CNRS Le Journal n°245 juin 2010
CNRS Le Journal n°245 juin 2010
  • Prix facial : gratuit

  • Parution : n°245 de juin 2010

  • Périodicité : trimestriel

  • Editeur : CNRS

  • Format : (215 x 280) mm

  • Nombre de pages : 44

  • Taille du fichier PDF : 2,7 Mo

  • Dans ce numéro : Rien n'arrête les mathématiques

  • Prix de vente (PDF) : gratuit

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10 VIEDESLABOS Actualités PLANÉTOLOGIE Les anneaux de Saturne se dévoilent Après avoir étudié des milliers de clichés pris par la sonde Cassini, des scientifiques viennent de livrer une analyse inédite des anneaux de Saturne. À la clé, de nombreuses révélations sur leurs propriétés ainsi que la découverte de nouvelles lunes. Ceci n’est pas un disque vinyle… Cette galette colorée de gris, d’ivoire, de bleu, de rouge et de noir, ce sont les célèbres anneaux de Saturne, vus depuis l’objectif de la sonde spatiale Cassini, toujours en orbite autour de la planète géante. Depuis six ans, l’appareil accumule les images. Et si, à ce jour, seule une infime partie des 100 000 clichés a été analysée, il est possible de dresser un portrait détaillé des anneaux, ce que vient de faire, dans la revue Science 1, une équipe internationale incluant un chercheur du laboratoire Astrophysique, instrumentation et modélisation 2, Sébastien Charnoz. Découverts en 1610 par Galilée, puis décrits par Huygens quarante-cinq ans plus tard, les anneaux intriguent les spécialistes qui s’interrogent sur leur origine, leur évolution, leur masse – bien plus importante que celle des anneaux de Jupiter, d’Uranus et de Neptune – et sur l’étonnante pureté des blocs de glace – d’une taille allant du millimètre à la dizaine de mètres – qui les composent. Grâce aux observations des télescopes au sol et des sondes Voyager 1 et 2, on sait que ces anneaux sont divisés en plusieurs zones (A, B, © Nasa/JPL/Space Science Institute Au centre de cette photo, on distingue des perturbations dans les anneaux : celles-ci sont dues à la présence de la lune Daphnis. Le journal du CNRS n°245 juin 2010 C…), qu’ils ont des bords abrupts et qu’ils sont extrêmement fins au regard de leur diamètre de 280 000 kilomètres : 10 mètres d’épaisseur, à peine ! « Cette finesse signifie qu’ils sont à un stade avancé de leur évolution, explique Sébastien Charnoz. En effet, dans l’espace, l’aplatissement d’un nuage de particules débute lorsque l’essentiel de son énergie a été dissipé au cours des multitudes de collisions qui se produisent entre ses constituants. » Ce qui n’empêche pas les anneaux d’être toujours extrêmement dynamiques, comme l’a montré la sonde Cassini. Ainsi, un petit annelé situé en bordure externe, appelé anneau F, change d’aspect en quelques heures à peine. Les données ont révélé qu’il est riche en poussière et qu’en son cœur orbitent une myriade de petites lunes kilométriques, apparemment éphémères : en équilibre instable, la matière subirait tour à tour des phénomènes d’accrétion et de destruction dus aux puissants effets de marées provoqués par Saturne. Concernant ces effets de marée, les satellites naturels de la planète ne sont pas en reste. Ils entraînent dans les anneaux l’apparition d’ondes qui leur confèrent leurs structures en microsillons. Cassini en a photographiées de tous types : ondes de densité qui compriment les morceaux de glace à mesure qu’elles avancent, ondes de courbures verticales qui donnent aux anneaux un aspect de tôle ondulée, ou encore petites ondes de Jeans qui leur confèrent une texture granuleuse et cotonneuse. L’étude de la forme de ces ondes a permis non seulement de déduire certaines propriétés des anneaux, comme leur densité – de l’ordre de 400 kg/m 2 pour l’anneau A – ou leur viscosité, mais également de découvrir en leur sein de nouvelles lunes telles que Daphnis, un objet de 8 kilomètres de diamètre environ. L’observation attentive de ces astres s’est avérée, elle aussi, riche en enseignements. En effet, des lunes comme Daphnis sont capables de creuser un sillon dans les anneaux. Si les plus grosses d’entre elles (plus de 5 kilomètres de diamètre) créent un chenal libre de débris sur tout le long de leur orbite autour de Saturne, celles de taille moyenne (de 500 mètres à 1 kilomètre) se contentent d’y laisser une petite trace en forme d’hélice. « Ce qui est sans doute l’une des grandes découvertes de Cassini, estime Sébastien Charnoz. Ces ouvertures en forme d’hélice ou ces sillons vides sur la trajectoire des lunes sont la réplique quasi exacte, à petite échelle, de processus qui furent à l’œuvre dans le disque protoplanétaire au moment de la formation des planètes du système solaire et de leurs migrations, voici 4,56 milliards d’années. » Malgré ses succès, un mystère échappe encore à Cassini : celui de l’origine des anneaux. Leur apparence suggère un âge d’environ 100 millions d’années. Le hic, c’est qu’à cette époque le bombardement météoritique à l’origine des autres anneaux du système solaire avait cessé depuis longtemps. Alors d’où vient la glace des anneaux de Saturne ? Comment se sont-ils formés ? Cassini a encore un peu de temps pour répondre à ces questions : la mission devrait se prolonger jusqu’en 2017. Vahé Ter Minassian 1. Science, 19 mars 2010. 2. Unité CNRS/Université Paris-VII/CEA. CONTACT ➔ Sébastien Charnoz Unité Astrophysique, instrumentation et modélisation, Gif-sur-Yvette sebastien.charnoz@cea.fr
PALÉOÉCOLOGIE L’unique steppe française avoue enfin son âge Une mer de plantes herbacées qui s’étend à perte de vue et où des moutons paissent en toute tranquillité : voilà à quoi ressemble la plaine de la Crau, située en Provence, considérée comme l’unique steppe d’Europe occidentale. Pour la première fois, une étude réalisée par des chercheurs de l’Institut méditerranéen d’écologie et de paléoécologie (Imep) 1 apporte des éléments qui démontrent que celle-ci n’est pas de formation récente : elle serait vieille d’au moins 6 000 ans. D’une superficie d’environ 10 000 hectares, la steppe de la Crau constitue un patrimoine naturel sans équivalent. On y trouve jusqu’à 70 espèces de plantes à fleurs par mètre carré et elle abrite un grand nombre d’espèces endémiques. Elle représente aussi un patrimoine culturel hors du commun car, depuis le Néolithique, les bergers transhumants viennent y faire paître leurs troupeaux. La controverse sur la formation de la steppe dure depuis les temps d’Aristote, qui en voyait l’origine dans un tremblement de terre. Avant les travaux de nos chercheurs, deux hypothèses s’opposaient : « D’un côté, celle qui soutenait que la steppe existait depuis la fin de la période glaciaire, survenue il y a environ 10000 ans et, de l’autre, celle qui BRÈVES Un piège olfactif affirmait qu’elle était le résultat du défrichement d’une grande forêt existant à l’époque néolithique », explique Thierry Dutoit, chercheur à l’Imep. D’après cette seconde hypothèse, la steppe n’aurait que deux ou trois millénaires. Pour connaître l’âge de la steppe, il fallait donc trouver des vestiges d’anciennes formations végétales. Pas facile sur une plaine au sol extrêmement mince, constamment battue par le mistral et piétinée par les troupeaux. Mais les chercheurs ont eu une idée brillante : chercher sous les fondations des bergeries de l’époque romaine. « En déplaçant ces fondations, nous avons récolté des charbons de bois qui permettent Vivant dans des milieux pauvres en nutriments en Asie du Sud-Est, la plante carnivore Nepenthes rafflesia a développé un stratagème ingénieux pour se nourrir et se développer : elle mime des odeurs de fleurs pour attirer et piéger les insectes dans ses feuilles en forme d’urne. Cette découverte, née des travaux menés par des chercheurs du laboratoire Botanique et bioinformatique de l’architecture des plantes 1 et de l’université du Brunei sur l’île de Bornéo, qui viennent de paraître dans Journal of Ecology, pourrait inspirer les programmes de lutte contre les insectes ravageurs de cultures ou les vecteurs de maladies tels que les moustiques. 1. Unité CNRS/Inra/Cirad/Université Montpellier-II/IRD. > www2.cnrs.fr/presse/communique/1865.htm © B. Talon/IMEP/CNRS Photothèque Pour connaître l’âge de la steppe, les chercheurs ont récolté des vestiges sous les fondations d’une bergerie romaine (à droite) tels que des charbons de bois (ci-dessous, vue en coupe). d’identifier les différentes espèces végétales et de les dater », indique Thierry Dutoit. Environ 500 morceaux de charbon ont été récoltés. Résultat de cette étude publiée dans la revue The Holocene du mois de février dernier : onze taxons (familles ou genres) d’espèces végétales ont été identifiés, la plupart appartenant à des plantes herbacées comme le thym ou la lavande, ou encore à des espèces de garrigue. Par contre, depuis la fin du Néolithique, aucune trace avérée de chênes verts, espèce caractéristique des forêts méditerranéennes. « Cette étude prouve qu’il s’agit bien d’un écosystème très âgé. Nous sommes devant au moins 6 000 ans d’interactions VIEDESLABOS 11 entre le climat méditerranéen, les sols, la végétation et la pratique millénaire du pâturage ovin, commente le chercheur. Cela explique le nombre d’espèces sur la steppe et leurs multiples adaptations à des conditions extrêmement contraignantes. » Sebastián Escalón 1. Institut CNRS/Universités Aix-Marseille-I et -III/Université d’Avignon/IRD. Brigitte Talon et Frédéric Henry ont également participé à cette étude. CONTACT ➔ Thierry Dutoit Institut méditerranéen d’écologie et de paléoécologie, Avignon thierry.dutoit@univ-avignon.fr Les maladies neurodégénératives ont un point commun Les protéines impliquées dans les maladies neurodégénératives comme Parkinson, Alzheimer ou encore le syndrome de Huntington ont une structure commune : telle est la découverte du biochimiste Andrey Kajava, du Centre de recherche de biochimie macromoléculaire 1, et de deux chercheurs américains du National Institute of Health. Ces pathologies sont caractérisées par la présence de dépôts insolubles de protéines dans les tissus, souvent dus à un changement de conformation d’une protéine inoffensive au départ, et qui entraînent progressivement des lésions irréversibles sur le cerveau. La découverte de ce point commun pourrait notamment permettre d’améliorer le diagnostic du risque de développer une de ces maladies. 1. Unité CNRS/Universités Montpellier-I et -II. > www2.cnrs.fr/presse/communique/1869.htm Le journal du CNRS n°245 juin 2010 © M. Reuche/IUT Avignon/CNRS Photothèque



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