26 > L’ENQUÊTE des maladies comme le diabète ou les pathologies cardio-vasculaires. Mais ces biobanques sont également au cœur d’enjeux considérables, en termes de qualité (la validité des résultats des recherches dépend de la qualité des échantillons biologiques et des données qui leur sont associées) et en termes financiers. Elles se situent à la charnière entre des patients qui donnent sur une base altruiste, et des chercheurs, médecins, hôpitaux, entreprises, qui utilisent ces dons et peuvent en tirer profit, parfois au sens économique du terme. Avec dans ce cas, tous Autogreffe ou greffe autologue caractérisée par l’utilisation d’un greffon (partie de tissu ou d’organe) prélevé sur le sujet lui-même. Allogreffe le donneur et le receveur font partie de la même espèce biologique mais sont génétiquement différents. Dans ce cas, la greffe s’accompagne d’un traitement immunosuppresseur pour prévenir les rejets. les risques éthiques que cela comporte. Par exemple, comment être sûr que les données personnelles recueillies ne soient pas revendues aux banquiers, assureurs et employeurs ? À l’étranger, des sociétés privées proposent de conserver moyennant finances le sang du cordon ombilical de nouveau-nés dans l’éventualité d’une future autogreffe. Le cordon contient des cellules souches du sang 1 qui permettent de soigner des maladies graves comme la leucémie. En France, le don de sang de cordon se fait seulement à titre gratuit et anonyme dans des banques publiques où il est disponible pour tous. Mais actuellement, ces unités sont insuffisantes pour couvrir les besoins. Et la France doit importer du sang de cordon, ce qui lui coûte plus cher que de le conserver. Faut-il instaurer des banques privées ? « Soyons clairs, faire sa propre réserve dans son coin est contraire au principe de solidarité très cher à la France, explique Christine Noiville, de l’Unité mixte de recherche en droit comparé 2. À l’inverse, on peut envisager d’accepter les banques à finalité autologue si on en fait un levier d’enrichissement des banques publiques, actuellement trop peu fournies en sang de cordon. » Comme en Espagne, où l’on peut conserver le sang de cordon pour une autogreffe ou une greffe familiale (le plus souvent entre frère et sœur présentant des similarités génétiques), tant qu’une personne compatible n’en a pas besoin. Si c’est le cas, une partie du sang est réquisitionnée. « La course au stock personnel de sang de cordon n’a aucun fondement, s’indigne le médecin et chercheur Alain Fischer 3, spécialiste du Le journal du CNRS n°233 juin 2009 système immunitaire à l’hôpital Necker. À ce jour, rien ne prouve qu’une greffe autologue soigne mieux qu’une allogreffe. C’est comme ces tests génétiques sauvages qui se généralisent sur Internet et qui donnent l’illusion d’avoir un contrôle absolu sur sa santé. » Car les gènes n’expliquent pas tout. On peut avoir un gène de prédisposition à un cancer sans jamais le développer. Et à l’inverse, être touché par un cancer sans avoir de gène de prédisposition. Surtout, ces tests, utiles pour certaines maladies d’origine génétique, occultent les autres maladies multifactorielles : virus, bactéries, empoisonnements, parasites, accidents. « La plupart de ces tests ne sont pas validés par des autorités médicales, et les résultats, reçus directement par le patient sans accompagnement, peuvent entraîner des conséquences psychologiques et médicales graves, prévient Alain Fischer. La personne peut croire être porteuse saine de la maladie, modifier sa vie en conséquence et, en fait, ne courir aucun risque. Inversement, être rassurée, ne pas faire de contrôles et traitements préventifs, et courir de ce fait un vrai péril. » Camille Lamotte 1. Appelées cellules hématopoïétiques. 2. Unité CNRS/Université Paris-I. 3. Lauréat du grand prix Insermpour la recherche médicale 2008. CONTACTS ➔ Valérie Gateau, kjedahl@yahoo.fr ➔ Christine Noiville noiville@univ-paris1.fr ➔ Alain Fischer, fischer@necker.fr Comment les sciences Tout au long des états généraux sur la bioéthique, puis durant le débat parlementaire qui suivra, des éléments de réponse devront être apportés à l’ensemble des questions soulevées depuis 2004. Mais depuis quinze ans, le champ d’applications de la loi qui touche à la procréation et à l’intégrité de la personne n’a guère été élargi. Et pourtant, la science elle, a fait de considérables progrès qui peuvent affecter l’image même de l’homme, sa liberté, sa place dans la société. Le Comité national d’éthique, tout comme l’OPECST, évoquent tous deux l’accélération des études sur le fonctionnement du cerveau, qui « fait naître des interrogations, des inquiétudes, et surtout un besoin de débattre de l’impact de ces recherches… sur notre société craignant les manipulations et les atteintes à la vie privée et à l’autonomie de la volonté 1 ». Bien sûr, les experts s’interrogent sur les conséquences des avancées les plus récentes des neurosciences. Aujourd’hui, l’imagerie cérébrale va jusqu’à étudier le fonctionnement de la mémoire et des émotions et laisse imaginer qu’on pourra, un jour, lire dans les pensées. De même, les progrès des interfaces cerveau-ordinateur permettent d’étudier les différentes aires cérébrales à l’aide d’implants, qui |