CNRS Le Journal n°243 avril 2010
CNRS Le Journal n°243 avril 2010
  • Prix facial : gratuit

  • Parution : n°243 de avril 2010

  • Périodicité : trimestriel

  • Editeur : CNRS

  • Format : (215 x 280) mm

  • Nombre de pages : 44

  • Taille du fichier PDF : 5,2 Mo

  • Dans ce numéro : La révolution laser

  • Prix de vente (PDF) : gratuit

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20 L’ENQUÊTE > L’invention va rapidement montrer son intérêt en physique avec l’apparition, en 1966, des Copie du laser lasers à colorant (baptisés ainsi car le milieu amplificateur est constitué de colorants chimiques en solution). L’immense avantage de ces lasers : en variant les concentrations des colorants, on peut ajuster la longueur d’onde de la l’optique où les propriétés optiques des matériaux sont altérées par le faisceau laser qui les lumière émise par le laser. « Les lasers à colorant ont été une révolution pour la spectroscopie qui permet d’étudier les propriétés d’atomes ou de molécules conséquences de la nature quantique de la traverse, et l’optique quantique qui étudie les à travers leur capacité à absorber les ondes électromagnétiques, explique Lucile Julien, du Labora- manière d’interagir avec la matière. Cette disci- lumière (sa décomposition en photons) sur sa toire Kastler-Brossel (LKB) 1. Pour la première fois, pline sera à la base, dans les années 1990, de tours on a pu balayer les raies atomiques [soit cibler les de passe-passe optiques qui enfanteront l’information quantique, discipline dans laquelle les unes après les autres différentes longueurs d’onde absorbées par les atomes observés, NDLR] et faire photons du laser sont porteurs d’information, de la spectroscopie haute résolution. » Ces annéeslà, tout le monde comprend que le laser va vite dinateur quantiques sont les derniers avatars. et dont la cryptographie, la téléportation, et l’or- devenir incontournable dans les labos. « Quand je suis arrivée au LKB en 1972, certains groupes achetaient des lasers sans avoir encore une idée précise de Aujourd’hui, le marché mondial du laser est UN SUCCÈS QUI NE SE DÉMENT PAS ce qu’ils en feraient », se rappelle la scientifique. estimé à environ 6 milliards de dollars. Plus de Les physiciens vont aussi exploiter la puissance la moitié de cette somme provient du stockage de la lumière émise par les lasers. Ainsi vont d’information sur CD ou DVD, mais aussi des naître l’optique non-linéaire, une branche de télécommunications. « Le laser possède des pro- LE FONCTIONNEMENT DU LASER 1. LES COMPOSANTS Un laser est constitué de trois éléments : un milieu actif (solide, liquide ou gazeux) dans lequel la lumière est amplifiée, un mécanisme dit « de pompage » qui confère de l’énergie à ce milieu, et un résonateur optique qui sert à démultiplier l’amplification. Contrairement à la lumière ordinaire, la lumière laser est monochromatique (les photons sont tous de même longueur d’onde) et unidirectionnelle (les photons se déplacent tous dans la même direction). Atome à l’état fondamental Le journal du CNRS n°243 avril 2010 Apport extérieur d’énergie Atome excité émettant un photon Photon © HLR Laboratories, LCC Apport extérieur d’énergie Retour à l’état fondamental Miroir réfléchissant Photon de Theodore Maiman au centre duquel on distingue la barre de rubis qui produit les photons. priétés qui permettent de transmettre une densité d’informations importantes sur de longues distances, explique Sylvain Fève, ingénieur d’études au laboratoire « Fonctions optiques pour les technologies de l’information » (Foton) 2 à Lannion. En particulier, comme c’est un faisceau très directif et très cohérent [tous les photons d’un même faisceau conservent une sorte d’étiquette qui permet de les distinguer des photons d’un autre faisceau, pourtant de même longueur d’onde, NDLR], on peut faire rentrer la lumière de plusieurs lasers dans une même fibre optique sans qu’ils interfèrent. » Lannion avait été le théâtre, en 1966, de la première transmission d’informations dans l’air par laser. De nos jours, les transmissions circulent dans des centaines de millions de fibres optiques qui sillonnent les continents, traversent les océans ou font du cabotage le long des côtes. En fait, tout le cœur des réseaux de télécommunications mondiales est équipé de fibres, tandis que la transmission par fils de cuivre (dont le débit est au moins 10000 fois moins élevé que 2. LE POMPAGE OPTIQUE Lorsqu’un atome est excité, il émet un photon d’une longueur d’onde caractéristique pour revenir à un niveau d’énergie plus bas. Pour obtenir la lumière laser, il faut donc en premier lieu exciter les atomes du milieu actif (appelé aussi milieu amplificateur) en leur fournissant de l’énergie (électrique, chimique ou lumineuse). C’est le pompage optique. « Inventée par Alfred Kastler, cette méthode permet de réaliser une « inversion de population » », explique Claude Cohen-Tannoudji du Laboratoire Kastler-Brossel, prix Nobel de physique en 1997. Le milieu amplificateur possède alors davantage d’atomes d’énergie élevée que d’atomes de basse énergie. Selon que le pompage est continu ou intermittent, le laser émettra une lumière continue ou des impulsions plus ou moins courtes. Photon incident Atome
par fibre) est réservée à la périphérie du réseau. Évalué à deux milliards de dollars, le deuxième marché des lasers est le micro-usinage : les lasers ultrapuissants employés dans l’industrie permettent de souder et de découper de la tôle avec une précision diabolique. Les constructeurs automobiles sont très friands de ces lasers qui concentrent une puissance de 20 à 100 watts sur une zone inférieure au diamètre d’un cheveu. Autres utilisateurs, les fabricants de panneaux solaires qui découpent leurs cellules photovoltaïques dans des plaques de silicium, ou encore les industriels de l’aéronautique qui percent certaines parties des moteurs d’avion afin que l’air vienne refroidir les pales. Le marquage d’objets, telles les lettres sur le clavier d’ordinateur ou l’inscription d’une marque sur un stylo, se fait également avec des lasers. Pour encourager la recherche sur les procédés utilisant les lasers de puissance, un laboratoire vient de prolonger l’unique Groupement d’intérêt scientifique sur le laser. Abordant de nombreux programmes de recherche et baptisée Gepli, cette réunion d’acteurs privés (dont Air Liquide, ArcelorMittal, PSA, Safran et Thales) comme publics Photon émis semblable au photon incident Miroir semiréfléchissant © D. Parker/SPL Les lasers ont trouvé une application de première importance dans l’industrie, notamment pour la découpe et le micro-usinage de pièces. 3. L’AMPLIFICATION PAR ÉMISSION STIMULÉE La production de lumière par un atome excité peut être soit spontanée, le photon part alors dans n’importe quelle direction, soit stimulée. Dans ce cas, c’est un photon dit incident qui « pousse » l’atome à se désexciter en émettant un photon en tout point identique (même longueur d’onde et même direction) au premier. Ce second pourra à son tour désexciter d’autres atomes, qui généreront eux aussi des photons identiques. Petit à petit, les photons s’ajoutent les uns aux autres et forment la lumière laser. Flux laser 4. LA PRODUCTION DU FAISCEAU Le milieu actif du laser est enfermé dans un résonateur optique qui sert à démultiplier l’amplification de la lumière afin de créer le faisceau laser. Le plus souvent, il s’agit d’une cavité aux extrémités de laquelle se trouvent deux miroirs, l’un totalement réfléchissant, l’autre semi-transparent (dans le cas des diodes laser, les miroirs ont disparu et c’est la structure de la diode elle-même qui forme les parois réfléchissantes du résonateur optique). Les photons sont renvoyés dans le milieu actif par les miroirs qui se font face, continuant ainsi à désexciter des atomes et donc à générer de la lumière. Une faible fraction de cette lumière traverse le miroir semitransparent : c’est le faisceau laser. © www.gregcirade.com pour le journal du CNRS L’ENQUÊTE 21 Aujourd’hui, le laser et la fibre optique sont au cœur des télécommunications mondiales. Ils permettent de transmettre rapidement des informations sur toute la surface de la planète. (le laboratoire Procédé et ingénierie en mécanique et matériaux 3) étudie notamment le soudage de tôles couvertes de revêtements anticorrosion, opération pour l’instant problématique et cruciale pour l’industrie automobile. Elle tentera par ailleurs de donner une réalité industrielle au « prototypage laser » : dans ce procédé de fabrication rapide de pièces métalliques, un faisceau laser, piloté par un robot, agglomère par fusion une poudre métallique qui adopte alors la forme des pièces souhaitées. Une technique qui intéresse de nombreux industriels, en particulier pour réaliser des prototypes à la géométrie complexe ou pour réparer des éléments métalliques usés (aubes de turbines de réacteurs d’avion, pièces tournantes de machines, etc.). Autour des mastodontes économiques que sont les télécommunications et le micro-usinage gravitent une galaxie d’applications du laser au poids financier plus modeste. L’invention se retrouve par exemple dans les caisses de supermarché pour lire les codes-barres, les imprimantes de bureau ou encore les capteurs de niveau. Dans l’industrie automobile, on mesure le débit d’injecteurs en interceptant le filet de gouttelettes en sortie avec un faisceau laser. Sur mer ou dans les airs, on calcule l’inclinaison d’un navire ou d’un avion grâce à des gyromètres à lasers. Dans les travaux publics, on noie des fibres optiques dans le béton des ponts pour détecter des déséquilibres mécaniques (les tensions compriment les fibres, ce qui change leur transmission lumineuse). En ophtalmologie, on corrige la vue en taillant la cornée pour rediriger les rayons lumineux vers la rétine, tandis qu’en chirurgie on > Le journal du CNRS n°243 avril 2010 © Ph. Plailly/Eurelios/LookatSciences



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