NUDE IN THE SUN NU AU SOLEIL 96 Phaidon réédite son ouvrage majeur sur Nan Goldin dans un nouveau format, textes de Guido Costa, un proche de la célèbre photographe américaine. Sortie le 2 septembre. des livres et des revues, se faisait aussi par la poste, dans les rues, les ateliers, les boutiques d’estampes, les librairies et les bordels (…) Pour faire obstacle à ce commerce, et ce dès le milieu du siècle, ces ventes furent considérées en France comme des outrages aux bonnes mœurs, passibles d’amendes et de peines d’emprisonnement, explique AlessandroBertolotti (6). Les photographes et les éditeurs devaient avoir une « couverture officielle » (…) et certains éditeurs publièrent leurs albums photographiques sous l’intitulé : Recueil d’études de nu d’après nature, pour peintres et sculpteurs. Beaucoup d’œuvres d’Henri Matisse de la période 1900 trouvent notamment leur source dans ce type de revues… Par la suite, au cours de notre histoire, le nu sera le point de convergence de tous les sujets photographiques, qu’ils le suggèrent, le renient ou l’exhibent sans scrupule... Les pictorialistes de la fin du XIX e siècle s’éloignent ainsi de la représentation du réel en cherchant de nouveaux modes d’expression dans le médium photo, négligeant le progrès technique et plébiscitant les « imperfections » : ce n’est pas le sujet qui importe mais l’interprétation de l’artiste. L’image du nu est alors troublante (parfois trouble), raffinée, romantique, lyrique… En France, les surréalistes se passionnent pour l’inconscient, et sa puissance fantasmagorique, mis à jour par la psychanalyse… Les images insolites et mystérieuses de Man Ray en témoignent particulièrement. A partir des années 20, un monde artificiel et illusoire peuplé de stars de cinéma fait son apparition. Le glamour naît, la photo sexy d’actrices dans des poses suggestives aussi. Passons très vite sur les mouvements naturistes originaires d’Allemagne prônant la nudité comme le symbole de la force et de la beauté d’un peuple qui s’estimait supérieur, on en connaît les conséquences dramatiques… La morale se fait de plus en plus légère après la Seconde Guerre mondiale, même si la censure officielle continue d’intervenir sur les moyens de communication de masse. Aux Etats-Unis, les écrivains de la beat generation prennent les choses en main mais la diffusion du nu photographique est très surveillée, seulement transmissible par voie postale (aux risques de l’expéditeur et du destinataire). L’Europe est plus détendue sur le sujet, les éditeurs peuvent éviter la censure en accompagnant les photos de nus par des articles « de fond » ! La révolution sexuelle est en marche dès les années 50 : les verrous se brisent… (1) à (3) L’art du nu au XIX e siècle, le photographe et son modèle, Bnf/Hazan, 1997. (4) et (5) Nouvelle histoire de la photographie, sous la direction de Michel Frizot, éditions Larousse, Bordas, 1994. (6) Livres de nus d’AlessandroBertolotti, Editions de la Martinière/MEP, 2007. juillet-août 2010 www.cotemagazine.com Elle doit sa célébrité à son premier ouvrage, Ballad of sexual dependancy, publié en 1986, que François Hébel, l’actuel directeur des Rencontres d’Arles, fut l’un des tout premiers en Europe à nous dévoiler… Autodidacte, Nan Goldin s’est intéressée dès le début des années 70 aux communautés minoritaires liées au monde de la nuit et de la drogue auxquelles elle fut liée une grande partie de sa vie ; ces « laissés-pour-compte » sont en effet ses amis, ses amants, sa famille… Le 2 septembre prochain, Phaidon rééditera l’ouvrage (de 2005) réunissant 55 photos de l’Américaine, née en 1953 à Washington, et cette formidable introduction signée de Guido Costa, critique et proche de l’artiste. Nan Goldin, Phaidon, 128 pages, 9,95 €. Nan Goldin, born in Washington DC in 1953, became famous with her first book, Ballad of Sexual Dependency, published in 1986. From the early 1970s, self-taught Nan Goldin photographed the hard-drug underground nightlife communities in which she has spent most of her life ; these social rejects are her friends, her lovers, her family. On 2 September, Phaidon is reissuing its 2005 book of 55 Nan Goldin photographs with a brilliant introduction by Guido Costa, critic and friend of the artist. Out of concern for anatomical precision, daguerreotypes gradually found their place in the artist's studio, replacing flesh-and-blood models who found those interminable acrobatic poses hard to endure. After 1851-52, when paper photography was starting to become widespread, nude photographs circulated widely in an art world that held nude life studies in high regard. But some were undeniably erotic. Ogling the model while serving Art seemedquite acceptable until it all got out of hand. "In prints and on postcards and, by the end of the century, in books and magazines, nude photographs were sold by mail, in the street, in studios, print shops, bookshops and brothels (…) In France such sales were considered an affront to public decency," explains AlessandroBertolotti (5). Later, the nude was the point of convergence of all photographic subjects, whether suggested, disowned or exhibited without scruple. The pictorialists of the late 19th century, for example, strayed from pure representation of the real to find new modes of expression. For them the artist's interpretation counted more than the subject. The surrealists in France were fascinated by the unconscious and its phantasmagorical power, revealed by psychoanalysis. In the 1920s an illusory, artificial world peopled by film stars emerged : glamour was born, along with sexy photos of actresses in suggestive poses. Meanwhile the German naturist movement advocated nudity as a symbol of the force and beauty of a people who considered themselves superior … and we know to what horrors that led. After the Second World War, morals loosened ever further. In the United States the Beat Generation writers went all the way but the dissemination of nude photos was closely watched ; they could only be sent by post, and even then might be returned to sender. Europe was more relaxed ; publishers could avoid censorship by printing their nude photos alongside serious articles. By the 1950s, the sexual revolution was under way : the ramparts were breached. (1) to (3) L’art du nu au XIX e siècle, le photographe et son modèle, Bnf/Hazan, 1997. (4) Nouvelle histoire de la photographie, edited by Michel Frizot, Editions Larousse, Bordas, 1994. (5) Livres de nus by AlessandroBertolotti, Editions de la Martinière/MEP, 2007. |