24 © Courtesy of Jeremy Young/The Natural History Museum, London L’ENQUÊTE MISSION TARA OCÉAN Comment les coccolithophoridés, algues unicellulaires entourées d’un squelette calcaire, vont-elles réagir à l’acidification des océans ? Tara Océan apportera peut-être des réponses… ➔ OÙ Dans tous les océans du monde ➔ QUAND De septembre 2009 à 2012 ➔ CONTACT Éric Karsenti, eric.karsenti@embl.de ➔ POUR EN SAVOIR PLUS http:Iloceans.taraexpeditions.org Un tour du monde pour la vie marine « De Lorient, la goélette Tara s’apprête à partir et à gagner la Méditerranée, puis le golfe Arabo-persique, l’océan Indien… Un voyage de trois ans qui débutera en septembre prochain. Son retour est prévu fin 2012. D’ici là, elle aura parcouru la plupart des mers et océans du globe », résume le biologiste Éric Karsenti, chercheur CNRS détaché à l’European Molecular Biology Laboratory d’Heidelberg, en Allemagne, et codirecteur de l’expédition Tara Océan. « Ce périple, qui correspond à près de deux fois le tour de la Terre, passe par des zones très variées du point de vue de leur richesse biologique, de leur biodiversité, de l’impact de l’homme sur l’environnement… En outre, il devrait permettre de toujours naviguer dans le sens des vents portants, ce qui limitera la consommation d’énergies fossiles. » Objectif du voyage : explorer le monde des micro-organismes marins qui composent le plancton, afin de mieux appréhender cet écosystème, méconnu dans sa diversité comme dans son fonctionnement. Des instruments embarqués à bord Le journal du CNRS n°234-235 juillet-août 2009 permettront, tout en faisant route, de collecter, depuis la surface jusqu’à 1000 mètres de profondeur, une foule de données physico-chimiques et biologiques – température, salinité, pH et densité de la biomasse dans l’eau de mer, flux de carbone de la surface vers le fond des océans – et, surtout, de récolter les organismes planctoniques. Protistes (un groupe d’organismes unicellulaires), virus, bactéries, microalgues, microcrustacés, larves d’organismes divers seront conditionnés à bord puis envoyés, lors des escales, aux laboratoires impliqués dans la mission. « Faute de place, Tara ne pourra embarquer que cinq scientifiques, mais ce projet implique un grand nombre de chercheurs à terre, dans le monde entier, et notamment des collègues du CNRS : océanographes, biologistes, généticiens, physiciens… », précise Éric Karsenti. Les dispositifs d’imagerie installés à bord permettront de leur fournir rapidement les premières images des organismes récoltés, avec sans doute, à la clé, la découverte de nombreuses espèces nouvelles. L’objectif est aussi de mieux comprendre les interactions entre océans et climat, et de prédire leur évolution. « Les mers et les océans produisent la moitié de l’oxygène que nous respirons et absorbent 50% des émissions globales de dioxyde de carbone dans l’atmosphère, dont la moitié est d’origine humaine. Ces propriétés sont dues notamment aux organismes planctoniques. Mais les chercheurs manquent de données expérimentales pour comprendre et quantifier le fonctionnement de cette « pompe à carbone biologique », et la manière dont elle réagit aux changements climatiques. Or l’une des grandes interrogations, pour qui tente de prévoir l’évolution du climat, est de savoir comment les écosystèmes planctoniques s’adapteront au réchauffement climatique et à la pollution. » « Toutes les informations obtenues, avec leur position GPS, iront alimenter une base de données intégrée publique, la Bio-Bank, poursuit-il. Elle constituera une référence pour les recherches futures sur l’impact des changements climatiques sur les écosystèmes marins et la « pompe à carbone » océanique. Elle permettra aussi de construire, au fil de la progression du voilier, une « carte fonctionnelle » des océans. Celle-ci sera mise en ligne sur Internet, et permettra une restitution très large des résultats, qui contribuera aussi à sensibiliser le public. » Bon vent donc et bonne « pêche » à la mission Tara Océan. M.L. Avec ses 36 mètres de long, Tara est relativement petite, pour un navire océanographique. La goélette très manœuvrable peut ainsi s’adapter à des conditions de prélèvement difficiles. Tara peut aussi naviguer dans des conditions extrêmes, comme ici dans les glaces de l’Arctique, lors de l’expédition Tara Arctic. © F.Latreille/taraexpeditions.org © F.Latreille/taraexpeditions.org |