BELA ET MARTHA KAROLY'EN COUVERTURE LES PETITES GYMNASTES DE CEAUȘESCU En 1976, à 14 ans, Nadia Comaneci ˘ entrait dans la légende aux JO de Montréal. Quarante ans après, dans un documentaire de Pola Rapaport retraçant l’histoire de cette athlète d’exception, Gabriela Geiculescu, une ex-coéquipière, évoque le revers de la médaille. Entretien. Comment avez-vous intégré l’équipe Nadia Comaneci ˘ suscitait-elle la jalousie des nationale de gymnastique roumaine ? autres gymnastes ? Gabriela Geiculescu : En 1978, à 13 ans, j’ai Au sein de l’équipe, elle était simplement l’une remporté un championnat national et la Fédération des nôtres, une camarade avec qui rire et pleurer. C’était une jeune fille modeste, que son statut roumaine de gymnastique a demandé à mon club de Bucarest de m’envoyer à Deva, rejoindre l’équipe d’idole encombrait. Le fait de souffrir et d’apprendre olympique entraînée par Béla et Márta Károlyi. ensemble, de s’encourager, faisait de nous une J’étais terrifiée à cause de ce qu’on racontait des famille très solidaire, dans laquelle chacune était conditions là-bas, mais je n’ai pas eu le choix. C’est partie prenante de l’évolution des autres. là que j’ai vu Nadia pour la première fois. Avec son incroyable victoire aux JO, deux ans plus tôt, le Étiez-vous heureuse, malgré tout, d’appartenir régime de Ceauşescu s’était mis à investir beaucoup à une élite admirée dans le monde entier ? dans la gymnastique et exigeait en retour des résultats immédiats et constants. Notre équipe devait et la gymnastique régissait chaque minute de ma vie. Comme Nadia, j’avais commencé dès l’âge de 6 ans, rester la meilleure du monde. L’entraînement était Avant son « 10 parfait », les championnes étaient des donc d’une exigence et d’une intensité extrêmes, jeunes femmes. Elle a prouvé qu’une enfant pouvait environ quarante heures par semaine. J’avais l’impression que mon corps était essoré jusqu’à l’os. ration de petites filles qui était en train de changer montrer la voie. J’étais fière d’appartenir à cette géné- On n’avait jamais de jour de repos, et les temps de la gymnastique. La considération énorme dont nous récupération étaient beaucoup trop brefs. Certains jouissions dans tout le pays nous portait aussi. Mais jours, j’avais envie de mourir pour que ça s’arrête. à vrai dire, le plus précieux pour moi, c’étaient nos 4 N°34 – Semaine du 20 au 26 août 2016 – ARTE Magazine |