lundi 13 novembre ARTE MAG N°46. LE PROGRAMME DU 11 AU 17 NOVEMBRE 2017 16 0.10 La lucarne Spécial 20 ans Mrs. Fang L’agonie d’une ouvrière agricole entourée de ses proches, dans un village de Chine. Un film coup de poing de Wang Bing (À l’ouest des rails) couronné d’un Léopard d’or au Festival de Locarno. WANG BING Veuve depuis plusieurs années, Fang Xiuying, 68 ans, est née à Huzhou, dans la région du Fujian. Les dernières années de cette ancienne ouvrière agricole ont été marquées par la maladie d’Alzheimer. Après avoir été hospitalisée en 2015, elle a été renvoyée chez elle pour y mourir. Dans la pièce aux tristes murs où elle est alitée, famille et voisins défilent à son chevet. Certains lui prennent la main. Une de ses filles la masse délicatement ou la nourrit avec une seringue. On prononce son nom, on s’inquiète aussi : « Fang Xiuying, tu me reconnais ? » Ses petits-enfants et quelques proches ont fait la route depuis la ville pour lui dire adieu. Mais la mort est longue à venir... DERNIERS MOMENTS Après Argent amer, À la folie ou encore Seules dans les montagnes du Yunnan, Wang Bing continue d’ausculter les grandes mutations de la société chinoise, au plus près de ses membres les plus vulnérables. Le cinéaste chinois, qui filme toujours en totale immersion avec ses personnages, a passé plusieurs semaines au chevet de cette femme condamnée par la maladie, captant ses derniers moments et la manière dont ce microcosme paysan constitué de proches et de voisins accompagne son interminable agonie. Contemplant longuement le visage de Mme Fang, comme pour y saisir le mystère de la mort qui va la soustraire aux siens, il filme aussi autour d’elle le bouillonnement d’une vie intense qui garde ses droits : les conversations sur le choix du lieu de l’inhumation, les commentaires anxieux suscités par l’absence du seul petit-fils de la mourante, l’évocation décousue de ce qu’a été son existence. Lorsqu’il s’éloigne du lit où elle s’éteint peu à peu, Wang Bing regarde dans la cour la partie de cartes qui occupe les plus âgés, ou suit trois jeunes gens partis pêcher à la rivière. Au loin, les jappements d’un chien. Des sons familiers surgissent d’une pièce voisine, la petite musique d’un jingle à la télé ou celle d’un courriel que l’on envoie. C’est le monde de Mme Fang, celui auquel elle a toujours appartenu, et dont elle a déjà pris congé. Léopard d’or, Locarno 2017 Lire page 8 Documentaire de Wang Bing (France/Chine, 2017, 1h27mn) - Production : Idéale Audience, Wil Productions, Documenta 14, en association avec ARTE France-La lucarne En partenariat avec Ihrockuptbles 1.40 La lucarne Spécial 20 ans Vénus : confessions à nu METTE CARLA ALBRECTHSEN AND LEA GLOB Dans un studio improvisé, face à la caméra, des jeunes femmes parlent sans détour du sexe, du désir, de la frustration. Un film choral d’une intimité absolue et troublante. Au Danemark, deux réalisatrices trentenaires lancent un appel à casting féminin pour un film érotique basé sur des expériences réelles. Une centaine de candidates, de leur âge ou plus jeunes, répondent spontanément à l’annonce. Dans un studio improvisé, les auditions commencent sous forme de dialogues entre les filmeuses et celles qui leur font face, une à une. Mais le dispositif du casting prend la tournure imprévisible d’une agora, les jeunes femmes interrogées s’emparant des questions posées pour s’exprimer sans détour ni fausse honte sur leur expérience et leur perception de la sexualité. Le flot choral de leurs récits et « confessions », mais aussi ce que racontent leurs visages, leurs gestes, et parfois le corps qu’elles dénudent devant la caméra, dessinent peu à peu un état des lieux collectif : la vie sexuelle d’une nouvelle génération de femmes, décidée à vivre et assumer son désir et sa liberté, mais consciente des obstacles qui les entravent parfois. Dans cet effeuillage jamais voyeur, ni égrillard ni exhibitionniste, où la sincérité de la parole est essentielle, le regard direct du documentaire donne lieu à un film subtilement érotique, tissé de crudité et de pudeur, de mystère et d’humour, de séduction et d’audace, qui tend à chacun, femme ou homme, jeune ou vieux, un troublant miroir. Lire page 8 Documentaire de Mette Carla Albrechtsen et Lea Glob (Danemark, 2016, 1h23mn) - Production : House of Real, Faction Film, en association avec ARTE France-La lucarne En partenariat avec Ihrockuptibles |