Que sont-ils devenus ? Parcours sans faute Créé en 1959, racheté ensuite par Monsieur et Madame Kühnen en 1974, ce magasin genevois de vente et de fabrication de matériel d’équitation est devenu, en novembre 2008, la Sellerie Kühnen, Successeur Fabienne Panelati. Cinquante années d’un parcours sans faute d’un steeple-chase artisanal et commercial. Pourquoi – et comment – devient-on propriétaire d’un magasin comme la Sellerie Kühnen ? Fabienne Panelati : D’une façon toute naturelle. Genevoise d’origine, j’ai arrêté mes études durant le collège. Je voulais apprendre autre chose et devenir maréchal-ferrant. Il faut dire que mon père m’avait offert un poney qui a été pour beaucoup dans cette vocation. Ne trouvant aucun poste d’apprentie, je suis allée chez M. Kühnen qui m’a engagée pour trois années d’apprentissage. Trois années difficiles car il était très exigeant. Mais il m’a tout appris. Après cet apprentissage, je suis devenue stagiaire chez un peaussier genevois avant de faire un autre stage en bourrellerie (harnais d’attelage). Depuis 1980, je suis sellière diplômée. La seule et dernière diplômée genevoise. Je possède en plus la licence R de dressage et suis compétitrice en attelage degré 3 avec mes deux chevaux. Pour parfaire tout cela, j’ai également suivi la formation de moniteur de société en attelage auprès de la FSSE. Pour quelle raison avoir voulu prendre la succession de la famille Kühnen ? A la fin de mon apprentissage, mon amour de l’indépendance m’a décidée à monter mon propre atelier. L’aventure a duré vingt-quatre ans, durant lesquelles je me suis mariée et ai eu deux enfants. L’intérêt complémentaire de l’atelier, de cette indépendance, me permettait d’être très disponible pour ma famille. Pour en revenir à la sellerie, tout cela s’est fait par hasard. Un jour, ayant besoin d’un renseignement, je suis venue voir M. Kühnen. C’est là qu’il m’a demandé si cela m’intéressait de reprendre sa suite. Après concertation avec mon époux, j’ai accepté. Trois nouvelles années de travail avec les Kühnen. Puis, lors de leur départ à la retraite, une quatrième pour mettre en place la succession. Et maintenant ? Maintenant ? Je suis seule. Et je fais tout. Avec des horaires élastiques qui me conviennent, un mari qui m’aide, un emprunt que je dois rembourser en quatre ans, et plein d’atouts en main. Fabienne Panelati, Sellerie Kühnen 10 Créateurs No 9 On ne peut pas avoir un magasin de sellerie sans connaître les chevaux. Tous les matins, je m’occupe de mes chevaux et de ceux que l’on me confie. Et, à midi, je suis à la boutique, avec les clients. Implantée à Genève depuis que je suis gamine, le monde de l’équitation genevois me connaît. Et mes différents titres au niveau des championnats genevois et romands me donnent une place dans le monde du cheval. Et des atouts importants. Lors de ma demande d’emprunt, l’un de mes principaux arguments est que Genève possède la plus forte concentration de chevaux d’Europe. En y ajoutant les départements français de l’Ain et de la Haute-Savoie, vous obtenez la plus forte concentration de chevaux au monde ! Il y a donc ici un formidable potentiel ! Comment voyez-vous l’avenir ? Disons que « ma petite entreprise ne connaît pas la crise » puisque les gens décident à nouveau d’entretenir leur matériel. Ou, s’ils achètent un cheval, préfèrent investir dans la fabrication d’un équipement qui durera toute la vie de l’animal. Je me dois donc de continuer à investir. Du reste, je n’ai pas le choix. Avec l’emprunt que je viens de faire, aidée en cela par la Fondetec, je dois poursuivre la route. Le magasin aura cinquante ans cette année. Belle occasion de fêter cela, de poursuivre et dynamiser la transformation déjà entreprise. Lorsque mon emprunt sera remboursé, mon mari, Alain Panelati, écuyer diplômé, juge de brevet, viendra me rejoindre. Pour l’attelage, nous travaillons déjà ensemble. Nous sommes donc habitués à œuvrer en équipe, à nous faire confiance dans les situations difficiles. Du reste, la seule fois où je me suis « couchée » avec l’attelage, il n’était pas là. Un signe, n’est-il pas ? Face à la concurrence, comment vous positionnez-vous ? La concurrence n’est pas un problème. De la vingtaine de selleries à Genève, lors de la création de la Sellerie Blanchard, en 1959, je suis la dernière en activité. Et il y a quatre autres magasins d’équitation. Pour bien comprendre l’attente du client, il faut être au moins semi-professionnel afin d’apporter explications et solutions adéquates. Comme les hommes, les chevaux ont leur propre personnalité, difficile à cerner sans l’expérience. Comparativement à mes concurrents, je possède cet atout. Ma clientèle le sait. Le fait d’avoir été propriétaire d’une douzaine de chevaux me permet d’être « de bon conseil ». L’expérience est derrière. Je reste donc confiante en l’avenir, même avec cette crise. Pour le moment, l’objectif est de trouver quelqu’un pour tenir le magasin. Développer l’atelier. Trouver un apprenti, le former. Et même si j’ai encore vingt ans devant moi, penser à ma succession. Propos recueillis par Jean Michel Garnier Carte de visite de la Sellerie Kühnen en page 49 |