CNRS Le Journal n°255 avril 2011
CNRS Le Journal n°255 avril 2011
  • Prix facial : gratuit

  • Parution : n°255 de avril 2011

  • Périodicité : trimestriel

  • Editeur : CNRS

  • Format : (215 x 280) mm

  • Nombre de pages : 44

  • Taille du fichier PDF : 6,5 Mo

  • Dans ce numéro : La supraconductivité prend son envol

  • Prix de vente (PDF) : gratuit

Dans ce numéro...
< Pages précédentes
Pages : 24 - 25  |  Aller à la page   OK
Pages suivantes >
24 25
© D. Colson/CNrsPhotothèque © J. bobroff/CNrsPhotothèque w 24 | L’enquête cnrs I LE JOurnal Des matériaux très prometteurs 03 04 200 µm Pour qu’un métal devienne supraconducteur, il faut que sa température frise le zéro absolu, à – 273,15 °C. Or la découverte de matériaux pouvant l’être à des températures plus élevées a secoué le landerneau de la physique. Et si, finalement, la supraconductivité pouvait aussi exister à température ambiante ? Transporter de l’électricité sans aucune déperdition ou créer des champs magnétiques intenses sans le recours à de coûteux et encombrants systèmes de refroidissement en fait rêver plus d’un. Mais, avant 03 Photo au microscope colorisée d’un cuprate. Cet oxyde de cuivre présente la meilleure supraconductivité connue à ce jour. 04 La structure atomique des cuprates rappelle un mille-feuille. 05 Les 600 condensateurs du lncmi permettent de générer de puissantes impulsions magnétiques. 06 Cyril Proust prépare le système de mesure dans lequel sont placés les échantillons de matériau supraconducteur. d’atteindre ce Graal, encore faut-il comprendre cette supraconductivité dite à haute température. Comprenez « à des températures un peu plus élevées que celles observées jusque-là » … des résultats déconcertants Les premiers supraconducteurs à haute température à avoir été découverts, dans les années 1980, sont les cuprates, des composés à base d’oxyde de cuivre. Le record de température de passage à la phase supraconductrice détenu par un cuprate est aujourd’hui de – 135 °C. Dans ce cas, le phénomène est-il identique à celui observé dans les métaux ? Cela fait vingt ans que les physiciens tentent de décrypter cette supraconductivité « non conventionnelle ». Les expériences montrent que, comme dans les métaux, il se forme ces paires d’électrons qui conduisent à la disparition de la résistance électrique du matériau (lire l’encadré p. 22). Seulement voilà, la formation des paires ne peut pas s’expliquer par la théorie de 1956, la fameuse théorie BCS, applicable aux métaux. Un écueil d’autant plus grand que les physiciens ne comprennent pas plus le comportement des électrons dans les cuprates lorsque ces derniers ne sont pas supraconducteurs. La situation est à ce point déconcertante que Philippe Bourges, du Laboratoire Léon-Brillouin 1, à Saclay, résume ainsi les premières tentatives d’explication de la supraconductivité des cuprates : « Toutes les idées simples auxquelles les gens ont pensé rapidement ont tout bonnement échoué. » Ces matériaux s’avèrent de fait par ticulièrement déroutants. Comme l’explique Julien Bobroff, du Laboratoire de physique des solides, à Orsay, « lorsque chaque atome de cuivre d’un cuprate porte un électron, le matériau est totalement isolant à toute température. Or il suffit de retirer un électron d’un atome sur 20, ce 05
 » Imager le corps humain N°255 I avril 2011 L’enquête | 25 w que l’on obtient par une modification chimique appelée dopage, pour que le cuprate devienne supraconducteur. » Et d’ajouter : « Par ailleurs, à l’état isolant, un cuprate est un matériau magnétique. C’est même une de ses caractéristiques principales. Un supraconducteur conventionnel, entendez métallique, est totalement non magnétique. Dans ces conditions, comment comprendre qu’une infime modification des propriétés électroniques d’un cuprate suffise à le faire passer d’un état magnétique à un état supraconducteur ? » PLUSIEURS explications « Les physiciens sont désormais à peu près d’accord sur les faits expérimentaux. Mais aucun consensus n’existe pour interpréter ce que l’on voit », confie Antoine Georges, du Centre de physique théorique 2, à Palaiseau. Le théoricien a néanmoins son idée sur la question : « Si cela ne fait pas l’unanimité, il est assez tentant de penser que la formation des paires d’électrons aurait à voir avec le magnétisme. » D’autres chercheurs font remarquer qu’au sein d’un cuprate, les électrons peuvent exister sous différentes configurations, comme il existe plusieurs manières de ranger des oranges sur un étalage, par exemple. Ces différentes configurations pourraient entrer en compétition les unes avec les autres. Il en résulterait une instabilité, que l’apparition de la supraconductivité permettrait de résorber. Cyril Proust, du Laboratoire national des champs magnétiques intenses (LNCMI) 3, à Toulouse, a apporté un important crédit expérimental à cette idée 06 ©C. Frésillon/CNrsPhotothèque ; P.Dumas © KURITA KAKU/GAMMA À l’hôpital, la supraconductivité se cache au cœur des appareils d’imagerie par résonance magnétique nucléaire (irm) qui analysent les tissus des patients. Grâce à elle, on peut injecter dans ces instruments d’intenses courants électriques qui vont y perdurer sans faiblir et produire des champs magnétiques stables de 1,5 à 3 teslas. Ceux-ci peuvent même atteindre 7 teslas, voire plus, dans des applications de recherche comme l’irmde NeuroSpin, la plateforme du cea consacrée à l’imagerie du cerveau, ou bien celui de l’Institut du cerveau et de la moelle épinière, dont le cnrs est partenaire. Dans un futur proche, certains supraconducteurs pourraient aussi améliorer les performances des antennes qui recueillent le signal émis par les tissus lors d’un examen. Les prototypes du laboratoire Imagerie par résonance magnétique médicale et multimodalités 1 d’Orsay, devraient d’ici peu être commercialisés pour l’imagerie de petits animaux utilisés lors d’études précliniques. 1. Unité CNRS/Université Paris-Sud-XI. Stocker de l’énergie Du fait de son absence de résistance électrique, un supraconducteur permet de conserver indéfiniment un courant. Si des recherches ont donc lieu en matière de stockage d’énergie, les spécialistes tentent en parallèle d’exploiter une autre propriété : avec la supra, il est possible de décharger un courant extrêmement rapidement, et donc de délivrer des impulsions électriques très puissantes. On peut ainsi imaginer des lanceurs électromagnétiques capables d’éjecter un projectile avec une vitesse supérieure à celle obtenue avec un canon à poudre, voire de lancer des microsatellites. Dans le cadre du projet anr Super-Smes, plusieurs équipes, dont le Consortium de recherche pour l’émergence de technologies avancées 1 et le Laboratoire national des champs magnétiques intenses, tentent de développer de tels dispositifs de stockage magnétiques. 1. Unité CNRS. q Maquette de l’irmde 11,7 teslas du centre NeuroSpin, qui doit être opérationnelle en 2012. Contact : Luc Darrasse > luc.darrasse@u-psud.fr q Ce train à sustentation électromagnétique de 28 mètres de long et de 30 tonnes peut atteindre la vitesse de 581 km/h. faire léviter les trains 581 km/h, c’est la vitesse record atteinte en 2003 par un train à sustentation magnétique. L’idée est simple, en théorie : faire léviter le train quelques centimètres au-dessus des rails afin d’annuler les frottements. Pour cela, on utilise l’effet Meissner (lire l’encadré p. 22) engendré par des bobines et des aimants, dont certains sont supraconducteurs, déployés sur le train et les rails. La technologie est toutefois très coûteuse et contraignante. Contact : Pascal Tixador > pascal.tixador@grenoble.cnrs.fr q Système de stockage de l’énergie à l’aide de supraconducteurs à haute température critique (collaboration cnrs/DGA/Nexans). © CEA © P.tixador



Autres parutions de ce magazine  voir tous les numéros


Liens vers cette page
Couverture seule :


Couverture avec texte parution au-dessus :


Couverture avec texte parution en dessous :