4 GRAND ANGLE 4 N°2619 JEUDI 21 21 OCTOBRE 2021 CNEWS.FR T. COEX/AFP LES ACTES DE VIOLENCE CONTRE LES ENSEIGNANTS SE SUCCÈDENT DES PROFS PRIS POUR CIBLE La majorité des plaintes enregistrées concerne des insultes et des menaces (45,7%) ou de la diffamation (24,9%). Plusieurs affaires récentes illustrent le phénomène, alors que la profession dénonce une absence de soutien. Insultés, menacés, frappés parfois. Plusieurs professeurs ont, ces dernières semaines, été la cible d’actes de violence particulièrement choquants. A Combsla-ville (Seine-et-Marne), une enseignante a été violemment projetée au sol par un élève, tandis que deux autres filmaient la scène. La veille, une institutrice avait été frappée par un enfant de seulement 8 ans à Brunoy (Essonne). Lundi, un professeur drômois était à son tour agressé, visé par une chaise lancée par un individu non identifié. Une série noire non exhaustive, malheureusement à l’image de ce que la profession subit de manière régulière. De très nombreux cas Chaque année, le Baromètre du climat scolaire publié par l’Autonome de solidarité laïque (ASL), un ensemble associatif visant à accompagner et protéger les enseignants, confirme l’ampleur du malaise. Si celui de 2020 montre une baisse du nombre de dossiers traités, de 20% en moyenne, cela relève du « trompe-l’œil », avec une situation sanitaire qui a vidé les établissements scolaires. L’analyse des chiffres mois par mois indique qu’en « année normale », le nombre de procédures ouvertes aurait été au moins égal, voire supérieur à l’année 2019, puisque des « pics » de signalements ont été enregistrés en dehors des confinements. Les professeurs ont par ailleurs été confrontés à d’autres formes de violences, liées aux outils numériques utilisés pour faire classe à distance. Mais, d’après les récents événements, le retour en présentiel n’a pas tout réglé. En réaction à la récente agression de Combs-la-Ville, Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Education nationale, s’est engagé à ériger cette affaire en « démonstration » de la « fermeté » du gouvernement à l’égard des violences scolaires, « aussi bien sur le plan pénal que sur le plan disciplinaire ». Si l’on en croit l’enquête Sivis 2019- 2020, menée par le ministère, le degré d’exposition à la violence diffère suivant les établissements, leur type, taille et profil social. Les chiffres de l’ASL soulignent que l’effort devra surtout profiter aux personnels d’éducation du 1er degré, qui sont les plus exposés (59% des dossiers traités), sachant que la majorité des plaintes enregistrées concernait des insultes et menaces (45,7%) ou de la diffamation (24,9%) , qui ne viennent pas forcément des élèves, maus aussi de leurs proches. Des cours « la peur au ventre » La situation ne s’est donc pas arrangée depuis le plan contre les violences à l’école, présenté en août 2019. Ce dispositif a principalement instauré des référents violence dans chaque département, une collaboration accrue entre ministères de l’Education nationale, de la Justice et de l’Intérieur, un accompagnement des victimes ainsi que la possibilité d’inscrire des élèves « polyexclus » dans des « classes relais ». Son efficacité est difficilement mesurable, en particulier après deux années troublées, mais les UN THÈME DE CAMPAGNE S. SALOM-GOMIS/SIPA REPÈRES 7 OCTOBRE 2021. Une professeure des écoles de Brunoy (Essonne) est frappée par l’un de ses élèves âgé de 8 ans. Elle a reçu une incapacité totale de travail de trois jours. 8 OCTOBRE. Une enseignante du lycée Jacques-Prévert de Combs-la- Ville (Seine-et-Marne) est projetée au sol par un élève. L’adolescent a été condamné à cinq mois de sursis probatoire. 18 OCTOBRE. Un individu cagoulé s’introduit dans le lycée Gustave- Jaume de Pierrelatte (Drôme) et lance une chaise sur un enseignant. Ce dernier a pu éviter l’objet et l’agresseur a pris la fuite. 19 OCTOBRE. Un élève fait irruption dans la classe d’une professeure du lycée Jean-Moulin de Roubaix, l’insultant et brisant ses lunettes. professionnels témoignent d’un « sentiment d’abandon » tenace. C’est le cas de l’équipe du lycée Jean-Moulin de Roubaix, dans lequel une enseignante a été agressée mardi. Faisant valoir leur droit de retrait, ses collègues ont déploré, auprès de La Voix du Nord, un manque « de moyens humains » qui entretient « une vraie insécurité » et les oblige à venir travailler « la peur au ventre ». n L’INFO EN PLUS Au Royaume-Uni, des cours d’autodéfense et des caméras portatives sont proposés aux enseignants pour lutter contre les violences. Pour les candidats à la présidentielle de 2022, ces violences à l’égard des enseignants sont devenues un véritable sujet de campagne. « Inacceptable ! […] Je rétablirai le respect du professeur », écrivait ainsi Valérie Pécresse (Libres !) sur Twitter, à propos de l’agression à Combs-la-Ville. En parallèle, Xavier Bertrand (LR) promettait de « refaire de l’école un sanctuaire », Yannick Jadot demandait plus de considération pour des enseignants « bien trop souvent laissés seuls », et Anne Hidalgo (PS) se projetait : « Quelle école voulons-nous pour nos enfants ? ». |