CNRS Le Journal n°227 décembre 2008
CNRS Le Journal n°227 décembre 2008
  • Prix facial : gratuit

  • Parution : n°227 de décembre 2008

  • Périodicité : trimestriel

  • Editeur : CNRS

  • Format : (215 x 280) mm

  • Nombre de pages : 44

  • Taille du fichier PDF : 3 Mo

  • Dans ce numéro : 150 ans après, le monde selon Darwin

  • Prix de vente (PDF) : gratuit

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22 © R. Chiori > L’ENQUÊTE Comparer le système nerveux des méduses à celui, plus complexe, d’autres animaux, aide à comprendre comment ce réseau est apparu au fur et à mesure de l’évolution. même « arbre du vivant » tout à la fois des champignons, des bactéries, des animaux… alors que, jusqu’ici, on ne pouvait classer entre eux que des vertébrés ou des végétaux », dit Hervé Le Guyader. LES APPORTS DE L’EMBRYOLOGIE Dernier coup de booster en date donné à la théorie de l’évolution : l’essor de l’ « évo-dévo », une discipline centrée sur l’identification des gènes DANGEREUSE CROISADE CONTRE DARWIN « Je ne suis pas que le chevalier blanc qui pourfend le créationnisme, bien qu’il faille traiter ce sujet », vous répond Pascal Picq, du laboratoire « Paléoanthropologie et préhistoire » du Collège de France, un brin agacé d’avoir à commenter une nouvelle fois les méfaits de la croisade que mènent aux États-Unis les milieux fondamentalistes protestants contre la théorie de l’évolution. « Ces Églises, qui professent que l’Univers et la Terre ont été créés par un dieu il y a environ 6000 ans, ne cessent de gagner du terrain et visent à rien de moins qu’à installer une théocratie, dit-il en retrouvant tout son punch. L’Europe n’est pas à l’abri. Le regain de créationnisme auquel on assiste aujourd’hui ne constitue ni plus ni moins qu’une menace pour la laïcité et la démocratie. » Autre courant de pensée qui a le don d’ulcérer les évolutionnistes : le « Dessein Intelligent », un « néocréationnisme » qui se présente comme une science et affirme que certains faits de l’évolution (par exemple la formation de dispositifs structuraux et fonctionnels complexes comme l’œil) seraient à jamais inexplicables par la science, et qu’il faut donc rechercher des causes non naturelles à leur survenue. « Le Dessein Intelligent invoque l’existence d’une « intelligence supérieure » pour expliquer la fabuleuse diversité du vivant », dit Pascal Picq. Comment repousser les assauts du créationnisme et du Dessein Intelligent ? En réhabilitant en priorité les concepts fondateurs de la théorie de l’évolution dans les programmes scolaires. P.T.-V. CONTACT : Pascal Picq, pascal.picq@dbmail.com Le journal du CNRS n°227 décembre 2008 à la base du développement embryonnaire, l’étude de leur répartition au sein du monde animal, et leur comparaison. De quoi mieux interpréter, en particulier, les homologies d’organes entre grands groupes d’animaux. « Darwin aurait été séduit par la rencontre de l’embryologie, à laquelle il s’est beaucoup intéressé, avec la génétique par le biais de l’évo-dévo qui plonge le développement, et ses gènes associés, dans un cadre évolutif », fait remarquer Hervé Le Guyader. Autant d’axes de recherche qui montrent que les idées pionnières du naturaliste anglais se sont énormément enrichies au cours du XX e siècle. « Les spécialistes de l’évolution ont aujourd’hui à leur disposition une grande palette de modèles et de mécanismes avec lesquels jouer pour rendre compte des phénomènes évolutifs, résume Michel Morange, professeur de biologie à l’université Paris-VI et à l’ENS, membre du laboratoire « Régulation de l’expression génétique » 10. Leur travail ne consiste pas à tenter de falsifier la théorie darwinienne » mais à mettre à l’épreuve tel ou tel modèle de la galaxie darwinienne. Philippe Testard-Vaillant Sarcoptérygiens Rhipidistiens Tétrapodes Amniotes Lissamphibiens Sauropsides LA PLACE DE L’HOMME DANS L’ARBRE DU VIVANT 1 Laboratoire CNRS/Université Paris-VI/Muséum nat. hist. nat./IRD/École normale supérieure Paris. 2. Les variants sont des individus porteurs d’un génotype différent de celui des autres individus d’une population. 3. GDR 1928. 4. Laboratoire CNRS/Université Nancy-II. 5. Le libéralisme économique qui s’impose au XIX e siècle dans l’Angleterre victorienne accrédite l’idée que la libre concurrence (la compétition entre entreprises) et la liberté du travail et des échanges ne doivent pas être entravées. 6. Formulées par JohannMendel, en religion Gregor Mendel (1822-1884), ces lois stipulent que les gènes (dont Mendel ignorait l’existence) provenant de chacun des deux parents contribuent pour part égale dans la descendance. 7. Ces modèles démontrent que des gènes dotés de petits avantages sélectifs peuvent atteindre une fréquence de 100% dans la population. 8. Différenciation des espèces au cours de l’évolution. 9. Pangloss, dans Candide, de Voltaire, personnifie l’optimisme. 10. Laboratoire CNRS/École normale supérieure Paris. Diapsides Batraciens Lépidosauriens Archosauriens CONTACTS ➔ Hervé Le Guyader, herve.le_guyader@upmc.fr ➔ Guillaume Lecointre, lecointr@mnhm.fr ➔ Michel Veuille, veuille@mnhn.fr ➔ André Pichot, andre.pichot@univ-nancy2.fr ➔ Michel Morange, morange@biologie.ens.fr Actinistiens Dipneustes Gymnophiones Urodèles Anoures Mammifères Chéloniens Squamates Sphénodontiens Oiseaux Crocodiliens
Des recherches en évolution Que les scientifiques de tous horizons soient aujourd’hui dans l’impossibilité d’expliquer la totalité des faits évolutifs est bien pardonnable. Comment pourrait-il en être autrement, alors que cela fait seulement quelques dizaines d’années qu’ont été découverts l’ADN et les mécanismes moléculaires fondamentaux du vivant ? Pour autant, loin de rendre les armes devant les difficultés rencontrées, les chercheurs font flèche de tout bois pour décrypter le scénario d’un film commencé il y a 2,5 milliards d’années. « Ces questions constituent un des champs scientifiques les plus vastes et stimulants, et ce d’autant plus qu’au-delà de son intérêt académique et pratique, étudier l’évolution fournit des clés de réflexion pour prédire l’impact des changements globaux en cours sur les organismes et les systèmes écologiques », dit Jean-Christophe Auffray, directeur de l’Institut des sciences de l’évolution de Montpellier (Isem) 1. Primates Les phylogénéticiens ont pour habitude de classer le vivant en « arbres », dont les branches révèlent les liens de parenté entre les groupes d’espèces. Elles se ramifient et se multiplient au fur et à mesure que les êtres évoluent et que de nouvelles espèces apparaissent. La partie de l’arbre du vivant Hominines représentée ici regroupe les sarcoptérygiens, dont font partie les mammifères et, par conséquent, l’homme. C’est Darwin le premier qui proposa de classer le vivant de manière généalogique. Il y a cependant autant d’arbres que de méthodes d’analyse des caractères communs aux espèces. © Illustrations : D. Visset. Source : La classification phylogénétique du vivant, G. Lecointre, H. Le Guyader, ill. Dominique Visset, Editions Belin, 2006. SUR LA PISTE DE LA DIVERSITÉ BIOLOGIQUE Mettre les mains dans le moteur moléculaire pour comprendre comment émerge et se maintient la diversité biologique, Nicolas Galtier en a fait sa spécialité, à l’Isem. « On peut étudier l’évolution à différents niveaux d’organisation, rappelle-t-il : à l’échelle des écosystèmes, à l’échelle des espèces, à l’échelle des organismes ou encore à l’échelle des génomes, ce que je fais. Je « regarde évoluer » des séquences d’ADN, aussi bien dans des populations actuelles qu’entre des espèces très éloignées comme les bactéries et les mammifères, sachant que certains gènes (comme ceux régulant la transcription de l’ADN en ARN et la traduction de l’ARN en protéines) sont communs à l’ensemble des organismes vivants. » De l’art de « faire parler » les gènes pour déchiffrer les relations de parenté qui unissent les êtres vivants et reconstruire l’histoire évolutive des espèces. Mais comment expliquer que certaines d’entre elles (l’espèce humaine, par exemple) évoluent moins vite que d’autres (comme la drosophile) au niveau de leur génome ? Mystère. Les causes de ces différences de vitesse d’évolution moléculaire entre espèces restent largement inexpliquées. « Plusieurs pistes se dessinent, indique Nicolas Galtier, impliquant un lien soit avec l’apparition spontanée de changements génétiques d’une génération à l’autre, soit avec l’efficacité de la réparation de l’ADN lésé, soit avec la durée de vie moyenne d’une génération d’organismes, soit encore avec la capacité des différentes espèces à éliminer les mutations délétères (désavantageuses). » Travailler sur les modalités et les mécanismes de l’évolution peut aussi consister, comme s’y emploie Mathieu Joron, du laboratoire « Origine, structure et évolution de la biodiversité » 2, à plancher sur le mimétisme, un phénomène adaptatif conduisant des espèces très éloignées génétiquement les unes des autres à se ressembler morphologiquement. « J’ai montré que, chez le papillon tropical Heliconius numata, la variation des couleurs des ailes est contrôlée par un seul locus (un endroit bien précis sur un chromosome), dit-il, alors que, chez d’autres espèces proches, la variation du même trait est contrôlée par 4 ou 5 locus situés sur des chromosomes différents, et implique plus de gènes. Je cherche à comprendre le « pourquoi évolutif » de ces différences d’ « architectures génétiques ». » > Ces images montrent le mimétisme entre différentes espèces de papillons, plus ou moins éloignées génétiquement. L’ENQUÊTE 23 L’insectarium de l’Isem, où sont élevés des milliers de moustiques à différents stades de vie. Un outil précieux pour étudier, notamment, les mécanismes permettant au moustique commun d’acquérir sa résistance aux insecticides. Le journal du CNRS n°227 décembre 2008 © M. Joron © Photos : E. Perrin/CNRS Photothèque



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