30 © Photos : centre-terre.fr ZOOM 10 En dix mille ans environ, la pluie a dissous ici près de 2 mètres d’épaisseur de calcaire sauf… sous ce bloc de roche protectrice, solide et moussue. 11 Ces coquillages, qui jonchent le sol de la grotte, sont sans doute les restes de milliers d’années de repas pris ici par les Alakalufs. 12 Mesure du vent. En altitude, il atteint facilement 150 km/h et décourage la pousse de toute végétation. 13 Étude d’une vertèbre de baleine de plusieurs milliers d’années. Sa présence avec des dizaines d’autres dans une grotte située 6 mètres audessus du niveau de la mer reste un mystère. 14 Encore des restes de calcaire à l’abri derrière un bloc volcanique. Ils ont ici une forme de traînée, unique au monde, car sous la puissance du vent, la pluie tombe parfois quasiment à l’horizontale ! Le journal du CNRS n°218 mars 2008 10 11 12 14 > de l’île. « Elle part dans des souterrains dont la plupart sont encore inexplorés », commente le chercheur. Or les gouffres, milieu retiré à l’abri des éléments extérieurs, regorgent souvent de fabuleuses découvertes. Passionné de spéléologie, Richard Maire et ses acolytes en tenues hautement imperméables disparaissent donc régulièrement dans des crevasses vertigineuses à l’affût d’une nouvelle trouvaille. Dans la partie sud de l’île, dans la grotte du Pacifique, les expéditions précédentes avaient déjà livré de véritables trésors : des peintures sur les parois rocheuses, tracées à l’ocre et au charbon de bois, dont la datation au carbone 14 est en cours, et un crâne et des ossements humains d’environ 4 000 ans. « Ils appartiennent aux Alakalufs, seul peuple ayant vécu dans ces espaces si inhospitaliers, explique Richard Maire au sujet de ce groupe aujourd’hui quasiment disparu. Ils ont occupé l’île durant les derniers millénaires, jusque dans les années 1940, vivant de chasse et de collecte de coquillages, dans des cabanes ou des grottes, se déplaçant dans des canots d’écorce. » La quête de nouveaux indices pour mieux comprendre le mode de vie des Alakalufs se poursuit. L’étude de la biodiversité également, avec à la clé peut-être, la découverte de nouvelles espèces. Mais cette année, l’objectif numéro un de l’expédition dort dans la grotte de la Baleine. « En 2006, nous y avons trouvé les os de six baleines, commente ➔ LA MISSION EN DIRECT ! Pour suivre les dernières découvertes d’ « Ultima Patagonia 2008 » qui s’achève le 7 mars, connectez-vous sur : www.centre-terre.fr Un film, Le mystère de la baleine, sera tourné par Luc-Henri Fage, spéléologue et réalisateur. Richard Maire. Elles ont pu s’y échouer, même si l’entrée de la grotte se trouve actuellement 6 mètres audessus du niveau de la mer, car nous savons que l’île était plus basse il y a dix mille ans environ. » En effet, l’île a été allégée par la fonte de ses glaciers ; de cette remontée, le pourtour a ainsi gardé d’énormes encoches, traces des anciens niveaux marins. Hic : les gigantesques ossements ne datent que de quelques millénaires… Le soulèvement de l’île est-il en réalité plus récent ? Les baleines se sont-elles échouées à la suite d’un raz de marée ? En essayant de résoudre ce mystère, « Ultima Patagonia 2008 » continue son étude de l’île, vaste laboratoire prometteur pour de nombreuses disciplines. Charline Zeitoun 1. Laboratoire CNRS/Universités Bordeaux-II et III. 2. Karstologue : scientifique qui étudie le karst, paysage façonné dans des roches solubles comme le calcaire, le marbre, et la craie, en surface comme dans les cavités souterraines. 3. Centre Terre, association « loi 1901 », est composée de spéléologues amateurs qui participent à leurs frais aux expéditions « Ultima Patagonia ». 4. La géomorphologie est un domaine de la géologie centré sur l’étude de la formation des paysages naturels. 13 CONTACT ➔ Richard Maire « Aménagement, développement, environnement, santé et sociétés » (Ades), Pessacrmaire@ades.cnrs.fr |