CNRS Le Journal n°236 septembre 2009
CNRS Le Journal n°236 septembre 2009
  • Prix facial : gratuit

  • Parution : n°236 de septembre 2009

  • Périodicité : trimestriel

  • Editeur : CNRS

  • Format : (215 x 280) mm

  • Nombre de pages : 44

  • Taille du fichier PDF : 3,0 Mo

  • Dans ce numéro : Qui sont vraiment les jeunes ?

  • Prix de vente (PDF) : gratuit

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12 VIEDESLABOS Actualités PHYSIQUE NUCLÉAIRE Un pépin en moins avec les noyaux La collision de deux noyaux atomiques à très haute vitesse, dans les accélérateurs de particules par exemple, provoque l’éjection d’un nucléon (un proton ou un neutron), et, plus rarement, celle d’une paire de nucléons. Pourquoi, dans ce dernier cas de figure, la collision peut-elle disperser à tous les vents les deux particules arrachées, comme les émettre dans une direction privilégiée ? La question, qui taraude depuis longtemps les chercheurs, vient de trouver une réponse grâce à deux théoriciens du Grand accélérateur d’ions lourds (Ganil) 1, à Caen, et de l’Institut de physique nucléaire d’Orsay (IPNO) 2 : l’éventuelle dispersion des particules est liée à la distance qui les séparait dans leur noyau d’origine avant le choc. Une découverte prometteuse pour l’étude de la structure interne des noyaux. C’est en développant un modèle inédit d’interactions entre nucléons que Denis Lacroix et Marlène Assié sont parvenus à « entrer » dans le noyau comme personne auparavant. Le modèle, qui combine analyse théorique et simulations numériques, leur a en effet permis de calculer l’ensemble des forces qui s’appliquent sur chaque nucléon lors de la collision, en particulier sur les deux qui seront éjectés. Avec à la clé ce résultat : si ces nucléons sont unis, ils le restent. Autrement dit, s’ils sont proches l’un de l’autre dans le noyau, alors ils continueront de batifoler ensemble une fois éjectés. L’inverse est vrai : s’ils occupent des positions diamétralement opposées, ils partiront dans des directions différentes. BRÈVE Le journal du CNRS n°236 septembre 2009 Outre qu’elles résolvent le mystère des collisions, ces recherches ouvrent une fenêtre sur l’intérieur des noyaux. « En analysant l’angle d’éjection de paires de particules émises, on va dorénavant pouvoir remonter le film des collisions à l’envers et savoir quelle place occupaient les nucléons dans le noyau », s’enthousiasme Denis Lacroix. Le modèle a ainsi déjà permis de trancher le cas du bombardement de plomb208 par un noyau d’hélium 6. Ce choc arrache deux neutrons à l’hélium. La théorie dominante échouait à savoir si, avant leur éjection, les neutrons étaient accolés ou séparés dans l’hélium. Ils sont côte à côte, répond finalement le modèle de Denis Lacroix et Marlène Assié. L’étude de la structure des noyaux atomiques en général bénéficiera de ces travaux. Dans le domaine de la fusion nucléaire, par exemple, on s’interroge pour savoir si deux nucléons s’effleurant dans un noyau peuvent aider celui-ci à fusionner avec un congénère. Problème : des expériences témoignent du phénomène, mais d’autres non. « Notre modèle devrait permettre de comprendre ces observations différentes », promet le chercheur. Xavier Müller 1. Unité CNRS/CEA. 2. Institut CNRS/Université Paris-XI. Un virus à l’origine du placenta ? CONTACT ➔ Denis Lacroix Grand accélérateur national d’ions lourds (Ganil), Caen lacroix@ganil.fr L’apparition des mammifères placentaires, dont l’embryon est alimenté et protégé dans un placenta, il y a près de 100 millions d’années, serait-elle liée à une contamination virale ? C’est l’hypothèse que font les chercheurs du laboratoire « Rétrovirus endogènes et éléments rétroïdes des eucaryotes supérieurs » 1, à Villejuif, après avoir découvert que le gène syncytine A, d’origine virale, est essentiel au développement du placenta chez la souris. Il est connu depuis longtemps qu’une part (environ 8%) du patrimoine génétique de nombreuses espèces, dont l’humain, contient des restes de virus : c’est le cas des gènes de syncytines, des protéines exprimées au niveau du placenta. En les étudiant chez la souris, les biologistes ont démontré qu’elles étaient indispensables à sa formation. En effet, les syncytines en faisant fusionner les cellules entre elles, comme le fait un virus pour entrer dans une cellule, permettent la fabrication d’une « nappe cellulaire », constituant essentiel du placenta. Pour les chercheurs qui ont publié leurs travaux dans la revue PNAS du 21 juillet 2009, une contamination virale pourrait donc avoir été un évènement fondateur dans le passage d’un développement embryonnaire externe, dans des œufs, à un mode interne. 1. CNRS/Université Paris-XI/Institut Gustave Roussy © D. Marie M2C,Caen Le Lidar, laser à balayage latéral aéroporté, est un instrument hors du commun dont il n’existe qu’une poignée d’exemplaires en France. CLAREC Passer le littoral Equipés d’un laser ultramoderne, des chercheurs survolent le littoral du Nord-Ouest pour prévoir les modifications dues au changement climatique. Prochaine étape : la baie du Mont-Saint-Michel. Au-dessus des côtes de la Manche, un avion bimoteur au comportement bizarre passe et repasse, sans que l’on puisse entrevoir son but. Ce n’est ni un apprenti pilote qui fait ses heures ni une campagne publicitaire destinée aux vacanciers. À son bord, des ingénieurs criblent le sol d’impulsions laser. Leur objectif : réaliser le relevé topographique le plus précis et dense des côtes nordouest de la France. Nous assistons aux premières missions effectuées dans le cadre du projet « Contrôle par laser aéroporté des risques environnementaux côtiers » (Clarec), qui implique trois unités mixtes du CNRS 1, les quatre régions qui se partagent la façade Manche-mer du Nord (Haute et Basse-Normandie, Picardie, et Nord-Pasde-Calais) ainsi que leurs universités. En ce mois de septembre, c’est le Mont-Saint-Michel que s’apprêtent à survoler nos scientifiques. Nous le savons : nous n’échapperons pas au réchauffement global. Celui-ci entraînera des tempêtes, des précipitations hivernales et des crues plus intenses, ainsi qu’une élévation du niveau de la mer. Les zones littorales seront par-
ticulièrement exposées à ces menaces. « Pour pallier les conséquences du changement climatique, nous devons effectuer un lourd travail de modélisation. Nous devons être capables de prévoir l’évolution des caractéristiques physiques des milieux littoraux », explique Frank Levoy, chercheur au Laboratoire M2C. « Or, globalement, notre connaissance de la topographie des zones côtières est médiocre, et sans cette donnée de base, on ne peut pas faire de prévisions sérieuses. » Là est la raison d’être du projet Clarec. Celui-ci repose sur un instrument hors du commun : le laser à balayage latéral aéroporté, appelé aussi Lidar. Ce petit bijou de technologie, aussi rare que coûteux, permet de faire des relevés du relief avec une précision de 10 centimètres sur sol nu. Le Lidar mesure la distance entre le sol et l’avion jusqu’à 200 000 fois par seconde. En couplant cet appareil à des GPS au sol et embarqués dans l’avion, les chercheurs obtiennent un relevé topographique extrêmement dense, allant jusqu’à 5 points par mètre carré. « C’est une technologie très complexe, qui demande la mise en œuvre d’une douzaine de logiciels différents, des équipes au sol et des conditions météo excellentes. Mais, outre sa précision, elle permet de couvrir des surfaces très larges, jusqu’à 100 km 2, en une seule sortie », affirme Patrice Bretel, chef de projet. Point fondamental : l’efficacité hors pair du Lidar permettra de refaire les relevés régulièrement sur les mêmes zones côtières. Les chercheurs pourront alors observer les évolutions du relief qui sont en cours sur notre littoral, afin de mieux prévoir leur futur. Autour du Lidar, s’est également constitué un groupement d’intérêt scientifique (GIS), assoau laser Embarqué dans un avion spécialement équipé, le Lidar permettra de réaliser des relevés topographiques avec une précision de 10 cm. ciant les partenaires du projet, qui s’attaquera à des problématiques très variées. Citons par exemple celle du recul du trait de côte : « Sur le littoral de la Haute et Basse-Normandie, la côte peut perdre 5 mètres par an à certains endroits. Lors d’une tempête, le phénomène peut s’amplifier et atteindre 15 mètres en 2 jours. Ce phénomène pourrait finir par affecter des zones habitées ou des infrastructures », explique Franck Levoy. Il est donc urgent pour les scientifiques de bien comprendre le processus, et de savoir pourquoi certaines zones sont touchées tandis que d’autres semblent épargnées. Autre entreprise que le Lidar permettra de réaliser : une cartographie des zones à risques sur tout le littoral, de la baie du Mont- Saint-Michel à la frontière belge, qui révélera les lieux les plus exposés aux diverses menaces liées aux aléas climatiques. Mais Modèle numérique de surface d’une dune de sable de la pointe d’Agon, dans le Cotentin, en Basse-Normandie. L’un des objectifs de cette mission est de mesurer l’érosion des fonds sédimentaires de la baie du Mont-Saint-Michel. © D. Marie Mission VIEDESLABOS 13 des projets plus circonscrits pourront aussi recevoir l’aide précieuse du laser aéroporté. Par exemple, l’immense chantier de restauration du caractère maritime du Mont-Saint-Michel, qui rétablira les marées cernant le rocher, comme elles le faisaient jadis. Grâce au Lidar, les chercheurs pourront suivre les évolutions topographiques – comme l’érosion des fonds sédimentaires–, liées à ce chantier, et conseiller le syndicat en charge du projet. Le projet Clarec, lui, est l’aboutissement d’un très long travail initié par les chercheurs du M2C, et en particulier par Franck Levoy, son coordinateur, avec le soutien de Stéphane Costa, du LETG, à Caen, et Edward Anthony, du laboratoire « Océanologie et géosciences », à Wimereux. Il leur aura fallu quatre ans de démarches avant de pouvoir acquérir le Lidar. Pour donner une idée de l’effort, soulignons que l’accord-cadre ayant donné naissance au projet Clarec et lancé l’investissement nécessaire (de l’ordre de 1,3 million d’euros) ne réunit pas moins de vingt signatures au bas de la page. Vingt signatures qui ont permis aux régions côtières de la Manche et de la mer du Nord d’initier les recherches scientifiques à la base des prochaines politiques de prévention et de protection. Sebastián Escalón 1. Le Laboratoire de morphodynamique continentale et côtière (M2C, CNRS/Université Caen/Université Rouen), le Laboratoire de géographie physique et environnement (LETG, CNRS/Universités Nantes, Brest, Rennes-II, Caen) et le laboratoire « Océanologie et géosciences » (CNRS/Université du Littoral-Côte d’Opale/Université Lille-I). CONTACT ➔ Franck Levoy Laboratoire de morphodynamique continentale et côtière (M2C), Rouen franck.levoy@unicaen.fr Le journal du CNRS n°236 septembre 2009 © P.Bretel, O. Montfort/Clarec 12/02/09 © P.Bretel, O. Montfort/Clarec 12/02/09



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