6 VIEDESLABOS Reportage SYSTÈMES De l’électronique dans les idées Sous le soleil de Montpellier, un pôle d’excellence en électronique s’épanouit depuis deux ans. Visite commentée de l’Institut d’électronique du Sud (IES) 1, un laboratoire qui se distingue dans plusieurs domaines de pointe. C’est avec cette machine sophistiquée, dite d’épitaxie par jets moléculaires, que les chercheurs du groupe Nanomir élaborent leurs fameux lasers à cascades quantiques. Un scientifique du groupe GEHF aligne un faisceau d’ondes térahertz obtenu par la méthode du photomélange en régime continu (conversion du battement de deux lasers térahertz). Le journal du CNRS n°233 juin 2009 Record du monde ! » Sur un tableau, dans la salle de café du groupe de recherche Nanomir, l’inscription victorieuse légende une courbe dont les valeurs avoisinent 2,64 micromètres. « C’est la plus petite longueur d’onde jamais émise par un laser à cascade quantique, nous éclaire Alexei Baranov, directeur de recherche et Médaille d’argent du CNRS en 2006. Nous avons réussi la manip il y a tout juste trois semaines. » Le physicien et son équipe sont spécialisés dans la conception de lasers émettant dans le moyen infrarouge (MIR), et plus particulièrement de ces fameux lasers à cascade quantique. Ces composants sont les seuls à pouvoir fonctionner dans des conditions extrêmes de température, et l’objectif de leur dernier « record » est justement l’analyse de gaz au fond d’un forage avoisinant les 200 °C, afin d’obtenir des informations sur la qualité du pétrole disponible. « Nous construisons nos dispositifs de A à Z. C’est cette capacité qui nous positionne comme leader en matière de laser moyen infrarouge », explique Éric Tournié, responsable de Nanomir. Car la recette pour élaborer un laser à cascade quantique n’est pas simple. Elle réside dans une succession de couches de matériaux semi-conducteurs, et c’est en se déplaçant à travers ces différentes strates que les électrons libèrent les photons à l’origine du rayonnement émis. Il aura fallu près de 1000 couches successives pour réussir à obtenir des photons d’une longueur d’onde avoisinant les 2,64 micromètres. Photodiode en silicium/phosphore développée par le groupe Mitea de l’IES. À LA LUMIÈRE DES TÉRAHERTZ Ce record du monde ne doit pas occulter que Nanomir est seulement l’un des huit groupes de recherche aux thématiques aussi novatrices et variées que complémentaires abrités par l’Institut d’électronique du Sud (IES), créé le 1 er janvier 2007 par la fusion de trois laboratoires 2. « Les thèmes de recherche de l’IES se situent en amont des technologies de l’information et de la communication, comme nous l’explique son directeur Daniel Gasquet. Notre travail est donc la conception, la réalisation et la caractérisation de composants et de systèmes électroniques. » De fait, les applications sont extrêmement variées : les télécommunications, l’énergie, l’imagerie, le médical, etc. La particularité de l’Institut est d’exceller dans des domaines de niche, ce qui lui vaut une reconnaissance internationale, par exemple pour le groupe Nanomir, à l’origine de plusieurs premières mondiales, comme la réalisation du tout premier laser MIR émettant par la surface. Mais continuons la visite. Autre étage, autre fréquence. Le Groupe d’étude des hautes fréquences (GEHF) s’intéresse, lui, aux ondes térahertz (THz). « Elles ont un très fort intérêt applicatif, puisque l’imagerie térahertz peut détecter les matériaux non métalliques et les identifier par leur signature spectroscopique : plastique, céramiques, explosifs, etc. », explique Laurent Chusseau, responsable de GEHF. Il a également été montré que les ondes térahertz révèlent mieux les cancers cutanés de type carcinome qu’une simple observation à l’œil nu. Les chirurgiens seraient à même d’enlever l’ensemble de la tumeur à la « lumière » des ondes térahertz. Seul problème, leur utilisation est encore extrêmement complexe et fait appel à une machinerie lourde et coûteuse. « Notre objectif est d’améliorer et de simplifier leur emploi pour les faire sortir du laboratoire. » BEAUCOUP DE BRUIT POUR BOM L’IES regroupe aujourd’hui 120 permanents et une soixantaine de doctorants qui travaillent très souvent ensemble dans des domaines complémentaires. Ainsi, une fois conçus, les lasers de Nanomir prennent la direction des locaux du groupe « Bruit optoélectronique et microélectronique » (BOM). L’étude du bruit 3 électronique dans les composants et les systèmes permet d’améliorer leur qualité. C’est l’une des plus anciennes thématiques de l’IES. Une partie de l’activité de cette équipe, à la pointe dans son domaine, consiste à mesu- |