© KAKSONEN/CNRS PHOTOTHÈQUE Physique PAR SEBASTIÁN ESCALÓN CNRS I LE JOURNAL w 10 | Rubrique Actualités Invention d’un super-isolant w Prenons le bois ou le verre : ce sont de bons isolants thermiques et de bons isolants électriques. A contrario, les métaux conduisent aussi bien la chaleur que le courant. Les physiciens le savent : ces deux propriétés vont toujours de pair. Or, pour de nombreuses applications en microélectronique ou dans les énergies renouvelables, on aurait bien besoin de les découpler, pour disposer par exemple de matériaux qui soient de bons isolants thermiques et qui conduisent bien le courant. C’est un pas décisif dans cette direction que vient de franchir une équipe franco-allemande 1, à laquelle ont participé des chercheurs du CNRS 2. Les scientifiques ont développé un super-isolant thermique capable de conduire le courant. Leur secret tient en un mot : nano-structuration, un procédé qui vise à manipuler la matière à l’échelle du nanomètre (le milliardième de mètre) pour en modifier ses propriétés. PLUS D’INFOS : www2.cnrs.fr/presse/communique/1928.htm REPÈRE. La nanostructuration permet de modeler les propriétés des matériaux indépendamment les unes des autres, les propriétés électriques et thermiques par exemple. Le matériau mis au point est constitué d’une matrice en silicium enrichie d’un réseau de nano-îlots de germanium. « Ces îlots agissent comme des centres diffuseurs de chaleur, l’empêchant de traverser le matériau librement puis de s’échapper, et multiplient ainsi par cent le pouvoir isolant thermique du silicium conventionnel sans affecter sa conductivité électrique », détaille Stefan Dilhaire, chercheur au Centre de physique moléculaire optique et hertzienne de Talence 3. De plus, en jouant sur le nombre de couches de nano-îlots et sur leur espacement, les chercheurs ont pu moduler à volonté ce pouvoir isolant. « Nous avons prouvé que l’on peut décorréler les propriétés thermiques et électriques d’un matériau, se félicite Stefan Dilhaire. À présent, on peut véritablement sculpter ses propriétés selon nos besoins. » Les applications de ce matériau sont multiples. Il pourrait servir dans le domaine de la thermoélectricité, c’est-à-dire la production d’électricité directement à partir de chaleur. Il serait ainsi possible DES FOSSILES VIEUX DE 2,1 MILLIARDS D’ANNÉES wC’est une découverte pour le moins exceptionnelle qui faisait la une de la revue Nature le 1 er juillet dernier : celle, annoncée par une équipe internationale coordonnée par Abderrazak El Albani du laboratoire Hydrogéologie, argiles, sols et altérations 1, de 250 fossiles retrouvés dans une carrière au Gabon dans un excellent état. Et qui seraient la preuve de l’existence d’organismes pluricellulaires il y a 2,1 milliards d’années… alors que l’on pensait que les premiers étaient apparus il y a seulement 600 millions d’années ! De formes et de dimensions diverses – les plus grands atteignent 12 centimètres –, ces nouveaux fossiles laissent donc penser que l’apparition d’une vie organisée et complexe serait beaucoup plus ancienne que l’on croyait jusqu’ici. 1. Unité CNRS/Université de Poitiers. CONTACT : Hydrogéologie, argiles, sols et altérations, Poitiers Abderrazak El Albani > abder.albani@univ-poitiers.fr de générer un courant à partir de la chaleur du pot d’échappement d’une voiture et de réduire sa consommation de combustible. Cette découverte pourrait aussi rendre compétitive la réfrigération thermoélectrique qui permet de refroidir un compartiment sans passer par la compression et la détente de gaz, comme le font nos réfrigérateurs actuels. Les performances de ces dispositifs liés aux énergies propres stagnaient depuis cinquante ans faute de matériaux comme celui qui vient d’être élaboré. La donne vient peut-être de changer. 1. Centre de physique moléculaire optique et hertzienne (Talence), Laboratoire d’innovation pour les technologies des énergies nouvelles et les nanomatériaux/CEA (Grenoble), Institute for Integrative Nanosciences (Dresde), Fraunhofer IPM (Fribourg), Max-Planck-Institut für Festkörperforschung (Stuttgart). 2. Travaux publiés dans Nature Materials le 2 mai 2010. 3. Unité CNRS/Université Bordeaux-I. CONTACT : Centre de physique moléculaire optique et hertzienne, Talence Stefan Dilhaire >s.dilhaire@cpmoh.u-bordeaux1.fr |