Votre premier grand souvenir de lecture ? La jument verte. J’étais petite, je devais avoir 12 ans ; j’ai vu ce titre dans la bibliothèque de ma mère et j’ai volé le livre. Je m’attendais à une jument qui devient verte, comme dans un conte de fées et je suis tombée sur un truc très différent. Je n’ai pas tout compris mais j’ai quand même assez bien ressenti l’affaire. Votre héroïne favorite ? Simone Weil et Simone de Beauvoir. Celle que vous auriez pu être ? Je n’en sais rien… je ne sais pas. J’ai déjà un vrai boulot à être moimême. J’ai déjà du mal à me supporter comme je suis, alors une autre… je ne sais pas si je pourrais ! Votre livre du moment ? Philippe Sollers, L’Éclaircie. La musique que vous avez en tête ? En ce moment, mes nouvelles chansons que je dois chanter au Châtelet *, je n’ai que ça en tête et ça fait un bon moment. C’est un travail de longue haleine… Le film que vous aimeriez voir ou revoir ? Voir, j’en sais rien, je ne suis pas au courant de l’actualité en ce moment. Renoir, tous les Chaplin, Orson Welles et Renoir. * Elle était en concert au théâtre du Châtelet les 6, 7 et 8 février derniers. 6 Le Questionnaire d’Annabelle Un spectacle inoubliable ? Tous, tous… Je suis complètement bouleversée par quelqu’un sur scène. Je connais la musique de la peur ; et la difficulté de la chose. Et tous ces comédiens, ces gens, ces chanteurs… tous me bouleversent. En 1963 vous avez chanté Vieille de Jacques Brel, (titre refusé par Bardot). Qu’est-ce que le temps vous a apporté de bien ? (Elle chante…) C’est pour cela jeunes gens Qu’au fond de moi s’éveille Le désir charmant De devenir vieille Pour qu’on m’aime pour autre chose que pour mes fesses, ce qui est un assez joli programme. Mais je ne l’ai pas chantée en pensant à moi mais en pensant à Bardot. Parce qu’elle avait quand même des fesses remarquables, magnifiques… une magnifique personne. Juliette Gréco en 1956. À Paris en 1965. Avez-vous refusé des chansons qui sont devenues de grands succès interprétés par d’autres ? Norbert Glanzberg est venu me voir, il venait d’écrire une chanson qui s’appelait Padam ; j’avais 19 ans et pour moi le passé c’était pas énorme. Je n’y croyais pas, je ne pouvais pas chanter cet air qui m’obsède jour et nuit, cet air n’est pas né d’aujourd’hui… c’est ridicule, j’étais ridicule. Donc Piaf l’a chantée, comme elle chantait… de manière éblouissante. Et j’en étais heureuse. Moi je n’aurais rien pu faire, je n’en avais pas les moyens, le matériau, la maturité. Quel âge avait-elle lorsqu’elle l’a chantée ? Oh, elle devait être très vieille, elle devait avoir trente ans, quelque chose comme ça. (rires) NOA/ROGER-VIOLLET STUDIO BORIS LIPNITZKI/ROGER-VIOLLET |