CNRS Le Journal n°254 mars 2011
CNRS Le Journal n°254 mars 2011
  • Prix facial : gratuit

  • Parution : n°254 de mars 2011

  • Périodicité : trimestriel

  • Editeur : CNRS

  • Format : (215 x 280) mm

  • Nombre de pages : 44

  • Taille du fichier PDF : 2,9 Mo

  • Dans ce numéro : Faire face au vieillissement

  • Prix de vente (PDF) : gratuit

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© ESA 01 w PAR MATHIEU GROUSSON Le 11 janvier, les premiers résultats du télescope spatial Planck ont été dévoilés lors d’un colloque international à la Cité des sciences et de l’industrie, à Paris. Le bilan est sans appel : les astrophysiciens sont ravis. Ils ont découvert de nouveaux objets, aussi bien dans notre galaxie qu’aux confins du ciel. Avec des répercussions importantes : par exemple, la masse de notre galaxie pourrait être supérieure de 25% à celle estimée jusqu’ici ! L’objec tif de ce satellite d’environ 2 tonnes, positionné à 1,5 million de kilomètres de la Terre, est d’observer 6 | L’événement CNRS I LE JOURNAL Astrophysique En janvier, des experts du monde entier, réunis à Paris, ont dévoilé les premiers résultats de l’exploration du ciel par le satellite Planck. Planck offre une nouvelle vision de l’Univers MICRO-ONDE. Les ondes électromagnétiques du domaine micro-onde ont une longueur d’onde comprise entre quelques dixièmes et une dizaine de millimètres. l’intégralité du ciel dans le domaine micro-onde. Avec pour principale mission de cartogra phier le fond diffus cosmologique, soit la lumière la plus ancienne observable, émise par la totalité du cosmos 380 000 ans après le big bang, daté d’il y a 13,7 milliards d’années. CE N’EST QU’UN DÉBUT Plus précisément, à la suite des satellites Cobe, en 1989, puis WMAP, en 2001, Planck doit produire une image à la précision inégalée des infimes fluctuations de ce rayonnement dit fossile. À la clé, le secret pour comprendre comment, partant d’une soupe presque totalement homogène, l’Univers n’a eu de cesse, LE PROJET EN 5 DATES 1993 Naissance du projet, dénommé à l’origine Samba 2009 Lancement du satellite Planck à Kourou, en Guyane 2011 Présentation des premiers résultats 2012 Fin de la mission du satellite Planck 2013 Publication des résultats et de la cartographie du fonds diffus cosmologique 01 Derrière le satellite Planck, cette image révèle l’organisation en nuages filamentaires des régions les plus froides de notre galaxie (photomontage). depuis sa naissance, de s’organiser et de se hiérarchiser. Au point de présenter aujourd’hui de vastes zones totalement vides, bordées de filaments ultraconcentrés renfermant étoiles et galaxies. Cette carte du rayonnement fossile ne sera livrée qu’en janvier 2013. En effet, le satellite n’a observé que deux fois et demie l’intégralité du ciel et devra effectuer cette opération au moins encore deux fois avant la fin de sa mission, en janvier 2012. De plus, les informations recueillies doivent être expurgées des artefacts dus aux instruments, ainsi que des signaux provenant de sources astrophysiques autres que le rayonnement fossile. Or c’est justement pour cette raison que les scientifiques sont
N°254 I MARS 2011 L’événement | 7 aujourd’hui aux anges. Car, loin de n’être qu’une entreprise ingrate, ce travail de nettoyage a déjà révélé nombre d’informations nouvelles sur notre Univers et donné lieu à plusieurs dizaines de publications. Premier domaine concerné : l’astrophysique de notre galaxie. Planck a mis en évidence une importante proportion de gaz sombre, certainement de l’hydrogène moléculaire, qui avait échappé jusqu’alors à l’observation, ce qui devrait entraîner une réévaluation de 25% de la masse de notre galaxie. De plus, le satellite a confirmé l’existence de poussières nanométriques tournant probablement plusieurs dizaines de milliards de fois par seconde sur elles-mêmes. Enfin, dans les régions les plus froides, les astrophy siciens ont détecté ce qu’ils appellent des cœurs denses, c’està-dire des nuages de poussières en cours de contraction, alignés le long de grands filaments de matière, qui sont autant de futures pouponnières d’étoiles. UN CATALOGUE DE 15 000 OBJETS En dehors de notre galaxie, Planck a également fourni de magnifiques images des nuages de Magellan ou de la galaxie Messier 31. « De quoi réévaluer la quantité de poussière et donc la masse de ces objets », indique Jean-Michel Lamarre, du Laboratoire d’étude du rayonnement et de la matière en astrophysique 1, de Paris, un des scientifiques à l’origine du projet Planck. Ainsi que des images d’autres sources plus lointaines, telles que des quasars – des galaxies très lointaines et très énergétiques – ou des amas de galaxies – des structures renfermant plusieurs centaines de galaxies. « En tout, nous avons observé 199 amas, dont 30 nouveaux, qui se sont révélés être des amas en formation », poursuit l’astrophysicien. Désormais, c’est un catalogue de 15 000 objets galactiques et extragalactiques qui est à disposition de l’ensemble de la communauté scientifique. « Dont la plupart n’avaient jamais été étudiés dans le domaine de longueurs d’onde exploré par Planck, complète François Bouchet, de l’Institut d’astrophysique de Paris 2, coordinateur scientifique du consortium Planck HFI 3. C’est donc réellement le début d’une nouvelle ère pour l’astrophysique de ce type d’objets. » Et ce n’est pas tout. Car, encore plus loin dans le ciel, les spécialistes sont parvenus à extraire une image de ce qu’ils appellent le fond diffus infrarouge. « Il s’agit de galaxies apparues entre 2 et 4 milliards d’années après le big bang, que l’on ne distingue pas individuellement », explique Guilaine Lagache, de l’Institut d’astrophysique spatiale, à Orsay 4. Des objets au sein EN LIGNE. 02 Planck a livré un catalogue de 15 000 sources dites compactes (les points rouges représentés sur cette carte du ciel). Celui-ci contient une large variété d’objets, tels des cœurs froids dans nos galaxies ou des amas et superamas de galaxies lointaines. 03 Poussières dans notre galaxie imagées par le détecteur hautes fréquences (HFI) de Planck, qui couvre un spectre de longueurs d’onde jamais observé. > http:Ilpublic.planck.fr/> « Big bang. Des origines de l’Univers aux origines de la vie », un dossier de la collection Sagascience du CNRS : www.cnrs.fr/bigbang 02 03 desquels le taux de formation d’étoiles est 500 fois plus grand que dans notre galaxie, et qui témoignent de l’époque au cours de laquelle les grandes structures – amas, superamas, filaments galactiques – qui composent aujourd’hui l’Univers ont commencé à se former. UNE PRÉCISION SANS ÉGAL Et François Bouchet de savourer : « Nous avons traité les données dans un temps très court. Cette première moisson de résultats est la preuve que notre préparation durant toutes ces années était bonne ! » De fait, comme l’indique Jean-Michel Lamarre, « depuis son lancement, le télescope fonctionne comme une horloge suisse, ce qui ne cesse de nous remplir d’admiration pour le travail des uns et des autres ». Il faut bien le dire, l’instrument est une petite merveille de technologie spatiale. Composé d’un détecteur hautes fréquences (HFI) et d’un détecteur basses fréquences, sa sensibilité est respectivement 1000 et 30 fois supérieure à celle de Cobe et de WMAP. Pour développer les technologies à l’origine de ces performances, quinze années de labeur auront été nécessai - res, ainsi que l’implication de quelque © ESA ET HFI CONSORTIUM 500 chercheurs d’une cinquantaine de laboratoires à travers le monde, dont neuf du CNRS 5. En définitive, la précision du télescope n’est contrainte que par les limites physiques quantiques fondamentales, et non celles de ses instruments. Et le meilleur reste incontestablement à venir. En janvier 2012, Planck aura certes épuisé ses réserves d’hélium et terminé l’essentiel de sa mission. Mais les spécialistes du cosmos n’en seront encore qu’au début de leurs analyses. « Lancé en 1983, le satellite Iras a réalisé la première carte du ciel dans l’infrarouge. Or celle-ci est encore utilisée aujourd’hui et a alimenté des dizaines de milliers de publications », raconte Jean-Michel Lamarre. Je ne peux donc que souhaiter à Planck un destin similaire. » Quoi qu’il en soit, une chose est sûre : c’est une nouvelle fenêtre qui vient de s’ouvrir sur l’Univers. 1. Unité CNRS/Observatoire de Paris/Université de Cergy-Pontoise/UPMC/ENS Paris. 2. Unité CNRS/UPMC. 3. Jean-Loup Puget, de l’Institut d’astrophysique spatiale, est le responsable scientifique de ce consortium. 4. Unité CNRS/Université Paris-Sud-XI. 5. Institut d’astrophysique spatiale (IAS), Institut d’astrophysique de Paris (IAP), Laboratoire de l’accélérateur linéaire (LAL), Astroparticule et cosmologie (APC), Laboratoire de physique subatomique et de cosmologie (LPSC), Groupe ultra-basses températures (MCBT-Institut Néel), Centre d’étude spatiale des rayonnements (CESR), Service d’astrophysique (SAP), Laboratoire d’étude du rayonnement et de la matière en astrophysique (Lerma). CONTACTS : Institut d’astrophysique de Paris François Bouchet > bouchet@iap.fr Institut d’astrophysique spatiale, Orsay Guilaine Lagache > guilaine.lagache@ias.u-psud.fr Laboratoire d’étude du rayonnement et de la matière en astrophysique, Paris Jean-Michel Lamarre > jean-michel.lamarre@obspm.fr © ESA/PLANCK COLLABORATION



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