MohamedRACHAD ELKOUSSY/GAMMA 22.05 Le documentaire culturel Oum Kalthoum, la voix du Caire Une évocation vibrante de l’extraordinaire diva qui, plus de quarante ans après sa mort, incarne toujours l’âme du monde arabe. Quand elle disparaît, le 3 février 1975, des millions d’Égyptiens suivent son cortège funèbre, comme ils l’avaient fait quinze mois plus tôt après la mort du président Nasser. Le retentissement, là encore, est planétaire. Aucune chanteuse n’a été adulée à l’égale d’Oum Kalthoum, aucune voix, si belle soit-elle, n’a incarné comme elle l’âme de tout un peuple, au point d’être sacralisée de son vivant, non seulement en Égypte, mais dans tout le monde arabe. « Au-dessus d’elle, il n’y a que le Coran », résumait le journaliste Mustapha Amin, l’un de ses amis. Née dans les premières années du XX e siècle dans le delta du Nil, fille d’un modeste imam de campagne qui la fait chanter en public dès l’âge de 7 ans, Oum Kalthoum n’est encore qu’une gamine sans éducation, cachée sous des vêtements de garçon qui suscitent la moquerie, quand elle débarque au Caire, où l’amène la renommée grandissante de sa voix hors norme. Vingt ans plus tard, ses concerts retransmis en direct à la radio, dans lesquels elle exalte comme nulle autre l’amour, Dieu et la patrie, figent tout le pays. Après 1952, l’accession de Nasser au pouvoir fait définitivement d’elle non pas la première, mais « la Dame », comme on l’appelle, de la nation, elle qui, en pionnière, a mis la poésie de la langue arabe à portée de tous, à travers des mélodies d’une haute sophistication. « TARAB » Il suffit de contempler dans ce film les visages de ses auditeurs, magnifiés par la joie ou le recueillement, pour approcher une part de la magie exercée par Oum Kalthoum  : le tarab, émotion poétique et musicale que de lumineux exégètes tentent d’expliciter face à la caméra, de certains des musiciens qui l’ont accompagnée sur scène au trompettiste de jazz Ibrahim Maalouf. Entrelaçant photos et films d’archives, commentaires et témoignages, dont l’une des très rares interviews radiophoniques données par la chanteuse, Xavier Villetard retrace le chemin extraordinaire qu’elle a accompli seule, dans une société dominée par les hommes, et fait résonner puissamment sa voix reconnaissable entre toutes. Lire page 4 Documentaire de Xavier Villetard (France, 2017, 52mn) Coproduction  : ARTE France, Illégitime Défense, avec la participation d’Al Arabiya News Channel, SVT, RTVS, ICI/RDI et Vitagraph 23.00 Cinéma Une seconde femme Choisie comme seconde épouse, une jeune Turque s’installe en Autriche avec sa bellefamille. Un émouvant portrait de l’immigration, tout en tensions et nuances. Dans un village de Turquie, Ayse est mariée à un compatriote émigré en Autriche. Arrivée à Vienne avec sa belle-famille, elle découvre qu’on l’a destinée en réalité au père de son mari  : atteinte d’un cancer, Fatma l’a choisie comme seconde épouse pour Mustafa. Malgré l’hostilité d’une partie de la famille, les deux femmes s’apprivoisent mutuellement, l’aînée transmettant à la plus jeune son savoir domestique. Mais lorsque Mustafa décède, Ayse se prend à rêver d’émancipation... COMPLEXITÉ Dans une mise en scène à la fois souple et tranchante, Umut Dag brosse avec une remarquable finesse le portrait d’une communauté d’immigrés turcs écrasés par le poids des traditions, montrant que ce sont aussi les femmes qui perpétuent le carcan. Brillamment interprétée par Begüm Akkaya, dont la puissance du regard compense l’économie de mots, la jeune Ayse donne chair à une génération à la croisée des chemins, l’enfermement du début cédant peu à peu la place à une soif de liberté porteuse de conflits et de violences. (Kuma) Film d’Umut Dag (Autriche, 2012, 1h29mn, VOSTF) - Scénario  : Umut Dag, Petra Ladinigg - Avec  : Nihal Koldas (Fatma), Begüm Akkaya (Ayse), Vedat Erincin (Mustafa) - Production  : ORF, Wega Film ARD/Degeto mercredi 21 juin ARTE MAG N°25. LE PROGRAMME DU 17 AU 23 JUIN 2017 21