Air le Mag n°117 juin 2021
Air le Mag n°117 juin 2021
  • Prix facial : gratuit

  • Parution : n°117 de juin 2021

  • Périodicité : mensuel

  • Editeur : Textuel La Mine

  • Format : (215 x 280) mm

  • Nombre de pages : 52

  • Taille du fichier PDF : 34,6 Mo

  • Dans ce numéro : the deep house, inspirez profondément !

  • Prix de vente (PDF) : gratuit

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FAUT QU’ON EN PARLE C’est l’histoire d’un Montréalais qui, en contemplant les objets éparpillés sur son bureau, a eu un jour une idée  : échanger le petit trombone rouge qui y traînait et voir jusqu’où cela pourrait l’entraîner. Saugrenu ? Pas tant que ça, puisque, quelques jours après avoir déposé son annonce sur un site de petites annonces, Kyle MacDonald a trouvé deux preneuses, amusées par l’initiative. En échange, ces jeunes filles lui proposaient un « stylo moche en forme de poisson ». Ce qu’il accepta et remit immédiatement en troc sur le même site. Quelques jours plus tard, le stylo moche fut échangé contre un bouton de porte non moins hideux, qu’il échangea contre un réchaud à gaz. Le deal fut suivi par un autre contre un générateur électrique, puis une pompe à bière, puis une motoneige, puis une camionnette, puis un contrat avec une maison de disques… et ainsi de suite, jusqu’à obtenir une maison, dans la ville de Kipling, au Canada. Tout cela, en un an, et sans débourser le moindre dollar ! Si cette histoire est suffisamment incroyable pour avoir fait l’objet de nombreux articles de presse, elle n’en demeure pas moins symbolique de ce que peut rapporter le troc, au-delà des économies réalisées  : des rencontres, des échanges, du partage, de l’imprévu et de belles histoires. UN MODE DE VIE QUI SÉDUIT Sans doute est-ce la raison pour laquelle cette pratique est devenue si populaire. La chose frémissait, il est vrai, depuis quelque temps. Portée à la fois par Internet, par la prise de conscience écologique et par la nécessité de consommer moins et mieux, elle avait conquis (comme les autres modes de consommation alternative, tels la seconde main, le vrac ou le zéro déchet) les plus engagés d’entre nous. Mais, depuis la crise sanitaire, elle semble 36 36 FAUT QU’ON « Repartir avec la banane en plus. » Let avoir séduit toutes les catégories de population. Comme si notre besoin de relations humaines avait pris le dessus sur celui de consommer. Il suffit de se connecter à Internet pour le constater. Tapez « troc » ou « échange » dans la barre de recherche de Facebook, et vous tomberez sur des dizaines de groupes consacrés à ce type d’échange. Comme cette page intitulée « Troc/Don/Vente en Île-de-France » qui rassemble 73 000 membres et qui se décline dans quasiment chaque ville, département et région. Signe que le secteur se professionnalise, les plateformes spécialisées se multiplient elles aussi. En France, on compte une trentaine de sites, dont le plus célèbre est Mytroc.fr, qui permet d’échanger des objets culturels, de l’électroménager, du mobilier, des outils, des vêtements, mais aussi des services (soutien scolaire, jardinage, création de site, réparations diverses, etc.). Créé en 2015, le site revendique près de 100 000 échanges déjà menés, soit près de la moitié des annonces, et estime l’économie ainsi réalisée à plus d’un million d’euros. Un engouement tel qu’il commence à se dupliquer « en vrai », à travers des « troc party » et autres « free troc party » où chacun vient avec ses objets à échanger et repart avec ses trouvailles. Et qui n’a jamais vu au détour d’une gare, d’une école ou d’un jardin public, une « boîte à lire » ? Ces petites bibliothèques, installées dans près de 7 000 endroits en France, permettent de déposer et de repartir avec de nouveaux livres, gratuitement. « Une Juin 2021
ti EN PARLE Vin roc manière de continuer à faire vivre un roman et des personnages qui nous ont plu, avec un supplément d’âme », témoigne Adeline, adepte de la pratique. Mais ce que cette trentenaire parisienne préfère, ce sont les rencontres occasionnées lors d’échanges de services, tels que le proposent les sites L’Accorderie ou Allovoisins. Ou comment troquer une heure de cours d’anglais ou de soutien informatique contre une heure de bricolage à domicile. Et repartir avec la banane en plus. Getty Images ; Noun Project Picto LE BUSINESS AUSSI Même les entreprises s’y mettent. Si certains grands groupes, à l’instar de la SNCF, vont jusqu’à créer leur site de troc interne afin de réaliser des économies de matériel de bureau (cartouches d’imprimante, fauteuils pro, stock de stylos…), PME, TPE et start-up sont nombreuses désormais à utiliser Barterlink. Créé il y a cinq ans, ce site d’échange dédié aux entreprises permet de troquer leur savoir-faire (prestations d’avocat, d’expert-comptable…), leur production (légumes, repas…) ou certains de leurs biens (bureaux, outils, véhicules de location…) contre ceux d’une autre boîte. C’est ainsi qu’une société de coworking s’est retrouvée à proposer ses espaces vacants à une entreprise de restauration engagée. En échange de ses livraisons de repas à d’autres membres du site, celle-ci a pu bénéficier gratuitement de ces bureaux. Et si une entreprise n’a rien à échanger dans l’immédiat, pas de problème ! Les échanges se font via un système de monnaie virtuelle, le link, qui permet d’accumuler un pécule à dépenser ensuite ou de fonctionner à crédit. Une manière pour les entreprises d’éviter de devoir avancer les 20% de TVA qui leur sont ensuite reversés, mais aussi de démarrer ou de relancer leur activité plus sereinement. Plutôt bien vu par les temps qui courent. n 37 p Que ce soit par le biais d’une appli, du Web, ou d’un magazine, une fois le deal passé, l’occasion se présente parfois de faire de nouvelles rencontres. IRL ! 37 QUID DE NOS VIEUX VÊTEMENTS ? Si les modes de consommation alternative connaissent un tel succès, c’est aussi parce que les consommateurs sont plus conscients des méthodes de production des grandes enseignes, notamment de celles des grandes chaînes de prêtà-porter, qui captent 40% du marché de l’habillement. Les conditions de travail de leurs sous-traitants ont maintes fois été dénoncées. Tout comme le devenir de ces vêtements, aussi vite fabriqués que démodés  : sur les 56 millions de tonnes vendues chaque année, seul 1% est retransformé en vêtements, d’après les associations. La plupart finissent par retraverser les océans, direction le Kenya, où ils sont, IL S’HABILLE COMME ÇA ! dans le meilleur des cas, revendus sur les marchés. Les rebus sont, quant à eux, abandonnés dans des décharges à ciel ouvert ou brûlés, causant pollution et maladies. Même question en Inde, où une grande partie de nos vieux vêtements est transformée en couvertures bon marché. Dans le documentaire Unravel  : The Final Resting Place of Your Cast-off Clothing, disponible sur YouTube, les trieurs de vêtements imaginent ainsi « un Occident où l’eau est tellement rare et chère que les gens préfèrent jeter leurs vêtements après les avoir portés quelques fois, plutôt que de les laver ». « J’ai l’air d’un bobo, mais c’est du trompel’œil ! Je n’ai absolument pas les moyens de m’acheter des vêtements chicos neufs. Donc, je passe par le troc. La plupart du temps, je donne des cours d’éco à des lycéens. Et, en échange, leur père me donne des fringues dont il ne veut plus. Et je fais pareil pour plein d’autres trucs. » Romain



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