CNRS Le Journal n°242 mars 2010
CNRS Le Journal n°242 mars 2010
  • Prix facial : gratuit

  • Parution : n°242 de mars 2010

  • Périodicité : trimestriel

  • Editeur : CNRS

  • Format : (215 x 280) mm

  • Nombre de pages : 44

  • Taille du fichier PDF : 2,9 Mo

  • Dans ce numéro : Ce que révèlent nos tabous

  • Prix de vente (PDF) : gratuit

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34 INSITU SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES Des chercheurs sous protection Fin 2009, le Fonctionnaire de sécurité de défense du CNRS a remis à la direction de l’organisme une étude sur les liens entre la défense et les sciences humaines et sociales. Une relation complexe aux enjeux multiples et souvent méconnus. Géopolitique internationale, réseaux maffieux, cybercriminalité, guerre de l’information et mécanismes d’influence de l’opinion, intégrisme religieux, psychologie des individus, des foules, des terroristes… : autant de sujets à forte teneur politicomilitaire qui, s’ils intéressent au premier chef le monde de la défense, alimentent aussi les réflexions et les travaux de chercheurs en sciences humaines et sociales (SHS). D’où le compagnonnage de plus en plus étroit qui unit ces deux domaines, comme l’atteste, par exemple, la collaboration nouée entre la Direction générale de l’armement (DGA) et le CNRS, la première finançant à 100% ou cofinançant bon nombre de thèses sur le thème de la défense et de la sécurité intérieure. En 2009, « sur environ 400 thésards financés par la DGA, une trentaine travaillait sur un sujet relevant spécifiquement des sciences humaines, indique Joseph Illand, Fonctionnaire de sécurité de défense (FSD) du CNRS depuis 2003 et auteur du rapport Sciences humaines et sociales et protection du patrimoine scientifique rédigé fin 2009 à l’attention de la direction du CNRS et de l’Institut des sciences humaines et sociales. Par ailleurs, on retrouve des chercheurs en SHS dans les comités d’orientation d’organismes dépendant du ministère de la Défense ou de l’Intérieur (Institut des hautes études de défense nationale, Centre des hautes études de l’armement, etc.). Qu’ils soient politologues, sociologues, criminologues… ces scientifiques exercent aussi leur expertise auprès d’organisations privées, de grands groupes industriels, de réseaux d’influence…, sans oublier les consultances occasionnelles ou régulières demandées par des gouvernements étrangers, en raison de leur connaissance du terrain ». Le journal du CNRS n°242 mars 2010 © Nabil al-Jurani/AP/SIPA Autre facette du couple SHS-Défense : les menaces auxquelles peuvent être exposés les chercheurs du CNRS comme ceux d’autres organismes de recherche, que ces atteintes soient liées directement à leur sujet d’études, à la vulnérabilité des systèmes d’information qu’ils utilisent ou aux pays dans lesquels ils se rendent en mission. Exemple : l’affaire survenue fin 2009 et impliquant un chercheur en sciences sociales travaillant sur la criminalité, la police, la justice et le pouvoir d’un pays… complexe en la matière. Cet agent « s’est fait voler, dans ce pays, son ordinateur portable qui contenait la totalité des données qu’il avait recueillies depuis plusieurs années, sa boîte mail et de multiples informations à caractère personnel et familial, ainsi que d’autres pièces compromettantes (agenda, carnet d’adresses, notes de terrain…), explique Joseph Illand. Cette perte a mis dramatiquement en péril sa sécurité personnelle et celle de ses contacts, ce qu’aurait pu déjà limiter un chiffrement solide de son portable, par exemple ». Parfois négligents vis-à-vis des contraintes de sécurité, nos chercheurs en SHS ? « Trop souvent même », répond le même expert. Contrairement à leurs collègues des sciences dures, « ils sont en général peu sensibles aux notions de sécurité, même lorsqu’ils travaillent eux-mêmes sur les menaces ! Ils sous-estiment en particulier l’impact de l’utilisation mal maîtrisée de l’outil informatique, les risques de volatilité et de compromission de données sensibles, leur devoir de protection de ces données, sans oublier l’effet Internet qui fait fi du débat privé et où le droit à l’oubli n’existe pas ». Et de citer l’exemple du mail « coup de gueule » expédié en 2007 par un agent du CNRS en poste dans un pays où les intérêts de la France peuvent être sujets à remise en cause. Ce libelle incendiaire pourfendant la « dictature » du régime en question et transmis en La Ziggurat d’Ur, un édifice construit il y a 4000 ans et situé à 300 km de Bagdad (Irak). Les missions dans certains pays exigent d’importantes précautions.
toute naïveté à une soixantaine de destinataires s’est retrouvé en quelques minutes sur la Toile. Un impair qui a failli provoquer la rupture des relations culturelles entre le régime incriminé et la France. Le secteur des SHS, par ailleurs, « consomme » une bonne part des quelque 50000 missions annuelles du CNRS à l’étranger. Évaluer les risques liés aux déplacements dans des pays « sensibles » (risque d’épidémie, risque d’être pris dans un attentat, d’être victime d’une action crapuleuse, d’être mis en cause pour espionnage…), briefer les agents avant leur départ sans intervenir sur le contenu même de leur mission, et réagir en cas d’incident, autant d’activités qui mobilisent l’énergie du FSD du CNRS et de ses cinq collaborateurs. Problème : de rares chercheurs, allergiques aux recommandations qui leur sont faites, invoquent le principe du « Ça n’arrive qu’aux autres ! » pour négliger ces conseils. « Ils oublient qu’une imprudence de leur part peut engager la responsabilité juridique de l’ensemble de leur chaîne hiérarchique, insiste Joseph Illand. Il n’en reste pas moins qu’à force de travailler les laboratoires au corps, on constate une meilleure réceptivité des SHS ». Une piste à suivre pour concilier plus encore SHS, sécurité et vigilance ? « Mieux communiquer, dialoguer et comprendre que l’anticipation des risques est d’abord une affaire de bon sens ». Philippe Testard-Vaillant OBJECTIF SÉCURITÉ Placé sous l’autorité hiérarchique de la gouvernance du CNRS et sous l’autorité fonctionnelle du Haut Fonctionnaire de défense et de sécurité du ministère de la Recherche, le FSD exerce avant tout une fonction de protection du patrimoine scientifique et technique de l’établissement. Outre le contrôle des procédures liées aux échanges internationaux (accueil de stagiaires et recrutements de ressortissants étrangers, coopérations internationales, missions dans des pays à risques…), il exécute au quotidien un travail de veille, de détection et d’évaluation des risques. En outre, il conseille, informe, sensibilise et « prêche » la prise de conscience et l’esprit de vigilance auprès de toute la population des chercheurs et agents du CNRS. P.T.-V. CONTACT ➔ Joseph Illand Fonctionnaire de sécurité de défense du CNRS joseph.illand@cnrs-dir.fr MATHÉMATIQUES Le site qui fait aimer les maths Àquoi servent les mathématiques ? À cette question, le site internet Images des mathématiques, hébergé par le CNRS depuis un an, apporte une réponse. Ou plutôt des réponses, au gré des auteurs et des sujets. Des épidémies à la crise financière en passant par la génétique, la poésie, les sondages, le fonctionnement d’un moteur de recherche ou la mesure de la circonférence de la Terre, le monde est décortiqué avec un regard mathématique, entre abstraction et applications. Le mathématicien, selon le mot d’un chercheur hongrois, est une machine à transformer le café en théorèmes. Ce site internet multiplie les arômes… Et ses dégustations, il les offre au plus grand nombre. Dans la revue papier Images des mathématiques, publiée dans le passé par le CNRS 1, les chercheurs exposaient leurs travaux à des confrères. L’outil internet éponyme, lui, entend bâtir des passerelles avec les non-scientifiques. « L’image des mathématiques est faussée. En général, elles rappellent de vieux souvenirs de souffrance ou d’incompréhension », regrette Étienne Ghys, rédacteur en chef du site et géomètre à l’Unité de mathématiques pures et appliquées 2. Des mauvais souvenirs que le site entend dissiper. Et on dirait bien qu’il y parvient : un article sur les progrès des méthodes de calcul et les tables de multiplication a été lu par plus de 40 000 personnes. Les quelque 1250 visiteurs quotidiens slaloment entre les difficultés, guidés par le classement des articles en vert, bleu, rouge, noir. Ils peuvent laisser un commentaire. Mais aussi contribuer au site en amont, en donnant leur avis, avant publication, sur les BRÈVE articles commandés par le comité de rédaction. Les 152 relecteurs volontaires inscrits ne sont pas tous des pros des maths. Parmi eux, un INSITU philosophe, une artiste, des lycéens… Côté chercheurs, l’écriture, motivée par « le plaisir », correspond aussi, comme le note Étienne Ghys, à l’une de leurs missions : rendre compte de leurs recherches au grand public. Mais le site ne se cantonne pas à cet aspect. On y trouve des « billets » dans lesquels des mathématiciens de divers horizons expriment leurs opinions, par exemple sur le bilan carbone des matheux, évalué à partir de leurs déplacements professionnels en avion… L’une des autres rubriques présente des portraits de mathématiciens, d’ingénieurs, de bibliothécaires… Également mis à l’honneur, des objets, du trou noir au cadran solaire digital, en passant… par le logo du CNRS, caractérisé par les courbes de Bézier. Bref, le site Images des mathématiques est à l’image de la communauté mathématique et de ses travaux : riche et vivant. Mathieu Hautemulle ➔ En ligne : http:Ilimages.maths.cnrs.fr Représentation d’une « chambre hyperbolique » dont la particularité est de donner l’illusion de se trouver sur un plan infini. 1. Les deux derniers numéros, parus en 2004 et 2006, sont téléchargeables sur le site. 2. Unité CNRS/École normale supérieure de Lyon. CONTACT ➔ Étienne Ghys Unité de mathématiques pures et appliquées, Lyon etienne.ghys@umpa.ens-lyon.fr Les chercheurs du CNRS récompensés Treize agents du CNRS sont lauréats de l’appel à projets « Chercheurs confirmés 2009 » du Conseil européen de la recherche (ERC). Ils figurent parmi les 236 scientifiques européens de haut niveau dont les projets seront financés par l’ERC. L’objectif de ces appels à projets est d’encourager la prise de risque et l’interdisciplinarité chez les chercheurs expérimentés. > Pour en savoir plus : http:Ilerc.europa.eu Le journal du CNRS n°242 mars 2010 © J. Leys 35



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