Directsoir N°317/Mercredi 19 mars 2008 4 EN COUVERTURE Juliette essaie de renouer avec la vie. Kristin Scott Thomas Une Anglaise à Paris A l’affiche de « Il y a longtemps que je t’aime », le premier film réalisé par le romancier Philippe Claudel, l’actrice anglaise joue le rôle d’une femme qui retrouve sa sœur cadette après quinze années passées en prison. Elle est anglaise, mais parle français couramment. Elle est née à Redruth, en Cornouailles, mais vit à Paris. Elle a longtemps été confinée dans les seconds rôles, mais accède depuis quelques années à un statut de star, reconnue notamment par le public français. Dans son livre Petite fabrique des rêves et des réalités, Philippe Claudel écrit à son sujet : « Je me suis toujours étonné du fait que le cinéma français, à mon sens, la sous-employait en lui offrant des rôles secondaires ou un peu archétypaux, tout en lui reconnaissant un très grand talent. J’étais heureux de lui donner, avec le personnage de Juliette, l’occasion de prouver qui elle était vraiment : une grande actrice. » Juliette, c’est le prénom du personnage incarné par Kristin Scott Thomas dans Il y a longtemps que je t’aime, film de l’écrivain lorrain qui sort aujourd’hui en salles. Le romancier, lauréat en 2003 du prix Renaudot pour Les âmes grises et qui a reçu en 2007 le Goncourt des lycéens avec son nouveau livre Le rapport de Brodeck, signe ici sa première réalisation cinématographique. Quand on lui demande si le septième art lui permet d’exprimer des choses qu’il lui est difficile de dire dans l’écriture, Philippe Claudel parle du silence : Je me suis toujours étonné du fait que le cinéma français, à mon sens, la sous-employait. Philippe Claudel dans Petite fabrique des rêves et des réalités. « Ce film s’est fait dans le creusement de la parole, explique-t-il, le personnage de Juliette est un personnage qui est presque mutique pendant toute une partie du film. Elle parle très peu. Et cette approche est purement visuelle. C’est par ses gestes, c’est par sa façon de se mouvoir, c’est par la place qu’elle prend dans l’espace, c’est par ses mimiques que l’on arrive à lire sur son visage que le personnage commence à exister. » LA PATIENCE DE L’ANGLAISE Ce rôle est dur. C’est celui d’une femme qui sort de prison et qui, après quinze années, retrouve la société. Elle est hébergée par sa sœur, jouée par Elsa Zylberstein, qui vit avec ses deux filles, son mari et le père de celui-ci. Philippe Claudel, toujours : « Une des évidences, pour que cette histoire prenne corps, était que la comédienne qui incarnerait Juliette accepte une métamorphose physique qui l’éloignerait, pendant une bonne partie du film, de toute beauté. Je voulais qu’on sente les années d’enfermement sur son visage. » Pour coller à cette exigence et à l’impression générale du film, Kristin Scott Thomas n’est pas maquillée, ou peu. Il suffit de regarder l’affiche, placardée dans les rues depuis plusieurs jours, pour s’en convaincre. Le teint est blême, le fond grisâtre, le regard glacé. Quand, THIERRY VALLETOUX |