ARTE MAG N°32. LE PROGRAMME DU 5 AU 11 AOÛT 2017 6 Dimanche 6 août à 20.55 Film Shaun of the Dead Lire page 10 Plan fixe sur un écran de télévision. À l’image, les programmes se succèdent. Un journaliste : « Certains religieux parlent du Jugement dernier, c’est la… » La chaîne change pour un clip des Smiths : « … panique dans les rues de Londres… » Nouveau basculement : « … les témoignages se multiplient concernant… » Puis, un match de football : « … des attaques sérieuses sur… » Un journaliste réapparaît à l’écran : « … des gens littéralement… » Maintenant, un lion attaque une gazelle : « … dévorés vivants ». La preuve du talent d’Edgar Wright : le pitch de Shaun of the Dead (une invasion de zombies noyée sous le second degré) est expliqué de manière drôle et inventive, au nez et à la barbe du personnage principal qui, encore endormi, zappe machinalement. Avec ce premier long métrage, en 2004, le jeune réalisateur dynamite le film de genre aux côtés de ses deux acteurs fétiches, Simon Pegg et Nick Frost, dont il est inséparable depuis Les allumés, la série à succès qu’ils ont développée en 1999 pour Channel 4. Le réalisateur britannique Edgar Wright incarne-t-il la relève du très sacré humour british, arrosé à la sauce ketchup ? Sans aucun doute, et probablement plus encore. Du thé avec un nuage de sang TRILOGIE DU CORNETTO Truffé de clins d’œil à la culture geek, le cinéma d’Edgar Wright ressemble à la progéniture pop et intelligente d’un ménage à trois entre les Monty Python (l’absurde, la caricature des mœurs anglaises), George A. Romero et ses confrères réalisateurs de films d’horreur (son amour des tripes qui volent dans tous les sens), et les grands humoristes du muet pour son sens du comique visuel. Trois films ont catapulté Wright, Pegg et Frost en haut de l’affiche. Adulée par le public, la « Trilogie du Cornetto » (Shaun of the Dead, Hot Fuzz et Le dernier pub avant la fin du monde, dont le seul point commun est l’apparition d’une glace Cornetto de parfum différent dans chaque film) honore, parodie et réinvente trois genres très codifiés : l’horreur, le policier et la science-fiction. Edgar Wright y porte un regard sévère sur la notion de « masse », que partage son premier public geek, souvent ostracisé. Des zombies humiliés pour le plaisir des téléspectateurs aux villageois assassinant quiconque pourrait ternir la réputation de leur bourgade, le collectif est invariablement source de violence. C’est en cela, et dans sa mise en scène jamais gratuite, qu’Edgar Wright dépasse le simple cadre de l’humour anglais pour rejoindre les cinéastes à la patte immédiatement reconnaissable. Après avoir bouclé sa trilogie en 2013, le réalisateur de 43 ans fait son retour au cinéma le 19 juillet avec Baby Driver, où il revisite cette fois le film de voitures. Une escapade américaine – après une tentative avortée chez Marvel – qui marque l’envol du réalisateur d’Albion vers Hollywood. François Pieretti UNIVERSAL PICTURES |