Directsoir t Jeudi 8 février 2007 4 EXCLUSIVITÉ INTERVIEW CÉCILE DUFLOT Verte et mûre La nouvelle secrétaire nationale des Verts, Cécile Duflot, appelle au rassemblement du parti écologiste derrière sa candidate à l’élection présidentielle Dominique Voynet. Sa langue est verte et son parler franc. D’où vient cette manie de changer de tête tous les deux ans chez les Verts ? Cela s’appelle la démocratie. Chez les Verts, nous sommes pour le renouvellement des mandats et des personnes qui les occupent. Quand je suis née, Jacques Chirac était déjà ministre, et aujourd’hui, il est toujours là. Chez nous, ça ne se passe pas comme ça. C’est ce que j’appelle le troisième temps de l’écologie politique. Pourquoi vous ? Ma nomination est une réaffirmation pour les Verts de la nécessité de radicaliser nos propositions. Je suis aussi là pour prouver que la politique est l’affaire de tous, elle n’est pas réservée à quelques personnes. Une grande partie de la classe politique est tellement déconnectée du reste de la société et de la vie normale, qu’elle ne se rend plus compte de la réalité. Les hommes politiques oublient souvent que la moitié des Français vit avec moins de 1 400 euros par mois. On a souvent traité les Verts d’illuminés Repères ABACA Pourquoi les Verts apparaissent-ils si désorganisés ? Pas plus que les autres partis. Et on se déchire nettement moins ! Quand on voit qu’en ce moment, au PS, des membres du parti sont en train, sciemment, de faire perdre leur candidate, on rêve ! Cela n’existe pas chez nous. Tous derrière Dominique Voynet ? Oui.Votez Voynet ! Nous avons un vrai projet politique. Nous savons qu’avant de nous attaquer aux seules questions écologiques, nous devons régler d’autres problèmes comme le malaise social, l’éducation, le logement ou l’immigration. Restez-vous militante avant d’être dirigeante ? J’ai la conviction qu’on peut changer les choses en s’organisant collectivement. Je suis profondément démocrate. Je ne suis pas bonapartiste, je ne crois pas au sauveur suprême. Si les gens décident de ne pas subir mais d’agir ensemble, on peut peser sur les événements. E. GREGOIRE/GAMMA MERIA-OG/DIRECT8 Comment avez-vous perçu le rapport du GIEC qui établit pour la première fois de manière scientifique et globale la responsabilité de l’homme dans le réchauffement climatique ? C’est douloureux d’entendre que c’est la première fois, car ce n’est pas vrai. Aujourd’hui plus personne ne rigole : nous arrivons au bout des réserves de pétrole, le climat se réchauffe et les eaux vont monter, ce qui aura des conséquences dramatiques sur les populations. Quelles sont les mesures les plus urgentes ? Il faut changer radicalement notre manière de vivre. Il faut faire des économies sur toutes les ressources naturelles et rétablir l’équilibre entre le Nord et le Sud. A. FAIDY/CIT’IMAGES Chez vous, c’est plutôt ambiance « bio » ? Manger bio, c’est mieux. J’ai toujours fait très attention à cela. Il y a plein de petits gestes qui ont des conséquences positives directes sur l’ensemble de la planète : marcher ou prendre son vélo au lieu d’utiliser sa voiture, restreindre sa consommation d’électricité ou d’eau. Que penser de l’idée de Jacques Chirac de créer une ONU dédiée à l’environnement ? J’en ai ras-le-bol des gens comme Chirac ou Sarkozy qui prônent de grands discours et ne font rien derrière. Parce que la fameuse formule de « la maison qui brûle » est très jolie, mais je n’ai pas vu beaucoup d’évolution depuis que Jacques Chirac a prononcé cette phrase en 2002, en Afrique du Sud. Dire que l’on va créer une grande organisation mondiale et ne pas se préoccuper des problèmes de pollution dans notre pays, c’est se foutre du monde. C’est dur d’être écolo aujourd’hui ? Moins qu’il y a 10 ou 20 ans. J’admire ceux qui ont commencé à agir à une époque où ce n’était pas à la mode et qui ont dû affronter les sarcasmes.Aujourd’hui, les gens ont conscience qu’il faut changer les choses. L’écolo L’eau Nicolas Hulot Cécile Duflot soutient activement sa candidate, qui a « négocié le protocole de Kyoto, parce qu’à l’époque le gouvernement estimait que ce n’était pas si important ». Elle attend « avec impatience le 1 er tour pour vous dire que Dominique Voynet a fait plus de 5% des votes. » PROPOS RECUEILLIS PAR BORIS EHRGOTT ET CAROLINE ITHURBIDE AVEC XAVIER PLASSON PROFIL Cécile Duflot, 31 ans, est mère de trois enfants, nés entre 1996 et 1999. Elle obtient un DEA de géographie (1996), puis entre à l’Essec dont elle sort diplômée en 2000. L’année suivante, elle passe du statut d’écolo à militante en adhérant aux Verts. Elle gravit les échelons, en devenant porte-parole exécutive puis le 16 novembre dernier, avec 60% des voix, secrétaire nationale du parti à la place de YannWehrling. Ecolo convaincue, elle ne suit pas juste un effet de mode. Tri sélectif, alimentation bio, économies d’énergie… Ecolo militante, qui n’hésite pas à se jeter à l’eau pour dénoncer la pollution de la Seine, ou à faire barrage aux convois de déchets nucléaires. Après le renoncement de l’animateur à se présenter à la présidentielle, les Verts espèrent réaliser un très bon score. Cécile Duflot minimise le phénomène Hulot : « Nicolas Hulot est un militant dans une association environnementale, comme beaucoup de gens. » |