Chroniques n°85 avr à jui 2019
Chroniques n°85 avr à jui 2019
  • Prix facial : gratuit

  • Parution : n°85 de avr à jui 2019

  • Périodicité : trimestriel

  • Editeur : Bibliothèque nationale de France

  • Format : (210 x 270) mm

  • Nombre de pages : 32

  • Taille du fichier PDF : 22,9 Mo

  • Dans ce numéro : le monde en sphères.

  • Prix de vente (PDF) : gratuit

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28 COLLECTIONS JACQUES PRÉVERT I PASCAL QUIGNARD LE CINÉMA DE JACQUES PÉVERT PASCAL QUIGNAD Trois manuscrits récemment acquis par la BnF éclairent la genèse des scénarios de Prévert, parmi lesquels celui de Quai des brumes. Et la naissance d’une réplique mythique. La BnF a acquis en 2018 trois documents exceptionnels qui enrichissent ses collections sur le cinéma de Jacques Prévert. Ont ainsi rejoint le département des Arts du spectacle huit planches autographes préparatoires du scénario d’Une partie de campagne, moyen métrage de Jean Renoir que Prévert a complété en 1936 et deux planches pour Le soleil a toujours raison, film de Pierre Billon de 1943. On découvre sur ces simples feuillets de travail la créativité foisonnante et colorée de Prévert qui met en mots et en dessins les personnages qu’il imagine, leurs rapports et les séquences qui les réunissent. Outre ces planches, la BnF a acquis la première mouture manuscrite du célèbre film Quai des brumes réalisé par Marcel Carné et sorti en salles en 1938 avec Jean Gabin et Michèle Morgan. Il présente des différences importantes avec le découpage, dont la BnF conserve aussi le manuscrit de la main de Marcel Carné. La scène contenant la fameuse phrase de Gabin « T’as de beaux yeux, tu sais » a une variante moins romantique et plus portuaire. Jean et Nelly sont au bord d’un quai. « Jean  : […] des coquilles d’œufs… des tessons de bouteilles… des bouchons… un vieux peigne… il est bath le fond des mers !/Nelly, souriant  : c’est pas le fond de la mer… le fond de la mer c’est loin c’est profond !/Jean  : Tais-toi, tu causes comme un scaphandrier, brusquement, tu as de beaux yeux !/Nelly  : au bord de la mer on a toujours de beaux yeux ! » Joël Huthwohl Département des Arts du spectacle À gauche Jacques Prévert, planches scénaristiques d’Une partie de campagne, 1936 BnF, Arts du spectacle Ci-contre Jacques Prévert sur son balcon à Paris en mars 1964 CHRONIQUES DE LA BnF Nº85 FAIT DON DE SES ACHIVES À LA BNF L’auteur, qui reçut en 2002 le prix Goncourt pour Les Ombres errantes, a choisi de donner l’ensemble de ses archives à la Bibliothèque nationale de France. Les archives données par l’écrivain rassemblent certains de ses manuscrits, un ensemble complet des éditions de ses œuvres, certaines particulièrement rares, mais aussi plus de mille lettres reçues d’auteurs prestigieux comme de lecteurs anonymes. Le fonds Pascal Quignard constituera de ce fait un élément incontournable pour l’étude d’une œuvre abondante et qui ne cesse de s’étendre. Une exposition rendant hommage à l’auteur sera organisée autour de ce don par la BnF au printemps de l’année 2020.
COLLECTIONS RELIURES DE LUCIENNE THALHEIMER DES GENOUI LES ET DES LIVES La Réserve des livres rares conserve plusieurs reliures de Lucienne Thalheimer (1904-1988), souvent décrite comme « la relieuse des surréalistes ». En rupture avec la tradition, elle utilisait volontiers des matériaux inusités, parmi lesquels la peau de grenouille. « Pourquoi des reliures surréalistes ? », demandait Lucienne Thalheimer en 1979, en titre d’un article alors publié dans le Bulletin du bibliophile. Née en 1904, elle fut attirée dès l’adolescence par la vision poétique du monde développée par les surréalistes. De son propre aveu, sa rencontre avec André Breton infléchit d’une manière décisive sa création de relieuse. Sous l’influence du surréalisme, elle s’affranchit de la tradition décorative qui dominait l’histoire de la reliure d’art, en même temps qu’elle renonce à la hiérarchie usuelle des cuirs utilisés  : loin de ces règles, la reliure est cultivée par elle, dans les œuvres qu’elle crée pour Breton et ses amis – Benjamin Péret, Pierre Mabille et d’autres –, comme une forme de « poème-objet ». Car la reliure, écrit-elle, « doit se laisser lire, non comme une explication du texte, mais comme son chant ». Un éclectisme résolu dans le choix des matériaux aussi bien qu’une poétique du hasard et de la surprise l’amènent ainsi à recourir volontiers à des peaux inattendues, voire incongrues au regard des conventions en vigueur ou des habitudes prises  : peaux de poissons tels que la morue (à l’instar de la reliure réalisée sur le manuscrit d’Arcane 17 de Breton, conservé aujourd’hui à la Bibliothèque littéraire Jacques Doucet), ou peaux de batraciens. La Réserve des livres rares a acquis en 1986 un témoin de ses créations dans ce dernier matériau en l’espèce d’un exemplaire de l’édition de Description d’un combat de Kafka illustrée de lithographies d’Atlan, publiée par la galerie Maeght en 1946. Ci-dessous Reliure deL. Thalheimer sur Lautréamont, Les Chants de Maldoror, 1925 BnF, Réserve des livres rares 29 Il s’agit de l’exemplaire personnel de Lucienne Thalheimer  : amie d’Atlan, elle relia le livre vers 1950 en creusant le plat supérieur en chagrin gris pour y incruster une peau de grenouille argentée d’Amérique centrale. Le 14 février 2018, la Réserve des livres rares a complété sa collection par l’acquisition en vente publique d’un exemplaire des Chants de Maldoror de Lautréamont publiés en 1925 par les éditions surréalistes Au Sans Pareil. Répartie sur les deux plats du volume, une peau verte de crapaud surgit sur un fond ocre, comme une image plastique dont l’étrangeté prolonge le choc des images poétiques cher à Lautréamont. Antérieure à 1940, l’œuvre répondait à l’origine à une commande de Georges Bataille. Mais très attachée à cette création, Lucienne Thalheimer obtint de la conserver pour elle-même, comme elle le rapporte dans son article de 1979  : « Quant aux Chants de Maldoror de Lautréamont, Georges Bataille, travaillant à la Bibliothèque nationale, me demanda avant-guerre de les lui relier. J’utilisais une peau de crapaud granuleuse par endroits que je fixais au milieu du plat recto en veau vert afin de faire surgir l’impression d’intensité bouleversante qui résulte, à la lecture, des images et du style. Je fis subir certaines transformations au veau vert à plusieurs endroits. Grâce à un acide, je parvins à une coloration brune d’un marron impressionnant. Georges Bataille qui voulait l’acheter pour la Nationale comprit mon désir de garder le volume qui fait encore aujourd’hui partie de ma bibliothèque. » Lucienne Thalheimer est décédée en 1988. Trente ans plus tard – et quelque quatre-vingts ans après la commande de cette reliure –, le volume a finalement trouvé le chemin que Bataille lui destinait à l’origine  : celui de la Bibliothèque nationale de France. Jean-Marc Chatelain Réserve des livres rares



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