CNRS Le Journal n°270 jan/fév 2013
CNRS Le Journal n°270 jan/fév 2013
  • Prix facial : gratuit

  • Parution : n°270 de jan/fév 2013

  • Périodicité : trimestriel

  • Editeur : CNRS

  • Format : (215 x 280) mm

  • Nombre de pages : 44

  • Taille du fichier PDF : 8 Mo

  • Dans ce numéro : Les OGM de la discorde

  • Prix de vente (PDF) : gratuit

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w 20 Parallèlement à ce moratoire imposé en février 2008, la France a encadré la culture et l’utilisation des PGM pour les années à venir, via une loi adoptée en juin de la même année. D’abord, pour anticiper la levée éventuelle du moratoire. Ensuite, parce que si la culture des PGM est interdite, leur importation, elle, est légale. Étiquetage spécial Le seul OGM non transformé autorisé à la consommation est le maïs doux 3, mais de nombreux produits dérivés d’OGM (farine et semoule de maïs, huile de colza, sirop de glucose,…) peuvent être importés et consommés. Compte tenu du peu d’appétence des Français pour les OGM, ils n’occupent qu’une place réduite sur les | L’enquête cnrs I LE JOURNAL d’hectares de plantes génétiquement modifiées sont aujourd’hui cultivés dans le monde, soit 1/10 e des cultures totales. Principaux pays cultivateurs En millions d’hectares En% des cultures OGM mondiales Canada 10,4 Paraguay 2,8 Etats-Unis 69 Brésil 30,3 Argentine 23,7 répartition des cultures mondiales En millions d’hectares 51 OGM Non OGM maïs Soja 75,4 24,6 total (soja, maïs, coton, colza) 108 coton colza 24,7 5,3 22,8 Europe 0,16 espagne 0,1 france 0 Afrique du Sud 2,3 Pakistan 2,8 Inde 10,6 Chine 3,9 Au moins Rh des 4,6 millions 93,9 159,3 160,7 de tonnes de soja importées en France sont transgéniques. Le tourteau de soja est la base 8,2 de l’alimentation des bovins et on trouve la lécithine de soja dans de nombreux produits de l’alimentation humaine. étals de nos supermarchés. Mais pour nos animaux d’élevage, c’est une autre affaire : selon Greenpeace, 80% d’entre eux consommeraient des OGM dans l'Hexagone. « Dans ce secteur-là, on a vraiment besoin de soja et, dans une moindre mesure, de maïs. Or, au niveau mondial, il est devenu difficile et cher de se fournir en produits non OGM », analyse Christine Noiville. Qu’ils soient consommés par des hommes ou des animaux, ces aliments sont soumis à un étiquetage spécial. Ils doivent porter la mention « contient des OGM » dès lors que le taux de ces derniers dépasse 0,9%. En deçà de ce seuil, l’étiquetage n'est pas requis si la présence d'OGM est fortuite et techniquement france 0 espagne 0,06% europe 0,1% Afrique du Sud 1,4% Pakistan 1,7% Paraguay 1,7% Chine 2,4% Canada 6,5% Inde 6,6% Argentine 14,9% Brésil 19% États-Unis 43,3% Caractère génétique introduit En millions d'hectares Rh et Bt 42,2 Bt 23,9 La majorité des plantes génétiquement modifiées sont soit résistantes aux herbicides (Rh), soit résistantes aux insectes en produisant leur propre insecticide (Bt), soit les deux. inévitable. Il y a cependant des exceptions. En effet, l’obligation d’étiquetage ne vise pas les produits (lait, œufs, viande) issus d’animaux nourris avec des OGM, ni les denrées non préemballées proposées dans le secteur de la restauration. Malgré eux, les consommateurs peuvent donc manger des OGM. « Mais, d’une part, il y a très peu d’OGM dans l’alimentation humaine française ; d’autre part, les OGM autorisés à la mise sur le marché ont été évalués comme sûrs », tempère la présidente du CEES. La loi de 2008 impose en effet à tout industriel qui souhaite commercialiser un produit d’en évaluer lui-même les risques sur la santé et l’environnement en confiant une étude au laboratoire de son choix. Des experts Sources : Isaaa 2012, CONSUltants Naturels, FAO2010/©iNFOGRAphie : c.hein pOURCNRSle jOURNAl ; ANDRiSt, olyCUM/Fotolia
N°270 I janvier-février 2013 L’enquête | 21 w pourront ensuite partir de cette étude pour mener leur propre investigation. Qui sont ces experts ? Au niveau européen, il s’agit de l’Agence européenne de sécurité des aliments (Efsa), une autorité qui ne remet pas en cause les commissions nationales. En France, ce sont le Haut Conseil des biotechnologies (HCB) et l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) qui sont compétents. Né de la loi de 2008, le HCB est composé de deux entités : un comité scientifique et un comité économique, éthique et social. « Cette organisation en deux chambres a été voulue par le législateur afin de ne pas enfermer le débat sur les OGM dans le seul registre environnemental et sanitaire, bien d’autres questions se posant en la matière (éventuelle dépendance des agriculteurs, protection des OGM par des brevets, choix tenant au type d’agriculture que notre société souhaite pour demain, etc.) », précise Christine Noiville. L'exigence de transparence Rigoureux, le système d’évaluation soulève pourtant des questions. Tout comme dans d’autres domaines (médicaments, substances chimiques…), des problèmes d’ordre structurel sont pointés. « Ainsi, le fait même de confier les études préliminaires aux industriels devrait être repensé, observe Christine Noiville. Il conviendrait de réfléchir à des solutions alternatives plus garantes d’impartialité. L’État n’a pas les moyens de prendre en charge ces études, mais elles pourraient être financées via un fonds abondé par les industriels et géré par l’État, qui nommerait ensuite des laboratoires indépendants, via des appels d’offres, pour réaliser les évaluations. » Mais l’État est également en cause. De nombreuses voix se sont élevées pour dénoncer le manque d’indépendance de certains experts de l’Efsa ou du HCB, en proie à des conflits d’intérêts. « Sur ce point, nous avons beaucoup progressé, assure Christine Noiville. Aujourd’hui, chaque membre a obligation de déclarer tout lien le mettant potentiellement en situation de conflit d’intérêts avant d’entamer un travail d’expertise. Surtout, les travaux des experts doivent être suffisamment contradictoires pour assurer une © illustratiON:s. bloch pOURCNRSle jOURNAl Les chercheurs et l’expertise scientifique La société manque cruellement d’experts scientifiques. Tel est l’un des messages forts que porte le numéro de La Revue Hermès sur l’expertise, paru en novembre dernier. Marie-Odile Bertella- Geffroy, juge d’instruction au pôle santé publique du tribunal de grande instance de Paris, explique notamment qu’elle peine à recruter. Gérard Arnold, directeur adjoint scientifique de l’ISCC (Institut des sciences de la communication du CNRS) analyse : « Si les chercheurs sont si peu enclins à jouer les experts, c’est que cette activité, qui demande un gros investissement en temps, n’est pas prise en compte dans les évaluations auxquelles ils sont soumis par le CNRS. Un chercheur qui a le souci de sa carrière n’a donc pas intérêt à en faire. Pour que cette situation change, nous avons proposé que soit créé un service lié à l’expertise au sein même du CNRS. Ainsi, le travail d’expertise serait mieux reconnu et valorisé. » À l’attention de ceux qui se portent volontaires, le CNRS a adopté, le 23 juin 2011, la « charte de l’expertise collective ». Guide des bonnes pratiques, la charte stipule notamment que les chercheurs doivent déclarer leurs éventuels conflits d’intérêts, citer leurs sources et les rendre accessibles, afin que quiconque puisse les vérifier, et souligner les incertitudes qui existent. Elle indique également que tout chercheur a la liberté d’accepter de réaliser des expertises à titre individuel, mais que celles-ci n’engagent pas le CNRS. Contact : Institut des sciences de la communication du cnrs Gérard Arnold > gerard.arnold@iscc.cnrs.fr à lire. Les chercheurs au cœur de l’expertise, la Revue Hermès n°64, novembre 2012. expertise de qualité, dénuée d’arguments d’autorité ou de positions doctrinales irrecevables. » La transparence est de mise. La modération, aussi : « Aujourd’hui, quiconque veut alerter sur les dangers que peut représenter un produit (OGM ou autre) sur la santé ou l’environnement est susceptible de subir des pressions, de se voir privé de crédits de recherche... Il est important de protéger ces lanceurs d’alerte, mais cela ne va pas sans conditions : l’alerte doit être lancée de bonne foi et ne doit procéder ni du scandale médiatique ni d’un appétit de notoriété, insiste Christine Noiville. Elle doit suivre une procédure canalisée, être lancée en interne (au sein de l’entreprise par exemple), puis, si besoin, portée devant une agence compétente pour juger de son bien-fondé. » Cette agence devrait bientôt voir le jour, grâce à une proposition de loi adoptée au Sénat le 21 novembre 2012 : il s’agit de la Commission nationale de la déontologie environnementale. « Elle a pour mission de veiller aux règles déontologiques s’appliquant à l’expertise scientifique et technique, et aux procédures d’enregistrement des alertes en matière de santé et d’environnement 4. » Sans nécessairement tirer la sonnette d’alarme, certains scientifiques mettent en garde contre le peu de recul qu’offrent les tests réglementaires, réalisés sur seulement trois mois. Ils ont été entendus. Le HCB, qui a toute latitude pour initier ses propres travaux, plaide pour que soit menée une étude sur deux ans environ. E. B. 1. Source : www.ogm.gouv.fr. 2. Unité CNRS/Université Paris-I-Panthéon-Sorbonne. 3. Source : www.ogm.gouv.fr. 4. Source : http:Ilwww.senat.fr/leg/tas12-034.html. Contact : Unité mixte de recherche de droit comparé de Paris Christine Noiville > noiville@yahoo.fr



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