Série noire d’auteur En immersion mêle des personnages naufragés dans un Paris nocturne, filmé dans un noir et blanc stylisé. Une minisérie noire qui détonne par son esthétique et révèle des comédiens hors pair… Philippe Haïm l’a écrite, réalisée et mise en musique. Fiction En immersion semble être un projet très personnel. Comment est-il né ? 4 Philippe Haïm : Au départ, je voulais raconter le travail d’infiltration policier dans l’univers des drogues 2.0. Mais c’est devenu l’histoire d’êtres qui sombrent : Michel dans sa maladie, sa fille Clara dans la drogue, un dealer par sa vénalité, un sans-papiers perdu… Des êtres en détresse, dont les vies se noient dans un naufrage commun. L’histoire d’un père et d’une fille qui n’arrivent pas à se sauver ensemble et dont le lien est si fort qu’il structure l’ensemble du récit. C’est une série noire et intime. Pourquoi ce parti pris fort de stylisation ? Si l’histoire reste actuelle, j’ai voulu la déréaliser. Le noir et blanc nous plonge dans un conte urbain, à l’ambiance mystérieuse. Je voulais être expressionniste sans tomber dans l’esthétisme gratuit. La maladie de Michel provoque des visions oniriques de noyades et d’apnée de son naufrage qui créent une identité visuelle décalée. Comment avez-vous composé la musique ? Au cinéma, tout est musical : le rythme des acteurs, des séquences, des mouvements de caméra. Il faut composer la bonne harmonie. Dans cette série, plusieurs scènes durent trois minutes sans un mot, avec seulement de la musique. C’est un facteur clef de ma 6 N°1 – semaine du 2 au 8 janvier 2016 – ARTE Magazine Jeudi 7 janvier à 20.55 En immersion Lire pages 22-23 mise en scène. J’ai donc voulu la composer pour maîtriser ce choix. D’où le pari d’écrire soixante-quinze minutes de musique pour grand orchestre, en espérant qu’elle soulève le film, par-delà ses images. Votre casting révèle de nombreux comédiens inconnus… Nous n’écrivons que des personnages. Les acteurs, sous notre direction, les transforment en êtres humains. Il y a en France un vivier de talents extraordinaires qu’un metteur en scène se doit de découvrir. Cette série suit cinq personnages, elle est une chorale. Je devais donc trouver chacun des « humains » pour créer leur famille. Je remercie ARTE et ma productrice Bénédicte Lesage pour ma totale liberté de casting, c’est suffisamment rare pour être dit. En immersion nous plonge dans une vision très noire de notre société… En 2008, avec Secret défense, j’avais traité de la radicalisation islamiste dans les prisons françaises. Là, j’explore les ravages des drogues synthétiques, nouveau marché juteux pour des dealers prêts à tout. C’est un cercle complexe qui détruit beaucoup de jeunes. Et ces jeunesses perdues me touchent. J’essaie de les raconter, sans me prendre pour un sociologue. Propos recueillis par Jonathan Lennuyeux-Comnène |