en couverture Ethan et Joel Coen Un smoking pour deux Le 68 e Festival de Cannes a un président du jury bicéphale. Deux têtes bien faites, celles des frères Joel et Ethan Coen. Le nonchalant duo s’accordera-t-il aussi bien sur le palmarès que dans la réalisation de ses (bientôt) dix-sept films ? 4 N°21 – semaine du 16 au 22 mai 2015 – ARTE Magazine Spécial frères Coen Dimanche 17 mai Personne ne bouge ! à 17.00 Fargo à 20.45 Barton Fink à 22.20 Lire pages 13-15 Xavier LAMBOURS/SIGNATURES Nombreux sont les cinéastes dont la carrière est étroitement liée au Festival de Cannes et aux prix qu’ils y ont récoltés : Emir Kusturica, Lars von Trier, Michael Haneke, les frères Dardenne et, plus récemment, Xavier Dolan... Quentin Tarantino, lui, affirme tout bonnement y être «né». Pas les frères Coen, qui avaient déjà réalisé trois longs métrages, dont l’hilarant Arizona junior et le très stylé Miller’s crossing, avant de monter les marches du Palais des festivals. Mais depuis 1991, année de la présentation de Barton Fink, la sortie de leurs films a quasiment toujours été précédée d’une escale sur la Croisette, où ils ont souvent trouvé l’accueil le plus favorable : Prix de la mise en scène pour Fargo et The barber, Grand Prix pour Inside Llewyn Davis, sans parler du triplé effectué par le susdit Barton Fink : Palme d’or, Prix de la mise en scène et Prix d’interprétation masculine ! C’est d’ailleurs ce coup d’éclat inattendu qui poussa Gilles Jacob à établir une consigne de cumullimité des prix pour les éditions suivantes, certains ayant jugé l’attitude du président Polanski un peu dictatoriale. Créateurs de losers Fidèles à leur nature nonchalante, les principaux intéressés, eux, ne semblent pas s’en être émus outre mesure. Ils l’ont avoué par la suite avec un détachement amusé : ils soupçonnaient bien que ce portrait drolatique d’un scénariste impuissant, qui perd pied pour plonger dans un univers cauchemardesque, plairait au réalisateur du Locataire (diffusé par ARTE le 11 mai). Inventeurs de quelques-uns des losers les plus mémorables de l’histoire du cinéma, les deux frères reçoivent les récompenses un peu comme la policière enceinte de Fargo découvre les meurtres troublant sa juridiction : avec un flegme inébranlable. Par leurs réponses goguenardes et décousues, ils désamorcent le jeu des interviews, ayant le chic de ne jamais livrer les profondes réflexions qu’on espère d’eux... On est donc curieux de voir comment leur sympathique je-m’en-foutisme va se glisser dans le costume solennel de la présidence cannoise. Pour l’heure, les frères Dardenne, dont la prochaine comédie Hail, Caesar ! (Ave César !) , située dans les coulisses du Hollywood des années 1950, est annoncée pour 2016, se sont contentés d’exprimer sobrement leur reconnaissance, alléguant qu’ils n’avaient jamais été «présidents de quoi que ce soit» jusqu’ici. Jonathan Lennuyeux-Comnène |