w PAR FABRICE DEMARTHON Cinquante ans que les physiciens du monde entier le traquent ! Le boson de Higgs, théorisé en 1964 pour expliquer la masse des particules, pourrait bien avoir été repéré au Cern, à Genève. « C’est une avancée majeure qui vient d’être faite au LHC [le grand collisionneur de hadrons,ndlr], s’enthousiasme Laurent Serin, directeur adjoint scientifique à l’Institut national de physique nucléaire et de physique des particules. Une nouvelle particule, un boson, a bel et bien été découverte, et certaines de ses caractéristiques sont compatibles avec celles que la théorie attribue au boson de Higgs. » S’ils restent prudents, car leurs analyses sont préliminaires, les scientifiques ne cachent pas leur excitation. « Trouver une nouvelle particule est déjà un événement exceptionnel, très rare dans une vie, confie Sandrine Laplace, chercheuse au Laboratoire physique nucléaire et hautes énergies 1, à Paris, qui a participé à cette découverte. Alors s’il s’agit bien du boson de Higgs… » UNE PARTICULE FONDAMENTALE L’enthousiasme est à la hauteur de l’enjeu : le boson de Higgs est la dernière particule du modèle standard qui reste à dénicher. Et son rôle est fondamental. Au xx e siècle, lorsque les bases de la théorie de la physique des particules sont jetées, les chercheurs rencontrent plusieurs difficultés. D’une part, cette théorie prévoit que toutes les particules portant les interactions – les bosons – sont de masse nulle. Si c’est bien le cas pour le photon – la particule de la 6 | L’événement CNRS I LE JOURNAL Physique Le 4 juillet dernier, deux équipes de scientifiques ont annoncé avoir observé une nouvelle particule au LHC, le grand collisionneur de hadrons du Cern. Enfin le boson de Higgs ? © 2012 CERN/T. MCCAULEY/L. TAYLOR MODÈLE STANDARD. Théorie décrivant toutes les particules élémentaires et leurs interactions. On distingue le groupe des fermions, qui forment la matière, de celui des bosons, qui portent les interactions. 01 lumière, boson de l’interaction électromagnétique –, la découverte en 1983, au Cern, des bosons W et Z, qui portent l’interaction dite faible, jette le trouble : ceux-là sont massifs. D’autre part, personne ne parvient vraiment à expliquer pourquoi les particules de matière, comme l’électron, possèdent, elles aussi, une masse. Pour contourner l’obstacle, les physiciens Peter Higgs, Robert Brout et François Englert émettent une hypothèse pour le moins étonnante : et si les particules obtenaient leur masse en interagissant avec un champ, produit par un nouveau boson, dans lequel elles baignent en permanence ? Le boson de Higgs est né. À la manière d’un milieu visqueux, son champ ralentit, alourdit les particules qui interagissent plus ou moins avec lui. Certaines sont fortement alourdies, comme le quark de type top, qui pèse 170 milliards d’électronvolts (170 GeV) 2 ; d’autres, |