30 ZOOM 9 Décembre 1887, les quatre pieds de la tour ont pris forme. Avant que la construction du premier étage assure la stabilité de l’ensemble, ils sont soutenus par des échafaudages. À l’intérieur, Eiffel eut l’idée de placer des boîtes remplies de sable, comme on le faisait dans l’Égypte antique. Vider un peu de sable abaissait légèrement tout un pied et permettait notamment de les ajuster tous à la même hauteur. Un décalage de quelques millimètres à peine aurait en effet empêché les rivets de rentrer dans les trous des plaques à assembler par la suite. 10 Soufflerie aérodynamique qui fut installée rue Boileau, à Paris, en 1912. Eiffel, après avoir quitté sa société de construction, entama une véritable carrière de chercheur. Il a conçu ce modèle au rendement amélioré. 11 De nombreuses expériences d’aérodynamique comme celle-ci furent menées à la tour Eiffel à partir de 1903. L’ingénieur mesura par exemple la résistance offerte par l’air à la chute d’objets depuis le 2 e étage, à 115 mètres d’altitude. DR 12 Inauguration de la station radio de la tour Eiffel en 1922 par Sacha Guitry (au micro), Yvonne Printemps et le général Ferrié. Transformée en gigantesque antenne, qui a d’abord servi aux communications militaires, la tour trouve une nouvelle raison de résister à sa destruction programmée… 12 Le journal du CNRS n°233 juin 2009 © Collection Tour Eiffel 9 > des contraintes et de la forme des structures, inventées par Claude-Louis Navier en 1821, sont maintenant appliquées couramment. « La forme des poutres et des édifices est calculée afin d’optimiser leur résistance tout en les allégeant », souligne Bertrand Lemoine. Les constructions sont de plus en plus ajourées. Et l’on peut les bâtir de plus en plus grandes et hautes sans craindre qu’elles ne s’affaissent sous leur poids ou ne cassent sous le vent. Parmi la nouvelle génération de constructeurs, L’épopée tour Eiffel, du 15 mai au 31 décembre, au 1 er étage de la tour Eiffel. Gustave Eiffel, le magicien du fer, du 6 mai au 31 août, à l’hôtel de ville de Paris (entrée gratuite) Eiffel remporte de nombreux contrats grâce à des innovations scientifiques qui réduisent les devis. « Par exemple, pour le viaduc de Porto, au Portugal, il propose de soutenir avec des câbles les deux arcs qui doivent de se rejoindre pour former le pont », explique Bertrand Lemoine. Résultat : pas besoin de construire de coûteux échafaudages dans la rivière ! Viaduc de Garabit, en France, structure interne de la statue de la Liberté de New York, Eiffel enchaîne les chantiers. Et va bientôt réaliser l’œuvre de sa vie. « Pour l’exposition universelle de 1889, anniversaire de la Révolution, la France veut faire les choses en grand. » L’idée d’une tour est dans l’air. On veut dépasser tous les édifices jamais construits, en particulier l’obélisque de Washington, qui culmine à 169 mètres. Deux ingénieurs de l’entreprise Eiffel, Émile Nouguier et Maurice Koechlin, conçoivent une « tour de 300 mètres ». Peu intéressé au départ, mais séduit après les embellissements ajoutés par l’architecte Stephen Sauvestre, Eiffel dépose un brevet 2. La tour remporte le 3 e prix du concours d’architecture de l’Exposition. Puis, à coup de publicité dans la presse et de conférences, il apporte ➔ DEUX EXPOS À NE PAS RATER ! 10 © Laboratoire aérodynamique Eiffel/CSTB/J-M.Seguin/Photo de Presse encore plus de crédibilité à son projet et signe une convention avec le gouvernement : financée en partie sur les propres deniers d’Eiffel, la tour sera construite ! « Les travaux, débutés en janvier 1887, s’achèveront en seulement vingt-six mois ! », souligne Bertrand Lemoine. Et la tour va émerveiller deux millions de spectateurs durant les six mois de l’exposition. Et ensuite ? « Elle devait être démontée au bout de vingt ans, à l’issue de la concession sur le terrain accordée par la ville de Paris. Mais Eiffel la sauva en montrant son intérêt scientifique, en tant que support d’antenne de radio ou pour réaliser différentes expériences, notamment en aérodynamique. D’ailleurs, quand il se retire des affaires à 61 ans, Eiffel poursuit une carrière de chercheur jusqu’à… ses 88 ans ! », rappelle l’architecte. « Il y aurait encore beaucoup à dire. Pour en savoir plus, venez voir les expositions… » Charline Zeitoun ➔ À lire La Tour de Monsieur Eiffel, Bertrand Lemoine, Découvertes Gallimard, 1989 La tour de 300 mètres, Bertrand Lemoine, Taschen, 2006 1. Centre André Chastel (CNRS/Université Paris-IV/Ministère de la Culture et et de la Communication). 2. Brevet déposé aux noms Eiffel, Nouguier et Koechlin, et que Eiffel rachètera plus tard à ses deux ingénieurs. CONTACT ➔ Bertrand Lemoine Centre André Chastel, Paris cedam@noos.fr 11 © Collection Tour Eiffel |