CNRS Le Journal n°269 nov/déc 2012
CNRS Le Journal n°269 nov/déc 2012
  • Prix facial : gratuit

  • Parution : n°269 de nov/déc 2012

  • Périodicité : trimestriel

  • Editeur : CNRS

  • Format : (215 x 280) mm

  • Nombre de pages : 44

  • Taille du fichier PDF : 8,5 Mo

  • Dans ce numéro : La déferlante des octets

  • Prix de vente (PDF) : gratuit

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©C. DELHaye © aRCHivesDépaRTemeNTalesDeL’aUDe 16 spécialiste du sujet. De fait, à Capestang, en plus de scènes d’amour courtois et de symboles évoquant la richesse, on trouve notamment un fou à grelot exhibant son anus, une caricature de moine, et autres figures grimaçantes. Plutôt singulier quand on sait que le propriétaire de l’époque n’était autre que l’archevêque de Narbonne… Tandis que dans le presbytère du village de Lagrasse, ce sont tout simplement des scènes de bordels où les moines sont d’assidus clients, qui ornent l’ancienne demeure du curé. S’agit-il de jugements moralisateurs portés sur les moines, que les curés d’alors détestent cordialement ? Ou plutôt du plaisir de posséder dans les recoins de son intérieur des images licencieuses et comiques ? Le sens de ces peintures reste encore un mystère. « C’est en tout cas une vraie manne de nouvelles images issues de cette période, dont on croyait pourtant bien connaître l’iconographie », s’enthousiasme le chercheur. Les plans qu’il a établis battent déjà en brèche l’idée qu’il s’agissait d’un art purement décoratif, fait de motifs identiques qui se répètent. « Les 09 | En images cnrs I LE JOUrnAL images sont toutes différentes, organisées précisément dans l’espace pour se répondre », insiste-t-il. Plus d’une centaine de plafonds peints médiévaux, appartenant à d’anciennes tavernes, à des maisons de marchands ou de bourgeois, sont maintenant connus en France. Après analyse, ils donneront de précieuses informations sur la vie quotidienne du xv e siècle, en marge des témoignages aristocratiques et religieux des manuscrits et de l’architecture, jusqu’alors principales références du Moyen Âge. « Nous avons maintenant accès aux images de l’univers domestique de toute une frange de la société qui cherche à représenter ses valeurs et son identité dans ses grandes maisons, et qui aime de plus en plus vivre entourée d’images », conclut Pierre-Olivier Dittmar. 1.Unité CNRS/EHess, qui fait partie du futur Campus Condorcet-Paris-Aubervilliers. 2. Unité CNRS/Universitéparis-I-Panthéon-Sorbonne. Contact : Centre de recherches historiques (GAHOM), Paris Pierre-Olivier Dittmar > pierre-olivier.dittmar@ehess.fr 10 11 12 © aRCHivesDépaRTemeNTalesDeL’aUDe © J.-L. Tisseyre 08 08 Caricature de moine à grosses lèvres et à grandes oreilles, à Capestang. 09 Monique Bourin, du Laboratoire de médiévistique occidentale de Paris, et Pierre-Olivier Dittmar, du Centre de recherches historiques, observant des closoirs. Sur celui tenu par Pierre-Olivier Dittmar, un être hybride, corps de félin à visage humain, représente l’animalité qui existe en l’homme. 10 Cette scène d’épilation d’une prostituée à la lumière d’une chandelle, trouvée au presbytère de Lagrasse, n’a aucun équivalent au Moyen Âge et demeure un mystère. 11 Sur ce closoir du presbytère de Lagrasse, un fou se tient derrière un soldat bandant son arbalète avec un bien étrange projectile ! 12 et 13 Les images des closoirs sont comparées à celles des manuscrits médiévaux. En repérant les correspondances, l’historien cherche ainsi des interprétations. 13 À LirE. Images oubliées du Moyen Âge, les plafonds peints du Languedoc- Roussillon, DRAC du Languedoc- Roussillon, septembre 2011. Cet ouvrage est téléchargeable gratuitement sur : www.rccpm.org (dans la rubrique « Un patrimoine à découvrir »). © J.-L. tIsseyre © BNF
N°269 I novembre-décembre 2012 Décryptage | 17 Par CharlINe Zeitoun L e chef de l’État a tranché le 14 septembre dernier, lors de la conférence environnementale. « Dans l’état actuel de nos connaissances, personne ne peut affirmer que l’exploitation des gaz et huiles de schiste par fracturation hydraulique est exempte de risques lourds pour la santé et l’environnement », a déclaré François Hollande. Cette technique, la seule aujourd’hui connue et utilisée, est donc désormais interdite en France, et toutes les récentes demandes de permis ont été rejetées. Pour autant, au sein de la communauté scientifique, des voix s’élèvent pour dire qu’il est souhaitable de poursuivre les recherches sur cette potentielle ressource énergétique, en prenant bien sûr toutes les précautions nécessaires. Le but : disposer à terme d’une expertise publique transparente sur l’étendue réelle de cette ressource, les techniques d’exploitation envisageables et leurs risques potentiels. Le géologue Bruno Goffé nous livre son point de vue sur ce sujet controversé. Comment ça marche « Ces gaz sont prisonniers de roches peu poreuses, appelées rochesmères, situées à une profondeur de 2 000 à 3 000 mètres, et ne remontent pas tout seuls vers la surface, à la différence du gaz naturel couramment exploité », résume le chercheur. Pour les extraire, une solution consiste à fracturer la roche-mère pour qu’elle laisse échapper le gaz. Pour y parvenir, on fore celle-ci, on introduit un tube dans le puits, puis on provoque de petites Bruno GoffÉ Géologie Certains experts, tel le géologue Bruno Goffé, souhaitent que la recherche publique poursuive l’évaluation des techniques liées à l’exploitation des gaz de schiste. Gaz de schiste : faut-il poursuivre les recherches ? Ce spécialiste des ressources géologiques est délégué scientifique à l’Institut national des sciences de l’univers (Insu) du CNRS et directeur de recherche au Cerege (CNRS/Université Aix-Marseille/Ird/Collège de France). q Couches sédimentaires datant de plus de 300 millions d’années et recelant du gaz de schiste. (Ici, en Oklahoma). DR explosions destinées à percer la paroi de ce tube. On injecte ensuite à haute pression des centaines de mètres cubes d’eau mélangée à du sable et à des produits chimiques de type gélifiants, pour que se créent puis se propagent dans la roche des fissures et qu’elles restent ouvertes. « Par décompression, le gaz est alors entraîné vers la surface, avec l’eau d’injection et l’eau de la roche », explique le chercheur. Ce qui fait peur D’importantes pollutions de la nappe phréatique par le gaz, les produits chimiques ou des dissolvants, se sont déjà produites. Mais pour le chercheur, ces accidents ne doivent pas condamner a priori la technique de fracturation : « Ils résultent de mauvaises pratiques, notamment aux États-Unis où les exploitants, non contraints par des normes publiques aussi strictes qu’en France, ont pu réaliser des forages mal étanchéifiés ou utiliser improprement des produits dangereux, parfois déversés directement dans les cours d’eau. » Autre menace : « la fracturation a déjà causé des séismes de faible magnitude, notamment en Suisse, en France et en Angleterre. Je pense cependant que ces risques sont contrôlables car ils dépendent fortement de la mise en © DocPix œuvre de la technique, par exemple de la vitesse de pompage de l’eau », commente Bruno Goffé. Autrement dit, selon lui, ces risques inhérents à la fracturation ne seraient pas insurmontables. ce que peut la recherche Pour le géologue, plusieurs voies pourraient être explorées. « Tout d’abord, on peut remplacer les produits chimiques utilisés pour la fracturation hydraulique par des produits compatibles avec l’environnement, comme par exemple des gélifiants agroalimentaires. En s’inspirant des zéolithes, minéraux microporeux, on peut aussi imaginer de nouveaux mélanges qui, une fois injectés, se cristallisent en un matériau poreux laissant passer le gaz, mais bloquant les substances polluantes. » D’autres techniques sont potentiellement utilisables selon lui, mais n’ont encore jamais été testées. Parmi elles : la méthode thermique, qui consiste à chauffer la roche pour en faire remonter l’eau, et avec elle les fameux gaz. « Quoi qu’il en soit, il est indispensable d’améliorer dès maintenant la connaissance du sous-sol, en mobilisant la recherche fondamentale. C’est le devoir de la recherche publique. Cela permettrait d’identifier et d’anticiper les problèmes, d’adapter les réglementations et d’assurer la surveillance et l’observation sur le long terme », poursuit Bruno Goffé. Cela permettrait aussi de faire progresser la connaissance et l’estimation des ressources, renouvelables et non renouvelables, du sous-sol français. Contact : Centre européen de recherche et d’enseignement des géosciences de l’environnement (Cerege), Aix-en-Provence Bruno Goffé > goffe@cerege.fr



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