CNRS Le Journal n°227 décembre 2008
CNRS Le Journal n°227 décembre 2008
  • Prix facial : gratuit

  • Parution : n°227 de décembre 2008

  • Périodicité : trimestriel

  • Editeur : CNRS

  • Format : (215 x 280) mm

  • Nombre de pages : 44

  • Taille du fichier PDF : 3 Mo

  • Dans ce numéro : 150 ans après, le monde selon Darwin

  • Prix de vente (PDF) : gratuit

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34 ©C. Gaillard INSITU Marie-Hélène Moncel. COLLOQUE La route de l’homme Du 26 au 28 novembre, un colloque international sur les premières migrations des hommes préhistoriques de l’Afrique vers l’Eurasie s’est tenu à Paris. Retour, avec Marie-Hélène Moncel, préhistorienne au CNRS et organisatrice du colloque, sur 2 millions d’années d’histoire. Comment les préhistoriens arrivent-ils à étudier des déplacements humains survenus… il y a plusieurs millions d’années ? Marie-Hélène Moncel : En comparant tout ce que l’on trouve sur les sites préhistoriques d’Afrique et d’Eurasie : l’outillage, la faune, etc. En identifiant les types d’outils, d’animaux chassés, etc., on peut définir les traditions et, par conséquent, les différents groupes humains, que l’on peut situer dans l’espace et dans le temps en datant les objets trouvés (par exemple, les restes osseux). On peut donc tracer le déplacement de ces individus. Certes, les restes humains fossiles sont très rares. Mais on trouve aussi des objets en pierre très précieux pour nous, transformés intentionnellement par les humains, en fait des outils et l’ensemble des sous-produits liés à leur fabrication : ce sont les « assemblages lithiques ». Et qu’est-ce que ces objets nous ont appris ? M.-H. M. : L’étude de ces assemblages suggère l’existence d’au moins deux phases d’expansion humaine, allant de l’Afrique – le berceau de l’humanité selon la plupart des chercheurs – vers l’Eurasie. La première, effectuée de l’Afrique vers l’Asie, remonterait au moins à 1,9 million d’années (Ma), comme en témoignent les plus vieilles traces d’outils trouvées à ce jour, en Chine. Par ailleurs, les plus anciennes traces attestant de la présence de l’homme au carrefour de l’Europe et Le journal du CNRS n°227 décembre 2008 de l’Asie ont été retrouvées à Dmanisi en Géorgie et remontaient à 1,8 million d’années. Et ces dernières années, une équipe russe – invitée à notre colloque – a découvert, au bord de la Mer d’Azov dans le Caucase du Nord, du matériel presque aussi ancien, datant de – 1,1 à – 1,6 Ma. Des découvertes qui suggèrent que l’homme a colonisé rapidement l’Eurasie ! Quant à la seconde migration humaine, plus récente et plus hypothétique, dont une partie a sûrement été en partance de l’Afrique et l’autre en partance de l’Asie, elle est matérialisée par l’apparition de groupes employant un nouvel outil : le biface, réalisé en détachant progressivement des éclats sur les deux faces d’un bloc de pierre. Au Proche-Orient, cet outil est présent vers –1,4 Ma. En Asie, il apparaît vers –1,2 Ma en Inde (Isampur). En Europe, les tout premiers sites à biface, en France (vallée du Cher), ne datent que de – 700 000 à – 600 000 ans. Quels étaient les représentants du genre humain concernés ? M.-H. M. : On considère que le premier membre du genre Homo était Homo ergaster, qui vivait en Afrique, entre – 2,2 Ma et – 1 Ma. La première vague de migration a sûrement été réalisée par cet Homo ergaster puis par Homo erectus. Concernant la seconde vague de peuplement, on n’a pas trouvé beaucoup de restes humains pour trancher © Département de préhistoire du MNHN Biface du site de La Noira (Centre de la France), daté de – 700000 à – 600000 ans. rigoureusement, mais on pense qu’elle a été orchestrée par Homo erectus. Pour les genres Homo qui ont migré vers l’Europe (depuis l’Asie ou directement depuis l’Afrique), on a trouvé, à Atapuerca, en Espagne, des ossements d’Homo antecessor ; lequel aurait vécu entre – 1,2 et – 0,8 Ma. Lors des migrations humaines, aurait-il pu y avoir simplement des contacts entre ces différents groupes humains, plutôt que des mouvements de populations ? M.-H. M. : Oui. En fait, il y a trois possibilités : soit il y a eu un déplacement de personnes ; soit « juste » un déplacement des traditions (façon de travailler les pierres, etc.) entre des groupes différents vivant dans des régions différentes ; soit un développement de traditions similaires dans différents groupes isolés les uns des autres (c’est le phénomène de convergence). Et dans une même région, il peut même y avoir eu ces trois possibilités en même temps. Voilà pourquoi il est complexe de retracer avec précision les migrations humaines préhistoriques… et pourquoi nous devons encore répondre à nombre de questions. Lesquelles ? M.-H. M. : Pourquoi les hommes ont-ils quitté l’Afrique ? Par quels chemins sont-ils parvenus en Europe ? Se sont-ils déplacés de l’Asie vers l’Europe ou y a-t-il eu de multiples vagues de colonisation humaine à partir de l’Afrique, en passant par le détroit de Gibraltar ou par le couloir levantin (Méditerranée orientale) ? Quels facteurs environnementaux et autres ont favorisé ou limité les déplacements ? Etc. Lors de ce colloque, qui a uni pas moins d’une centaine de climatologues, spécialistes des fossiles humains, de la faune, des outils, etc., de différents pays (France, Espagne, Chine, Russie…), nous avons fait un état des lieux des connaissances acquises ces quelques dernières années pour formuler de nouvelles hypothèses afin de répondre à ces questions cruciales. Propos recueillis par Kheira Bettayeb CONTACT ➔ Marie-Hélène Moncel Laboratoire « Les hominidés au quaternaire : milieux et comportements » (CNRS/MNHN), Institut de paléontologie humaine, Paris moncel@mnhn.fr
©L. Damelet/CNRS/Centre Camille Jullian Maison Méditerranéenne des Sciences de l’Homme BASE DE DONNÉES La sculpture gauloise en deux clics Une impressionnante base de données accessible en ligne, avec l’ambition de répertorier l’ensemble des sculptures de la Gaule romaine, des plus humbles aux plus spectaculaires… soit pas moins de 15 000 bas-reliefs, statues et bustes ! Voilà ce qu’a développé Danièle Terrer, ingénieure CNRS au Centre Camille Jullian à Aix-en- Provence 1. Une grande première. INSTRUMENT Du renfort pour l’imagerie médicale « Mine d’informations colossale, aisée et rapide d’accès pour tous, notre base de données est appelée à donner à terme une vue d’ensemble sur la totalité des sculptures de la Gaule romaine », précise Danièle Terrer. Il faut savoir ici que si les bas-reliefs, statues et bustes de la Gaule romaine représentent des collections exceptionnelles, il n’en existait jusque-là pas d’inventaire complet… Il y avait bien le recueil réalisé entre 1907 et 1938 par le conservateur des monuments et musées de Nîmes Émile Espérandieu (« Recueil général des bas-reliefs, statues et bustes de la Gaule ») , complété entre 1947 et 1966 par l’archéologue Raymond Lantier. Mais personne n’y avait ajouté les œuvres découvertes après 1966… Jusqu’à la création de la base de données « Nouvel Espérandieu » (Nesp) 2, qui regroupe désormais toutes les données existantes. « Concrètement, nous avons recensé toutes les œuvres existantes, puis numérisé et indexé leurs images collectées dans tous les grands musées du Sud de la France, détaille notre ingénieure. La base contient aussi des fiches, une pour chaque œuvre, renseignant sur la provenance de la sculpture, son histoire, sur celui ou ce qu’elle représente, etc. Ce travail n’aurait pas pu être fait sans l’aide Au musée de Vaison-la-Romaine, les photographes du Centre Camille Jullian immortalisent des effigies impériales colossales. Nom de code : Discovery VCT HD. L’appareil, construit par la société américaine General Electric, a rejoint les locaux de la plate-forme d’imagerie biomédicale Cyceron, à Caen (lire l’encadré). Pour le plus grand plaisir des chercheurs qui y travaillent : la machine hybride, première de ce type installée en Europe, comporte à la fois un scanner à rayons X ultrarapide et de très haute résolution (VCD) et une caméra à émission de positons à haute sensibilité et haute résolution (HD). Ainsi, le Discovery VCH HD fournit quasi simultanément une image anatomique des organes et une image fonctionnelle renseignant sur leur métabolisme. Tout ceci à une vitesse jusque-là inégalée : en cancérologie, le temps d’acquisition d’une image fonctionnelle de l’ensemble du corps humain ne prend que dix minutes. Quant au mode scanner, il est encore plus rapide, avec un temps d’acquisition de seulement vingt secondes. « La simultanéité des examens est à la fois un avantage pour le patient, qui gagne en confort et en temps, mais aussi pour les chercheurs. Coupler les deux images permet d’aborder les problèmes différemment », explique Bernard Mazoyer, directeur du groupement d’intérêt public Cyceron. L’appareil, cofinancé par le CNRS, l’Inserm, la Région Basse-Normandie et le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, va permettre d’intensifier et de développer de nouveaux programmes scientifiques en neurologie et en cancérologie. Avec lui, Cyceron va aussi investir un nouveau domaine, la cardiologie. « Avec Discovery VCT HD, on peut voir l’ensemble du cœur et des artères et obtenir une image en seulement 300 millisecondes. On accède ainsi à ce qui nécessitait jusqu’alors une angiographie ou une radiographie », explique Bernard Mazoyer. Coralie Hancok INSITU 35 du ministère de la Culture et de la médiathèque de l’Architecture et du Patrimoine. » Dans le cadre du projet Eurydice, lancé en 2001 et réalisé en partenariat avec le Laboratoire d’ingénierie de la connaissance multimédia multilingue du CEA List, les chercheurs souhaitent à présent ajouter à leur base des outils informatiques permettant d’exploiter de différentes façons ses informations, comme localiser, sur une carte, le lieu où a été trouvée la sculpture. Kheira Bettayeb 1. Centre CNRS/Université Aix-Marseille-I. La base est consultable sur le site du Centre Camille Jullian : http:Ilsites.univ-provence.fr/ccj/– sur la page d’accueil, cliquer sur « sculpture romaine ». 2. Cet outil a été réalisé au Centre Camille Jullian en accompagnement du programme de publication « Nouveau Recueil d’Espérandieu » initié en 2001 par l’Académie des inscriptions et Belles-Lettres sous la direction d’Henri Lavagne. CONTACT ➔ Danièle Terrer Centre Camille Jullian - Archéologie méditerranéenne et africaine (CCJ), Aix-en-Provence terrer@mmsh.univ-aix.fr UNE PLATE-FORME AU SERVICE DE LA MÉDECINE Créé en 1985 pour être l’un des trois premiers centres français à mettre en œuvre la tomographie par émission de positons (TEP), la plate-forme Cyceron est un groupement d’intérêt public (GIP) placé sous la tutelle des grands organismes nationaux de recherche : le CNRS, le CEA et l’Inserm. Elle est spécialisée en neurosciences mais met aussi ses installations d’imagerie au service de la recherche clinique, en cancérologie notamment, dans le cadre d’une convention avec l’Agence régionale d’hospitalisation de Basse-Normandie.C.H. CONTACT ➔ Bernard Mazoyer Centre d’imagerie - neurosciences et d’applications aux pathologies (Ci-Naps), Caen mazoyer@cyceron.fr Le journal du CNRS n°227 décembre 2008



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