14 ©C. Lebedinsky/CNRS Photothèque INNOVATION Entretien VALORISATION Des inventions lucratives Le troisième tome de La Diffusion des découvertes du CNRS vers le monde industriel vient d’être édité en ligne et couvre cette fois la période du 1 er juillet 2008 au 30 juin 2009. À la tête de la Direction de la politique industrielle du CNRS, Marc J. Ledoux, nous en livre les principaux enseignements. Protections contre les rayonnements ionisants, marqueurs de l’insuffisance cardiaque, matériaux pour batteries au lithium… Les brevets présentés dans ce document semblent aussi nombreux que variés. Combien y en a-t-il au total ? Marc J. Ledoux : Ce troisième tome présente 339 brevets qui ont été publiés entre juillet 2008 et juin 2009, pour lesquels le CNRS est propriétaire ou copropriétaire. Cela représente un bond de plus de 19% par rapport à l’année précédente, à la même période. Sur ce total, 106 sont directement gérés par le CNRS et sa filiale Fist 1, 106 par nos partenaires universitaires et 127 par d’autres partenaires, principalement des industriels et d’autres organismes. Cet essor indique que les chercheurs ont réellement pris conscience que leurs découvertes ont aussi une valeur économique. De la santé à l’énergie propre en passant par l’optique, les nanotechnologies, ou l’agronomie, les innovations protégées couvrent une grande diversité de domaines, et parfois plusieurs en même temps. Pour preuve, près de la moitié d’entre elles émane de laboratoires pluridisciplinaires, une des forces du CNRS. Toutefois, trois secteurs sont en tête : les sciences du vivant et la chimie, puis les sciences et technologies de l’information et de l’ingénierie. Le journal du CNRS n°242 mars 2010 Le chiffre impressionne : 339 brevets. Mais estce un bon indicateur de l’innovation ? M. J.L. : Oui, mais ce n’est pas le seul. L’important est aussi le nombre de brevets que l’on parvient à valoriser. Et en la matière, les résultats dévoilés dans cette synthèse sont très satisfaisants. En effet, sur ces 339 brevets, 150 sont déjà exploités sous la forme d’une licence acquise après dépôt, ou d’un accord-cadre avec un industriel qui détient les droits d’exploitation. Cela représente un taux de 44,2%, score considérable comparé à des organismes analogues au CNRS. De plus, malgré l’augmentation significative du nombre de brevets, ce pourcentage gagne plus de trois points par rapport à la période allant de juillet 2007 à juin 2008. Et ce chiffre ne prend pas en compte plus de 80 licences signées entre juillet 2008 et juin 2009 sur des brevets plus anciens. Comment s’explique cette réussite ? M. J.L. : Nous préparons cette valorisation très en amont avec les partenaires industriels, avant le démarrage des projets scientifiques, à travers des accords-cadres ou des accords de collaboration de recherche spécifique. Là réside l’une des clefs majeures de ce succès. Mais l’amélioration de la qualité des découvertes explique aussi cette réussite. Un chiffre parlant est le nombre de déclarations d’inventions rejetées par notre comité de sélection. D’environ 30% en 2006, il n’est plus que de 10% aujourd’hui. Autre indicateur : pour la première fois, le CNRS vient d’intégrer le « top ten » des organismes de recherche publique en termes de nombre et de qualité de brevets déposés aux États-Unis ! Il est le seul représentant européen de ce classement 2. Combien ses brevets rapportent-ils au CNRS ? M. J.L. : En 2008, les redevances perçues se sont élevées à 46,7 millions d’euros, dont 89,9% proviennent du Taxotère, un traitement phare contre le cancer. C’est plus de 10 millions d’euros de moins que l’année précédente. Cette baisse est principalement due à la chute du dollar qui nous a fait perdre 5 millions d’euros, une part importante des revenus étant libellée dans cette monnaie, et à la fin de vie de deux licences très rentables sur un test de dépistage du VIH et un autre traitement anticancéreux. De juillet 2008 à juin 2009, chacun des 215 chercheurs à l’origine de brevets valorisés a toutefois touché 15000 euros en moyenne, dans une fourchette allant de 1000 jusqu’à 200 000 euros. Et deux ou trois scientifiques du CNRS gagnent plusieurs millions d’euros par an grâce aux redevances, mais on ne les intègre pas dans ces statistiques. |