CNRS Le Journal n°244 mai 2010
CNRS Le Journal n°244 mai 2010
  • Prix facial : gratuit

  • Parution : n°244 de mai 2010

  • Périodicité : trimestriel

  • Editeur : CNRS

  • Format : (215 x 280) mm

  • Nombre de pages : 44

  • Taille du fichier PDF : 5,9 Mo

  • Dans ce numéro : Afrique le nouvel élan

  • Prix de vente (PDF) : gratuit

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20 © Ch. Boisseaux/LA VIE-REA > L’ENQUÊTE Qu’en est-il de sa démographie ? En 2009, l’ensemble du continent africain a franchi le cap symbolique du milliard d’habitants. Resté longtemps sous-peuplé parce que saigné par la traite négrière et les épidémies de tout poil, le continent, qui hébergeait un être humain sur dix au milieu du XX e siècle, en abrite désormais un sur sept et cumule les records démographiques, dont celui de la plus forte fécondité (4,6 enfants par femme contre 2,5 de moyenne mondiale) et de la jeunesse (43% des Africains ont moins de 15 ans). Si la population africaine croît de 2 à 3% par an depuis vingt ans, « elle dispose encore de beaucoup d’espace, notamment en Afrique équatoriale, où la densité de population est extraordinairement basse, fait observer Hervé Le Bras, du Laboratoire de démographie historique (LDH-CRH) 3. Et comme les rendements à l’hectare des cultures sont faibles, leur amélioration pourrait permettre de nourrir les bouches supplémentaires. Il n’y a donc pas de raison de brandir le spectre d’une croissance démographique effrénée synonyme de tous les dangers (famines, émigration, terrorisme, conflits armés…) ». TRANSITIONS DÉMOGRAPHIQUES Qui plus est, plusieurs pays subsahariens, comme le Kenya, enregistrent une baisse d’environ 30% de leur fécondité par rapport aux années 1990. Et le Maghreb est en pleine transition démographique car la fécondité y est en baisse (2 enfants par femme en Tunisie, 2,3 en Algérie, 2,4 au Maroc…). En outre, l’âge des femmes à la naissance de leur premier enfant y a considérablement augmenté (plus de 29 ans, contre 19 ans au moment des indépendances). Cependant, à l’échelle du continent, les femmes africaines déclarent encore avoir plus d’enfants qu’elles n’en souhaitent. Il faut dire que la contraception y est 2,4 fois moins pratiquée qu’en Europe ou en Asie. C’est qu’ « il ne suffit pas de distribuer des préservatifs, comme on l’a Le journal du CNRS n°244 mai 2010 longtemps pensé, pour que la fécondité baisse, dit Hervé Le Bras. Le cocktail développement économique/scolarisation des jeunes filles/droit des femmes à l’égalité s’avère beaucoup plus efficace ». Bien que, pour l’heure, seulement 30% de la jeunesse fréquentent un établissement d’enseignement secondaire. HYPERPRÉSENCE DU RELIGIEUX Actrice de la mondialisation dans le domaine culturel et artistique, soucieuse d’endiguer la fuite de ses cerveaux à l’étranger et de consolider sa recherche scientifique, capable de peser dans les relations internationales à travers les partenariats qu’elle tisse avec des pays comme la Chine ou l’Inde ou lors de grandes conférences internationales comme celles sur le climat, l’Afrique actuelle est aussi un continent marqué par l’hyperprésence du religieux sur son sol. Le pourcentage de catholiques et de protestants y est l’un des plus forts dans le monde, à tel point que le centre de gravité du christianisme se déplace de son cœur historique européen vers le Sud. « Tous les Africains se revendiquent d’une religion, qu’il s’agisse du christianisme, de l’islam ou des religions animistes africaines, dit André Mary, du Centre d’études interdisciplinaires des faits religieux (CEIFR). Et ceci vaut pour les chefs d’État. Le mouridisme 4 du président sénégalais Abdoulaye Wade ou le pentecôtisme du président nigérian Olusegun Obasandjo sont une affaire publique. Le président du Gabon Ali Bongo est imam et prêche à la télévision lors des grandes fêtes de l’islam. » Une effervescence religieuse qui se traduit dans toutes les capitales africaines par un foisonnement de crèches, d’écoles confessionnelles et de centres de guérison qui font la prospérité de la mouvance évangélique (ou La religion tient une place importante en Afrique. Ici, une messe pentecôtiste à Kagioini, au Kenya. pentecôtiste), un néoprotestantisme dont le succès populaire menace les églises « missionnaires » et augure d’une « pentecôtisation » du champ religieux et politique. Ainsi va l’Afrique, continent singulièrement complexe. Philippe Testard-Vaillant 1. Unité CNRS/Univ. Paris-I/EPHE/Univ. de Provence. 2. Unité CNRS/IEP Bordeaux. 3. Unité CNRS/EHESS. 4. D’inspiration soufie, la confrérie des Mourides a été fondée par le cheikh Ahmadou Bamba au tournant du XIX e siècle. Cap-Vert 12% Gambie 1% Sahara Occidental Sénégal 8% Mauritanie 4% Guinée 9% Guinée Bissau 3% Sierra Leone 2% Liberia 17% 24% Maroc 12% Côte d’Ivoire 8% Mali 5,4% Burkina Faso 3% Ghana 6% < 5 000 étudiants Togo 5% Entre 5 000 et 10 000 Entre 10 000 et 50 000 Entre 50 000 et 100 000 Entre 100 000 et 500 000 > 500 000 Non renseigné Taux de scolarisation dans l’enseignement supérieur Algérie 24% L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR EN AFRIQUE © Infographie : C. Hein pour le journal du CNRS CONTACTS ➔ Pierre Boilley pierre.boilley@univ-paris1.fr ➔ Hervé Le Bras herve.le-bras@ehess.fr ➔ André Mary andre-mary@wanadoo.fr ➔ René Otayekr.otayek@sciencespobordeaux.fr (Source : Unesco, données les plus récentes disponibles entre 2000 et 2009) Tunisie 32% Niger 1% Nigeria 10% Bénin 6% Guinée Équatoriale Sao Toméet-Principe 4% Cameroun 8% Gabon
Jamahiriya arabe ibyenne 56% Congo 4% Tchad 2% République centrafricaine 2,3% Angola 3% Namibie 9% La recherche en plein essor République démocratique du Congo 5% Zambie 2% Afrique du Sud Égypte 31% Soudan Zimbabwe 4% Botswana 5% de Tanzanie 1,5% Lesotho 4% Mozambique 1% Swaziland 4% Érythrée 2% Éthiopie 3,6% Kenya 4% Djibouti 2,6% Somalie Ouganda 3,7% Rwanda 4% Burundi 2,5% Malawi Maurice 16% Comores 3% Madagascar 3,4% 1000 km La recherche scientifique africaine part de bien bas mais elle connaît actuellement une incroyable effervescence. De plus en plus de chercheurs africains font désormais jeu égal avec leurs homologues européens ou américains. » Comme de nombreux autres observateurs, Vincent Rivasseau, chercheur au Laboratoire de physique théorique 1 et président de l’Association pour la promotion scientifique de l’Afrique 2, se veut optimiste sur l’avenir de la science sur ce continent. Si la situation actuelle est peu enviable, de profondes transformations sont en cours dans la recherche et dans l’enseignement supérieur qui pourraient bientôt changer la donne. Le constat, d’abord. C’est un véritable fossé qui sépare l’Afrique des pays développés en matière de science et de technologie. Les pays africains sont ceux sur la planète qui consacrent le moins d’argent pour financer la recherche et le développement : 0,5% du produit intérieur brut (PIB) contre 2% environ en Europe ou aux États-Unis. Pratiquement aucun brevet africain ne voit le jour. Quant aux publications scientifiques, la part de l’Afrique est anecdotique, 1% environ. Pour les gouvernements africains, la science n’a clairement pas été, jusqu’à récemment en tout cas, une priorité. Mais les pays EFFECTIFS DE CHERCHEURS Pays Bénin 1000 119 Burkina Faso 187 13 Égypte 95947 1198 Éthiopie 2377 30 Madagascar 1852 100 Ouganda 891 29 République centrafricaine 41 10 Sénégal 8709 732 Togo 834 132 (Source : Unesco, données 2007) DÉPENSES EN RECHERCHE ET DÉVELOPPEMENT Pays Nombre total Total (en dollars) Nombre par million d’habitants Part du PIB en% Afrique du Sud 4120396 0,95 Burkina Faso 18391 0,11 Égypte 927917 0,23 Éthiopie 106791 0,17 Madagascar 25862 0,14 Maroc 761726 0,64 Ouganda 119654 0,41 (Source : Unesco, données les plus récentes disponibles entre 2000 et 2009) > PARTENARIATS FRUCTUEUX AVEC LE CNRS Le CNRS a su tisser des liens forts avec les organismes de recherche africains. Pour des raisons historiques et aussi L’ENQUÊTE 21 L’archéologie constitue une forte thématique de recherche commune entre le CNRS et l’Égypte. parce qu’ils comptent parmi les acteurs majeurs de la science en Afrique, les pays du Maghreb (Maroc, Tunisie et Algérie) sont ses partenaires principaux. Un seul chiffre : le CNRS compte avec ces trois pays plus de 500 publications conjointes, soit autant qu’avec la Chine. Et pas seulement sur des thématiques traditionnelles pour ces pays comme l’énergie, l’environnement et les ressources naturelles. Le CNRS mène ainsi des recherches en collaboration avec le Maghreb (notamment via plusieurs laboratoires associés) en mathématiques, en physique, en chimie, en biotechnologie ou encore en électronique. Autres partenaires de choix : l’Égypte, où le CNRS compte deux centres d’archéologie avec des chercheurs présents en permanence, et surtout l’Afrique du Sud, autre poids lourd de la science africaine. Parmi les thèmes communs abordés entre les scientifiques français et sud-africains : l’astronomie, la paléontologie, l’étude de la biodiversité et la recherche sur le génome humain. Peu présent jusqu’à aujourd’hui en Afrique noire, le CNRS commence peu à peu à s’y implanter. Étape majeure dans cette nouvelle collaboration : la création en 2009 de l’Unité mixte internationale « Environnement, santé, sociétés », avec le Mali, le Burkina Faso et le Sénégal, la toute première en Afrique. L’enjeu est de taille : il s’agira de mieux comprendre les problèmes actuels (réchauffement climatique, crises alimentaires, épidémies) pour proposer à terme des politiques de développement durable plus performantes. JB Contact : Régis Menu, regis.menu@cnrs-dir.fr Le journal du CNRS n°244 mai 2010 ©C. Delhaye/CNRS Photothèque



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