CNRS Le Journal n°218 mars 2008
CNRS Le Journal n°218 mars 2008
  • Prix facial : gratuit

  • Parution : n°218 de mars 2008

  • Périodicité : trimestriel

  • Editeur : CNRS

  • Format : (215 x 280) mm

  • Nombre de pages : 44

  • Taille du fichier PDF : 2,8 Mo

  • Dans ce numéro : SIDA, le combat sans répit

  • Prix de vente (PDF) : gratuit

Dans ce numéro...
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30 © Photos : centre-terre.fr ZOOM 10 En dix mille ans environ, la pluie a dissous ici près de 2 mètres d’épaisseur de calcaire sauf… sous ce bloc de roche protectrice, solide et moussue. 11 Ces coquillages, qui jonchent le sol de la grotte, sont sans doute les restes de milliers d’années de repas pris ici par les Alakalufs. 12 Mesure du vent. En altitude, il atteint facilement 150 km/h et décourage la pousse de toute végétation. 13 Étude d’une vertèbre de baleine de plusieurs milliers d’années. Sa présence avec des dizaines d’autres dans une grotte située 6 mètres audessus du niveau de la mer reste un mystère. 14 Encore des restes de calcaire à l’abri derrière un bloc volcanique. Ils ont ici une forme de traînée, unique au monde, car sous la puissance du vent, la pluie tombe parfois quasiment à l’horizontale ! Le journal du CNRS n°218 mars 2008 10 11 12 14 > de l’île. « Elle part dans des souterrains dont la plupart sont encore inexplorés », commente le chercheur. Or les gouffres, milieu retiré à l’abri des éléments extérieurs, regorgent souvent de fabuleuses découvertes. Passionné de spéléologie, Richard Maire et ses acolytes en tenues hautement imperméables disparaissent donc régulièrement dans des crevasses vertigineuses à l’affût d’une nouvelle trouvaille. Dans la partie sud de l’île, dans la grotte du Pacifique, les expéditions précédentes avaient déjà livré de véritables trésors : des peintures sur les parois rocheuses, tracées à l’ocre et au charbon de bois, dont la datation au carbone 14 est en cours, et un crâne et des ossements humains d’environ 4 000 ans. « Ils appartiennent aux Alakalufs, seul peuple ayant vécu dans ces espaces si inhospitaliers, explique Richard Maire au sujet de ce groupe aujourd’hui quasiment disparu. Ils ont occupé l’île durant les derniers millénaires, jusque dans les années 1940, vivant de chasse et de collecte de coquillages, dans des cabanes ou des grottes, se déplaçant dans des canots d’écorce. » La quête de nouveaux indices pour mieux comprendre le mode de vie des Alakalufs se poursuit. L’étude de la biodiversité également, avec à la clé peut-être, la découverte de nouvelles espèces. Mais cette année, l’objectif numéro un de l’expédition dort dans la grotte de la Baleine. « En 2006, nous y avons trouvé les os de six baleines, commente ➔ LA MISSION EN DIRECT ! Pour suivre les dernières découvertes d’ « Ultima Patagonia 2008 » qui s’achève le 7 mars, connectez-vous sur : www.centre-terre.fr Un film, Le mystère de la baleine, sera tourné par Luc-Henri Fage, spéléologue et réalisateur. Richard Maire. Elles ont pu s’y échouer, même si l’entrée de la grotte se trouve actuellement 6 mètres audessus du niveau de la mer, car nous savons que l’île était plus basse il y a dix mille ans environ. » En effet, l’île a été allégée par la fonte de ses glaciers ; de cette remontée, le pourtour a ainsi gardé d’énormes encoches, traces des anciens niveaux marins. Hic : les gigantesques ossements ne datent que de quelques millénaires… Le soulèvement de l’île est-il en réalité plus récent ? Les baleines se sont-elles échouées à la suite d’un raz de marée ? En essayant de résoudre ce mystère, « Ultima Patagonia 2008 » continue son étude de l’île, vaste laboratoire prometteur pour de nombreuses disciplines. Charline Zeitoun 1. Laboratoire CNRS/Universités Bordeaux-II et III. 2. Karstologue : scientifique qui étudie le karst, paysage façonné dans des roches solubles comme le calcaire, le marbre, et la craie, en surface comme dans les cavités souterraines. 3. Centre Terre, association « loi 1901 », est composée de spéléologues amateurs qui participent à leurs frais aux expéditions « Ultima Patagonia ». 4. La géomorphologie est un domaine de la géologie centré sur l’étude de la formation des paysages naturels. 13 CONTACT ➔ Richard Maire « Aménagement, développement, environnement, santé et sociétés » (Ades), Pessacrmaire@ades.cnrs.fr
Monique Combescure Physicienne Harmonie quantique Ce fut vraiment une jolie surprise… » Malgré son œil avisé et son regard d’une rare acuité, Monique Combescure ne l’avait pas vu venir, en fin d’année dernière. Quoi donc ? Le prix Irène Joliot-Curie 2007, qui l’a tout simplement consacrée « Femme scientifique de l’année ». « Pour moi, ce prix valorise toutes les femmes de la recherche, nous confie quelques semaines plus tard la physicienne et directrice de recherche au CNRS. Et que le jury ait choisi une matière « dure » devrait encourager mes congénères à y mener carrière… sans être arrivistes, mais pour aller au bout de ce qui leur tient à cœur. » Installée depuis cinq ans à l’Institut de physique nucléaire de Lyon (INPL) 1 après avoir longtemps travaillé sur le campus d’Orsay, l’énergique chercheuse nous parle avec une passion contenue de sa matière fétiche : la physique théorique. Reconnus par ses pairs, ses travaux portent sur les problèmes quantiques. À savoir : « Faire des prédictions sur l’évolution de systèmes physiques impliquant des particules situées à l’intérieur de l’atome (quark, neutrino, lepton, etc.), expliquet-elle, à la fois modeste et gourmande. Ces particules peuvent être aussi le support d’une information dite quantique, qui pourrait devenir la base d’un nouveau type d’ordinateurs. » Passion également lorsqu’elle évoque les mathématiques, les lettres, l’orgue… On l’aura compris, Monique Combescure, 57 ans, n’est pas femme à s’encombrer de limites. D’ailleurs, à ses débuts, cette aînée d’une fratrie de six garçons voulait consacrer sa vie au piano… « mais ma mère m’a découragée pour des raisons professionnelles ». Prête pour la filière littéraire, la voici qui opte in fine pour la physique. Par esprit de contradiction et pour répondre à « cette interrogation quasi viscé- rale que j’avais sur la matière depuis mon plus jeune âge. La beauté et la nature d’une flamme de bougie me fascinaient et m’interpellaient déjà ». En « prépa » à Grenoble puis à l’École normale supérieure de jeunes filles de Paris, en 1971, elle « oscille » entre la physique expérimentale et les mathématiques. Jusqu’à ce que son âme de pionnière la pousse vers la recherche… en physique quantique, révélée par les cours « impressionnants » de Claude Cohen-Tannoudji, qui sera Prix Nobel de physique en 1997. Une autre révélation : celle de Mai 68, dont la trace se retrouvera tout au long de sa carrière, en tant que syndicaliste. On la croise encore aujourd’hui dans nombre d’instances CNRS, forte de la conviction de préserver une recherche fondamentale. « Dès mon plus jeune âge, la beauté et la nature d’une flamme de bougie me fascinaient déjà. » Dès 1972, la jeune chercheuse s’empare avec Jean Ginibre, son directeur de thèse en physique théorique à Orsay, des problèmes à trois corps, c’est-à-dire de la manière dont trois particules quantiques interagissent et évoluent dans le temps, et plus particulièrement de la théorie de la diffusion. Celle-ci porte sur le déplacement de chacune des particules en fonction de l’influence des deux autres, ainsi que sur le passage où leur mouvement devient totalement libre de celui des autres. « À l’époque, ce domaine dormait un petit peu. Les équations à trois corps étaient déjà utilisées en physique nucléaire, mais nous voulions les formaliser de manière plus simple. » En 1974, elle intègre le CNRS sans quitter son laboratoire. Et publie dans la foulée l’article pionnier sur l’approche physique mathématique de la théorie de diffusion. Le « papier » signe le début d’une fructueuse collaboration avec les mathématiciens… en dépit de leur volonté « un peu effrayante, de vouloir tout expliquer par les équations ». Nullement fâchée, la physicienne s’évertue dès 1988 à rapprocher les deux disciplines. Treize ans plus tard, cette collaboration prend la forme d’un groupement de recherches européen (GDRE) « Mathématique et physique quantique ». Mission accomplie ? Oui, mais non sans obstacles dans ce monde très masculin. Jonglant avec son mari pour la garde de leurs quatre enfants, il lui aura fallu espacer congrès et publications à un âge où l’on devient directeur de recherche. « C’était surtout une question d’autocensure, je ne me jugeais pas assez performante. Je la sens encore très présente dans les nouvelles générations. » D’où sa présence dans des colloques portant sur la disparité homme/femme en physique, et son énergie à convaincre les lycéen(ne)s de l’attrait des sciences. Il lui en reste encore pour se consacrer à l’orgue et à ses recherches théologicomusicologiques sur les chorals du Petit livre d’orgue de Jean-Sébastien Bach. En quête de la beauté du monde, toujours… Patricia Chairopoulos 1. Laboratoire CNRS/Université Lyon-I. RENCONTREAVEC 31 CONTACT ➔ Monique Combescure Institut de physique nucléaire de Lyon (INPL) mcombe@ipnl.in2p3.fr Le journal du CNRS n°218 mars 2008 © H. Raguet/CNRS Photothèque



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