QUELLE EST LA PLACE DE L’INNOVATION SPATIALE DANS LA POLITIQUE D’INVESTISSEMENT DE L’ÉTAT ? Louis Schweitzer : Le spatial est par nature un domaine d’innovation, car il évolue à très grande vitesse. Pour preuve, le lanceur Ariane, qui a conquis une place incontestée dans l’accès à l’espace, était voué à disparaître si nous étions restés sur Ariane 5. Il est donc très important d’accepter qu’une position ne soit jamais acquise ! Le spatial représente aujourd’hui pour l’État un grand programme d’investissement porteur d’avenir, parce qu’il génère de nombreuses retombées et qu’il véhicule une image d’excellence et de progrès. Pour moi, il est au cœur d’une stratégie d’innovation du pays. Il inaugure la croissance future de la France. PAR QUELS MÉCANISMES L’INNOVATION CRÉE-T-ELLE DE L’EMPLOI SUR NOS TERRITOIRES ? L. S. : Quantitativement, l’innovation n’a pas d’effets rapides sur le territoire. Quand vous créez une entreprise de services à la personne, vous pouvez en quelques années créer des milliers d’emplois. L’innovation est plus qualitative. Vous n’aurez pas cet effet d’annonce, un matin, parce qu’un grand programme spatial a été décidé. Par contre, si nous voulons demain créer de nouveaux emplois, cela dépendra de ce que nous saurons faire de cette innovation. En tant que grande puissance spatiale, la France appuie cet atout. Elle sera GRAND ORAL dans la future compétition mondiale un des acteurs majeurs. LA CLÉ ACTUELLE DE LA BONNE SANTÉ DES ENTREPRISES QUI PROGRESSENT SEMBLE ÊTRE, PLUS QUE JAMAIS, LE POIDS DE LA R&D (DYSON, GOOGLE, APPLE, ETC.). QUEL LIEN FERIEZ-VOUS ENTRE INNOVATION ET R&D ? L. S. : Le Programme d’Investissements d’Avenir (PIA) est centré sur l’innovation et la R&D. Mais il faut bien voir qu’innovation et R&D ne coïncident pas forcément. Un pays comme le Japon est en pointe sur la R&D en proportion de son PIB, mais pas sur l’innovation. En France, il faut réunir les deux aspects, l’innovation qui relève de la prise de risque et une dépense de R&D. Dans le spatial, c’est la convergence des deux qui fait le succès ou l’échec d’un programme. COMMENT PENSEZ-VOUS ÉVALUER LA CRÉATION D’ACTIVITÉ GÉNÉRÉE PAR LE PROGRAMME D’INVESTISSEMENTS D’AVENIR ? L. S. : Le PIA est toujours associé à une volonté d’évaluation qui est au cœur de nos préoccupations. Une somme est systématiquement réservée pour chacune de nos actions. Cette évaluation se fait en trois temps : à court terme pour savoir si les programmes présentés sont de qualité ; à moyen terme (3-5 ans) pour mesurer si les résultats obtenus sont conformes aux attentes ; et à plus long terme (10-20 ans). Cette dernière phase repose 1 4 sur notre ambition profonde de transformer la France. Par exemple, faire en sorte que les universités françaises soient considérées parmi les premières au monde, qu’elles travaillent avec les grands organismes de recherche, comme le CNES, et avec les entreprises afin que ce travail commun débouche sur une activité extraordinairement rentable et créatrice d’emplois. Nous avons demandé à l’OCDE 1 de faire une évaluation de la France en matière de recherche et d’innovation en 2010, puis en 2020. Nous verrons à ce momentlà si la France a changé. COMMENT EXPLIQUER LE DÉLAI ENTRE INVESTISSEMENT ET CRÉATION EFFECTIVE D’EMPLOIS ? L. S. : Il y a des domaines où l’investissement crée immédiatement de l’emploi mesurable. Si vous investissez dans une usine, vous savez si elle tourne à pleine capacité en fonction du nombre d’emplois. Si vous regardez des domaines nouveaux, plus risqués, les choses sont moins immédiatement mesurables. Par exemple, nous ne pouvons limiter l’activité du CNES depuis 20 ans à ses emplois directs ou à ceux générés dans les entreprises avec lesquelles il collabore comme Airbus DS, Thales Alenia Space ou Arianespace. Son impact va bien au-delà. Il y a en aval tous ceux qui utilisent les inventions, les technologies et les ressources apportées par les satellites. Il est donc très difficile de quantifier les créations d’emplois de façon mécanique. Une chose est sûre : si nous |