artdeville - Édition chicxulub Texte Prisca Borrel (avec Fabrice Massé) Photos DR Dossier Covid-19 L'ÉPIDÉMIE QUI SECOUE LA PLANÈTE, LA PÉNURIE DES MOYENS SANITAIRES, LES RAYONS VIDES… CE SCÉNARIO CATASTROPHE, DES SURVIVALISTES ET COLLAPSOLOGUES L’ONT IMAGINÉ IL Y A BIEN LONGTEMPS. EN OCCITANIE, CERTAINS S’Y PRÉPARENT À PLUS OU MOINS LONG TERME OU THÉORISENT SUR LES MANIÈRES DE SURVIVRE AU CHAOS DE CE MONDE QU’ILS REJETTENT. LES TEMPS SEMBLENT LEUR DONNER RAISON. Cette nuit, j'ai pleuré », confie Sylvie, 58 ans, consultante en informatique. Lorsqu'elle a commencé à entendre parler de coronavirus et de pandémie, elle l'avoue, sa réaction a été double. « Je me suis dit : merde, on y est ! Et en même temps : merde, je ne suis pas prête ! » Si les réseaux de collapsologie qu'elle fréquente ont imaginé le pire, ils ne s'attendaient pas à une claque aussi brutale. Ni même virale, à vrai dire. Néologisme créé par le médiatique Pablo Servigne, la collapsologie désigne une approche pluridisciplinaire qui s'intéresse à l'effondrement de la civilisation. En bref : « Ça sent le gaz, mais on ne sait pas d'où viendra l'étincelle », lançait l'ingénieur agronome en 2018. Une sentence qui, pour le Montpelliérain Franck Bernard, président de l'association Le Nouveau monde, prend aujourd'hui un sens nouveau. « Le coronavirus, ça peut être ça l'étincelle. » Pédagogie de crise Le trentenaire voit pourtant dans la crise « autant d'aspects positifs que négatifs ». « Moi, je me suis dit : enfin quelque chose qui met un genou à terre au capitalisme ! Enfin quelque chose de microscopique, qu'aucune armée ne peut écraser et qui protège le vivant ! Enfin les gens 10 ont ce choc qui les oblige à se remettre en question et à considérer que le libéralisme n'est pas immuable ! Je crois que pour nous, c'est l'opportunité d'être pris au sérieux. Et j'ose espérer que ce n'est qu'une répétition générale », lance-t-il ! Dans ses placards, celui qui se définit comme un « survivaliste mature » ne dispose que de trois semaines de réserve. « Je suis en train de travailler mes réflexes », sourit-il. Depuis plusieurs mois déjà, Sylvie achète une boîte de plus à chaque course, sait-on jamais. Elle dispose de quoi tenir deux semaines sans sortir. Un peu plus prévoyant, Benjamin, graphiste à Béziers, dispose quant à lui, d'un mois de réserves environ. Formé aux techniques de survie dans les bois, il a également préparé un sac contenant le strict nécessaire pour répondre à ses besoins vitaux en cas de départ précipité. Si Benjamin ne s'est pas laissé emporter par l'affolement qu’on a pu constater, il se sent néanmoins conforté dans ses choix. « À l’évidence, j'ai bien fait de suivre mes intuitions, et je pense que les lanceurs d'alertes et ceux qui se préparent seront davantage crédibilisés, voire même imités plutôt que ridiculisés », résume-t-il. « Aucun Rambo ne s'en est sorti tout seul » Un espoir partagé par Manon, professeur des écoles, qui a profité de cet état de confinement pour rejoindre un éco-hameau situé près de Toulouse. « Je me rends compte qu'au début, anticiper l'effondrement n'était une nécessité que pour moi. Mais, maintenant, ça l'est |