la masse (et du prix) de la voiture. L’alimentation de la batterie de traction, qui ne peut être interchangée, nécessite l’établissement d’infrastructures routières de recharge si le véhicule cesse d’appartenir à des fl ottes captives. Son usage à titre privé n’est envisageable que pour la clientèle n’ayant pas besoin d’un rayon d’action dépassant les 160 à 200 kilomètres aller et retour, le plus couramment ; exceptionnellement ce peut être près du double (cf. Venturi). Ne parlons pas du prix à payer pour jouir de ces performances… Une petite part de marché de l’ordre de 5 à 15% pourrait se dessiner à moyen terme, conquise par des acheteurs très « argentés ». Autre difficulté, le chauffage en hiver, sur quoi prélever l’énergie nécessaire ? Autres diffi cultés encore, dues au comportement thermodynamique et électrochimique des batteries : qu’il s’agisse des lithium-ion ou des Ni-MH (nickel-hydrure métallique) de SAFT, que l’on recommande conventionnellement de ne pas décharger à plus de 80% de leur capacité nominale et qui peuvent supporter avec un rendement de 95% jusqu’à 3.000 cycles charge-décharge avant d’être hors d’usage, ou des Batscap LMP (lithium-métal-polymère) de Bolloré, qui selon l’usage qui en est fait, peuvent couvrir jusqu’à 200.000 kilomètres, avec amoindrissement progressif avant de devoir être remplacées, les batteries modernes actuelles exigent grande méticulosité de la part de leurs possesseurs, qui par ailleurs, doivent veiller à éviter un possible emballement thermique destructeur lors des recharges. L’offre des marques françaises Nous commençons par citer Peugeot, qui a atteint son bicentenaire en 2010, précisément. Était exposée en « écorché », parmi d’autres modèles prestigieux mais n’entrant pas dans le cadre de notre quête, la 3008 Hybride 4 ainsi nommée car il est possible de rendre ses quatre roues motrices simultanément. Elle est motorisée à l’avant par un diesel 2 litres de 163 chevaux consommant 3,8 litres de gazole aux 100 kilomètres et à l’arrière d’un moteur électrique d’une puissance équivalente à 37 chevaux. L’autonomie en mode électrique est de 10 kilomètres, ce qui peut suffi re à sortir d’une zone urbaine. Le diesel prend automatiquement le relais dès que nécessaire ; pas de consommation à l’arrêt à un feu rouge, technologie start and stop. Les rejets de gaz carbonique sont de l’ordre de 99 grammes par kilomètre. Une jolie berline puissante sur le marché à partir de 2011. Par ailleurs, l’une des deux 207 (purement diesel), Blue Lion, la 90 chevaux, bien conduite et chaussée de pneus à faible hystérésis, peut n’émettre que 99 gr de CO2/km. Du côté de Citroën, nous nous sommes laissé séduire par le mirifi que Lacoste, un concept-car pensé pour le plein été, habillé par la marque au crocodile, dont la mise sur le marché est improbable telle quelle. Ses caractéristiques thermodynamiques ne sont pas révélées et dérivent – de façon très lointaine – de celle de l’ancienne 2 CV. Le véhicule est petit (longueur 3,45m, largeur 1,80m, hauteur 1,52 m). Il est réputé doté d’un moteur 3 cylindres souple, fi able et respectueux de l’environnement… Mais il ne faut pas négliger l’intérêt potentiel des nouvelles C4, dont la plus économe devrait permettre de ne pas dépasser 99 gr de CO2 au kilomètre. Le moteur est un diesel de 110 chevaux à boîte manuelle pilotée (c’est-à-dire automatique ou non, au choix) avec dispositif start and stop. Le moteur est assisté du système microhybride qui comporte couplage du démarreur et de l’alternateur de recharge de la batterie. La consommation moyenne de gazole est de 4,4 litres aux 100 kilomètres. Véhicule livrable fi n 2010. Les solutions de Renault Dans la série des Eco2, des machines essence ou diesel purement thermiques, deux paraissent pouvoir tenir (pour les modèles de nouvelle génération) la gageure des 99 grammes de CO2 au kilomètre et c’est la motorisation diesel qui y paraît la plus adapté en raison du meilleur rendement thermodynamique du diesel (« propre », muni de fi ltre à particules, comme dans toute la concurrence). L’équipement en pneumatiques à basse hystérésis est également programmé. Quant aux boîtes de vitesse, manuelles cinq rapports ou automatique, elles sont réputées peu consommatrices d’énergie. La première, équipée d’un diesel de moins de 1,5 litre de cylindrée, qui développe 90 chevaux pour une consommation moyenne de 3,6 litres de gazole/100 kilomètres, dérive de la Clio, dont on fête le 20 e anniversaire. La seconde, plus petite, dérive de la Twingo. Les stupéfiantes « grand tourisme » électriques à autonomie étendue Trois constructeurs se sont glissés dans ce créneau : le Français Exagon Motors, avec sa très luxueuse Furtive eGT pour laquelle le choix de la motorisation thermique d’appoint destinée à soutenir sa batterie Saft Li-ion n’est pas encore arrêté, mais qui comporte déjà la sonorisation révolutionnaire Hopman Sound Transfer, l’Allemand Opel, avec son prototype Opel Ampera également très beau, équipé lui aussi d’une Li-ion de Saft, dont les caractéristiques ne sont pas défi nitivement fi xées et dont l’autonomie assistée serait de l’ordre de 500 kilomètres, et enfi n l’Anglais Jaguar avec son pharaonique C-X75, muni de quatre moteurs électriques de 195 ch chacun lui permettant d’atteindre 330 km/h (une « providence » pour les radars…) et d’une autonomie poussée à 900 kilomètres grâce à deux micro-turbines à gaz embarquées alimentées par une réserve de 60 litres d’un gaz liquéfi é sous faible pression. En conclusion : qu’attendre de demain ? À cette question, la chambre syndicale internationale de l’automobile et du motocycle (CSIAM) à Paris répond que 1,6 milliard de véhicules circuleront sur la planète en 2030 et 2, 5 milliards en 2050 (où la population mondiale escomptée devrait être de l’ordre de 9 milliards de personnes), ce qui est fort préoccupant à tous Henri Durrenbach Henri Durrenbach points de vue. Pour l’heure, les « 10% du CO2 rejeté dans l’atmosphère ont pour origine les émissions des voitures particulières » … ce qui n’interdit pas de se poser des questions concernant les 90% restants ! (comprenant aussi la part des véhicules militaires) car si le CO2 est non polluant, mais « seulement » désastreux pour les équilibres climatiques, désormais rompus, les gaz et substances qui l’accompagnent inexorablement se montrent dangereux pour la santé des humains (et de sans doute beaucoup d’autres êtres vivants…) Quid des microparticules échappant aux fi ltres à particules (FAP) les plus élaborés et pouvant se fi xer à demeure dans le tissu pulmonaire ? Quid des rejets de tout petits moteurs non équipés ? Sur d’autres plans et d’une manière plus générale, alors que le paupérisme s’étend dans le monde sauf pour quelques classes privilégiées, comment placer massivement sur le marché des véhicules de plus en plus chers à l’achat et ruineux à l’usage alors que déjà les signes de mévente s’amplifi ent (en occident pour commencer…). Il est clair qu’une régression d’une manière ou d’une autre va devoir s’amorcer à terme. HENRI DURRENBACH |