Nouveau regne Elle a tout vu, tout vécu. Lee Aaron n’a pas seulement traversé les âges, elle n’a cessé de se réinventer. Reine autoproclamée du metal, elle fut bien plus qu’une copie de Pat Benatar, comme l’attestent des albums comme Call Of The Wild ou Bodyrock. La jolie Canadienne a régné sur les années 80 avant que la vague grunge emporte tout sur son passage. Après un break nécessaire pour élever ses enfants et une parenthèse jazz, elle redevient une chanteuse de rock à part entière et sort son premier album live : Power, Soul, Rock N’Roll. [Entretien avec Lee Aaron (chant) par Philippe Saintes - Photo : DR] As-tu choisi les morceaux en pensant à une rétrospective de ta carrière de rockeuse ? Absolument. Je voulais faire une sorte de greatest hits en mélangeant les chansons incontournables comme « Metal Queen » ou « Powerline » avec des titres plus récents et même inédits (NDLR : la tournée précédait la sortie de l’album Diamond Baby Blues) pour montrer que nous n’étions pas un groupe aux allures nostalgiques. Il existe un DVD live filmé en Suède (2012) et un autre plus ancien capté à Londres (2005), mais il s’agit de mon tout premier album en public. Une société de production allemande (Little-Guitar-Slinger) nous a proposé de réaliser la captation gratuitement à l’occasion du Bang Your Head Festival 2017. Nous nous sommes juste chargés du mixage. Power, Soul, Rock N’Rolla été filmé en haute définition car aujourd’hui tu peux trouver les performances de tous les artistes sur Internet… en très mauvaise qualité. Jack White et son groupe The Raconteurs ont exigé qu’aucun smartphone ne soit sorti pendant leur prestation. Un dispositif a même été installé à l’entrée pour mettre sous scellé tous les téléphones. Je trouve que c’est une excellente idée pour empêcher les gens de filmer, parce que ça casse la communication entre les musiciens et le public. Certains ne suivent plus le concert en direct mais à travers leur application. Un mot sur les musiciens qui t’accompagnent en tournée depuis plusieurs années ? Nous formons un véritable collectif, aussi bien en studio que sur scène. C’est mon objectif de garder le même line-up pour la cohésion musicale. John Cody est mon batteur depuis près de 20 ans, c’est aussi mon mari et le père des mes enfants. Dave Reimer (basse) est avec nous depuis 15 ans et le petit dernier, Sean Kelly (Helix, Four By Fate) a rejoint le groupe il y a 6 ans. Nous recherchions à l’époque un soliste avec l’esprit d’équipe. Ça fait partie de l’ADN de Sean, qui est non seulement un brillant guitariste mais aussi un excellent compositeur. LEE AARON Power, Soul, Rock N’Roll Hard rock Metalville 16 METAL OBS’Lee Aaron, toujours aussi splendide à 57 ans, publie un premier album live et nous procure beaucoup de plaisir. Au-delà des hymnes emblématiques comme « Metal Queen » et « Powerline », la chanteuse canadienne nous fait découvrir des morceaux des deux derniers albums qui sont tout aussi intéressants, à commencer par le tonique « Tom Boy » (sur les femmes s’inquiétant de leur âge et de leur aspect) et le bluesy « Diamond Baby », déjà remarquable en studio. Si on apprécie la ballade poignante « Barely Holdin’On », le sommet du show reste la version époustouflante de « Mistreated » (Deep Purple) plus la reprise de Koko Taylor « I’m A Woman » (pastiche du « I’m A Man » de Muddy Waters) où Lee sort les griffes. Derrière cette voix énergique, les musiciens font feu de tout bois, si bien que les concerts donnés à Balingen et Nuremberg explosent en une énergie brute. La reine du rock n’roll est de retour ! [Philippe Saintes] Bagarre inside Peu importe la manière dont on découvre le talent de Beth Hart, elle saura toujours rester elle-même. Car si aujourd’hui nous parlons d’un album bluesy, elle a par le passé croisé le chemin de Slash, Jeff Beck et Joe Bonamassa. [Entretien avec Beth Hart (chant) par Julien Meurot - Photo : DR] Depuis 10 ans, tu enchaînes les sorties de qualités. Tu ne t’arrêtes donc jamais ? Jamais (rires). Chanter est pour moi essentiel. Que ce soit en studio ou en jardinant, je chante. Parfois il en ressort de bonnes choses, parfois c’est affreusement mauvais, mais la musique est au centre de ma vie. Tu as donc eu beaucoup d’idées pour ce nouvel album ? Enormément. J’en ai même suffisamment pour faire un deuxième album. Le début de War Inside My Head est très blues, mais sa seconde partie est plus débridé et donne une impression de chaos… Tu peux l’appréhender de la sorte, il n’y a pas de mode d’emploi (rires). A chacun son voyage. Le titre « Rub Me For Luck » fait très générique de James Bond. On m’a déjà fait cette remarque lors d’une écoute avec des professionnels et, au final, je suis assez d’accord avec cette comparaison. Je prends ça comme un compliment. Toi qui a déjà placé des titres sur des B.O. (cf. Californication), aurais-tu envie de retenter d’expérience ? Bien sûr ! C’est vraiment génial de pouvoir entendre sa musique dans une série TV. Et pour peu que la série marche, c’est assez lucratif. L’année prochaine, tu reviens en France pour 2 concerts à l’Olympia dans 2 configurations différentes. Qui a eu l’idée d’importer ce concept ? C’est mon manager (NDLR : et compagnon). Au départ, il voulait que je fasse une tournée solo, puis une avec le groupe… Ça s’est avéré compliqué. Alors il a opté pour ce format. C’est vraiment bien, car les fans auront le choix. Les setlists seront bien entendu très différentes car si certains titres passent bien en solo, pour d’autres je vais avoir besoin de mes musiciens (rires). La France est l’un des pays où tu as le plus joué. As-tu un lien particulier avec nous ? La France m’a toujours accueillie à bras ouverts, donc c’est avec beaucoup de plaisir et d’amour que je reviens chez vous. BETH HART War In My Mind Chansons Provogue/Mascot/Wagram Beth Hart, 47 ans, n’est pas de ces femmes qu’on peut essentialiser. Le canon de beauté du DVD Live At Paradiso (2005), la reine (tardive) du blues rock du CD Bang Bang Boom Boom (2012), revêt cette fois son plus beau costume d’auteur-compositeur-interprète post-dépressive qui a vu Dieu... Une tempête sous un crâne (cf. la pochette) qui l’amène à se livrer - plus que jamais à cœur ouvert - sur le terrain de la pop seventies centrée sur le piano, à la Carole King (« Try A Little Harder ») , et celle, honteuse et synthétique, de la décennie suivante (« Sugar Shack »). Signe d’une extrême diversité, « Rub Me For Luck », par son emphase, évoque aussi bien le générique d’un James Bond façon Adele que le metal symphonique féminin… sans guitare, mais produit par un poids lourd : Rob Cavallo (président de Warner Bros. Records et accessoirement coproducteur de Green Day). La bonne impression générale est tempérée par nombre de ballades douces-amères (« Without Words In The Way ») , tire-larmes (« Thankful ») , intimistes (« I Need A Hero ») … toutes révélatrices d’une étrange et inquiétante bipolarité. [Jean-Christophe Baugé] |