CNRS Le Journal n°218 mars 2008
CNRS Le Journal n°218 mars 2008
  • Prix facial : gratuit

  • Parution : n°218 de mars 2008

  • Périodicité : trimestriel

  • Editeur : CNRS

  • Format : (215 x 280) mm

  • Nombre de pages : 44

  • Taille du fichier PDF : 2,8 Mo

  • Dans ce numéro : SIDA, le combat sans répit

  • Prix de vente (PDF) : gratuit

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20 L’ENQUÊTE GLOSSAIRE VIH Virus de l’immunodéficience humaine. Antirétroviraux (ARV) Classe de médicaments utilisés pour le traitement des infections liées aux rétrovirus tels que le VIH. Sida Syndrome de l’immunodéficience acquise. Antigène Toute substance reconnue par une composante du système immunitaire et qui provoque sa réaction. Rétrovirus à ARN Un rétrovirus est un virus dont le génome est formé d’ARN, une molécule très proche de l’ADN. Il utilise une enzyme, la transcriptase inverse, pour forcer la cellule hôte à créer de l’ADN viral, lequel sera alors capable de pénétrer dans le noyau de la cellule infectée et de s’intégrer aux chromosomes. Enzyme Une enzyme est, dans la majorité des cas, une protéine qui catalyse et accélère une réaction. Micro-ARN Petites molécules d’ARN capables de bloquer la synthèse des protéines. Protéasome Assemblage de molécules chargé, entre autres, de la dégradation des protéines Protéines de l’hétérochromatine Ces protéines jouent un rôle dans l’organisation même du génome et sont impliquées dans l’inhibition de l’expression des gènes. Candidat vaccin Un candidat vaccin est une préparation vaccinale en cours d’essai qui pourra devenir un vaccin si toutes les étapes d’essai (tolérance, réponses immunes induites) sont concluantes. Vecteur Un vecteur est une bactérie ou un virus non pathogène qui présente au système immunitaire un gène du pathogène contre lequel on veut immuniser. Le journal du CNRS n°218 mars 2008 © www.gregcirade.com/CNRS Photothèque VIH > Récepteur CD4 cours de laquelle « la charge virale reste à peu près stable et faible au niveau du sang malgré une intense réplication du virus, poursuit Philippe Benaroch, responsable de l’équipe « Transport intracellulaire et immunité » 2 à l’Institut Curie. Les cellules infectées sont rapidement détruites et renouvelées, preuve que le système immunitaire est à même, pendant une longue période, de contenir l’infection virale ». Mais pas de l’enrayer complètement. Après de longs mois d’une résistance héroïque, « le nombre de lymphocytes T CD4+ (la cible n°1 du VIH), qui aident les autres cellules-clés du système immunitaire (les « lymphocytes T tueurs » CD8+ et les lymphocytes B) à croître et à contrer les attaques de l’intrus, diminue inexorablement. Le sida apparaît au moment où se produit un effondrement à la fois du nombre de lymphocytes T CD4+ (moins de 400/mm 3 de sang, contre plus de 1000 en temps normal) et de la réponse des lymphocytes T tueurs CD8+, tandis que la virémie augmente. » Cytoplasme du lymphocyte COMMENT LE VIH SE RÉPLIQUE 1 1/FUSION VIRUS/CELLULE Une fois que le virus du SIDA s'est arrimé à la membrane d’un lymphocyte, les deux membranes (du virus et du lymphocyte) fusionnent. Le VIH peut alors pénétrer dans le cytoplasme de la cellule-hôte. Il se débarrasse de sa capside, ce qui libère l’ARN viral dans le lymphocyte. DES RÉSERVOIRS CACHÉS DANS LES CELLULES Tel est, sommairement résumé, le mode opératoire du VIH pour tromper, désorganiser puis saboter le système immunitaire. Une stratégie d’une terrible efficacité dont les chercheurs s’évertuent à comprendre les moindres rouages dans le but d’améliorer les thérapies anti- VIH. Le rôle des cellules dendritiques dans l’infection, en particulier, s’avère primordial. Plus personne ne doute aujourd’hui qu’elles représentent un des sas d’entrée du VIH dans l’organisme. « Ces cellules « présentatrices de l’antigène » stimulent les lymphocytes T, dit Anne Hosmalin, responsable de l’équipe « Présentation de l’antigène par les cellules dendritiques » au département Immunologie de l’Institut Cochin 3. On les appelle « présentatrices » parce que le système immunitaire a besoin de se faire présenter des fragments du virus pour activer des réponses immunitaires à bon escient. » Ainsi, les cellules dendritiques mangent le VIH, le digèrent et le décomposent en fragments de petite taille (épitopes) qui vont être piégés par les molécules d’histocompatibilité (HLA chez l’homme) et présentés aux lymphocytes T. Une transmission orchestrée par une cascade d’événements moléculaires qu’Anne Hosmalin s’emploie à décrypter, sachant que ces connaissances pourraient servir à compléter l’arsenal thérapeutique anti-VIH. Une fois introduit dans un lymphocyte T, le VIH « modifie le comportement normal de son « hôte », poursuit Olivier Schwartz. Le contact entre le lymphocyte et les cellules présentatrices d’antigènes est perturbé, ce qui modifie la réponse immunitaire. » Le responsable de ce chambardement ? Un des composants du VIH, la minuscule protéine Nef. « Un axe de nos recherches – qui bénéficient entre autres du soutien de Sidac- Enzyme transcriptase inverse 2 ARN viral ADN viral 2/RETRANSCRIPTION DE L’ARN VIRAL EN ADN VIRAL Grâce à une enzyme (la transcriptase inverse), l’ARN viral libéré est converti en ADN double brin. Protéines GP120 et GP41 Protéines P7 GAG et P9 GAG 3/INTÉGRATION DANS LE NOYAU L’ADN ainsi produit pénètre dans le noyau de la cellule et s'intègre au génome de cette dernière via une autre enzyme, l’intégrase. 3 Noyau du lymphocyte
6/FORMATION DES VIRIONS Tous ces éléments se rapprochent les uns des autres. L’ARN « s’encapside ». 3 ARNm 4 5 4/TRANSCRIPTION DE L’ADN EN ARN « MESSAGER ». La synthèse d’un nouveau virus passe par la transcription de l’ADN en ARN « messager ». 7/BOURGEONNEMENT Le nouveau virus bourgeonne, emportant un fragment de la membrane plasmique du lymphocyte (qui contient les protéines membranaires virales et aussi des protéines cellulaires). 6 ARN viral 5/SYNTHÈSE DE PROTÉINES VIRALES Les ARNm sont traduits en protéines par la machinerie enzymatique de la cellule. La cellule va synthétiser des glycoprotéines d’enveloppe et des protéines de la capside (protéines Gag et Gag-Pol), sorte de protéines géantes qui vont s’amarrer à la face interne de la membrane cellulaire. 7 tion, de l’Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites virales (ANRS), de l’Institut Pasteur… –, concerne les effets de l’infection sur la biologie de la cellule. Nous nous efforçons notamment de comprendre comment Nef parvient à dérégler le trafic des certaines molécules indispensables pour démarrer une réponse immunitaire à l’intérieur d’un lymphocyte. Un peu comme si un pyromane, après avoir allumé un incendie, investissait le centre opérationnel des pompiers pour dérouter la circulation des secours », dit Olivier Schwartz. Il souligne que ce mécanisme destiné à affaiblir les défenses de la cellule-hôte et à optimiser la réplication du virus « reste plein de zones d’ombre ». Sitôt après avoir forcé l’entrée de la forteresse cellulaire, le VIH, un rétrovirus à ARN, n’a de cesse d’incorporer son propre matériel génétique au génome de son hôte. Un tour de passe-passe (« l’intégration ») aux effets délétères. Chaque fois qu’une cellule infectée se duplique, elle multiplie l’information du VIH en même temps que la sienne. Le VIH prend également un malin plaisir à infecter les macrophages, d’autres globules blancs spécialisés dans l’ingestion et la digestion de toutes sortes de débris et de microbes. « Ces cellules possèdent normalement dans leurs compartiments d’ingestion et de dégradation un pH acide auquel le virus ne devrait pas résister, explique Philippe Benaroch. Or, nous avons montré que le VIH parvient à modifier ce milieu a priori hostile en mettant hors course les enzymes qui ont besoin d’un pH acide pour fonctionner et le dégrader. Il crée ainsi un environnement favorable à sa survie et à sa multiplication. De ce fait, les macrophages infectés seraient un réservoir de virus difficiles à éradiquer, car masqués à l’intérieur de ces cellules. » Le système immunitaire ne parvient pas à les détecter ni les antiviraux à les tuer. Un autre réservoir longtemps méconnu est représenté par une micropopulation de cellules T CD4+ infectées dans lesquelles le VIH reste inactivé. « Après avoir inséré son patrimoine génétique dans celui de ces cellules, le virus entre dans une phase dite « silencieuse », commente Simon Wain-Hobson. Comme il est éteint, il échappe à la surveillance radar du système immunitaire (qui ne repère que les cellules produisant de nouveaux virus) et réduit la fenêtre d’intervention des antiviraux. » En étudiant les mécanismes à l’origine de l’établissement et du maintien de telles « cellules réservoirs », Monsef Benkirane, de l’Institut de génétique humaine (IGH) 4, à Montpellier, a peut-être trouvé la parade pour réveiller ces virus « invisibles » et les forcer à sortir de leur « planque », se sorte que les traitements puissent les terrasser. « Nous avons identifié trois machineries cellulaires qui seraient responsables de cette latence se traduisant par une très faible expression des gènes viraux : les micro-ARN, le protéasome et les protéines de l’hétérochromatine. Il importe désormais de développer des molécules 8 8/LIBÉRATION Le nouveau virus est libéré dans le milieu intérieur. Il peut infecter de nouvelles cellules. L’ENQUÊTE 21 capables d’inhiber ces machineries cellulaires pour induire la réplication virale dans les cellules réservoirs. Le but : rendre ces virus visibles au système immunitaire et sensibles aux antiviraux. » LES STRATÉGIES THÉRAPEUTIQUES Quid, justement, des stratégies thérapeutiques à l’œuvre pour contrer les agissements du rétrovirus le plus tristement célèbre ? Son irruption sur la scène sanitaire et son long cortège de victimes ont naturellement « dopé » l’intérêt de la communauté scientifique pour la pharmacologie antivirale. À l’heure actuelle, les médecins disposent de plus de vingt-cinq molécules pour faire la guerre au sida. Parmi ces « armes », les inhibiteurs de la transcriptase inverse. Ils prennent pour cible l’enzyme du VIH indispensable à la transformation des molécules d’ARN viral en ADN proviral. Quant aux inhibiteurs de la protéase, ils bloquent l’action de l’enzyme participant à la synthèse des protéines virales à l’intérieur de la cellule, de telle sorte que les nouveaux virus produits ne peuvent plus infecter de nouvelles cellules. Ces deux armes reposent sur un principe simple : stopper des étapes de la réplication foudroyante du VIH. Las, si « l’arrivée de thérapies virales extrêmement actives pour le traitement des patients infectés par le VIH a permis tout à la fois de contenir la réplication de ce pathogène et d’améliorer l’état clinique des malades, elles ne débouchent pas sur l’éradication totale de l’infection et induisent en permanence l’apparition de virus résistants », dit Clarisse Berlioz-Torrent, coresponsable, avec Stéphane Emiliani, de l’équipe « Interactions moléculaires hôte-pathogène » au département « Maladies infectieuses » de l’Institut Cochin. Sans oublier que le recours prolongé aux trithérapies (l’association de trois molécules antirétrovirales), très coûteuses, entraîne des troubles secondaires multiples. Qu’il faille continuer à agir pour isoler de nouveaux agents antiviraux est une évidence. Les recherches les plus avancées se concentrent sur une troisième enzyme, l’intégrase, elle aussi strictement indispensable à la réplication du VIH et entrant en action quand l’ADN proviral s’introduit dans le génome de la cellule-hôte. Un de ces nouveaux antirétroviraux, le Raltegravir, couplé à des molécules anti-VIH plus « classiques », pourrait jouer un rôle important pour les patients en échec thérapeutique. Autre domaine en plein essor : l’élaboration d’inhibiteurs de l’entrée du virus dans la cellule, un processus terriblement sorcier au cours duquel la glycoprotéine d’enveloppe (Env gp120, une grosse protéine du VIH arrimée à son enveloppe) arrive à s’accrocher à une cellule cible (lymphocyte T, macrophage…) en identifiant un récepteur, le CD4, ainsi que divers corécepteurs spécifiques dont le CCR5, puis à forcer l’entrée du sanctuaire cellulaire. Plusieurs > Le journal du CNRS n°218 mars 2008



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