94 Boussoles air du temps Reverdir les pavés À l’automne, Aésop a fait d’un petit bout de trottoir une micro-jungle aux contours changeants et rêveurs. Avec les encouragements de la Mairie de Paris. TEXTE Marie Aucouturier PHOTO Mathieu Martin Delacroix Aésop 5 rue du Vieux- Colombier, à Paris. De la boutique dessinée par Dimore Studio, l’œil glisse sur l’espace végétalisé extérieur, paysagé par Les Mauvaises Graines. Inside the shop designed by Dimore Studio, the eye is drawn to the planting outside, landscaped by Les Mauvaises Graines. V ous souvenez-vous de Tistou les pouces verts, ce garçonnet qui semait des plantes où il le voulait, faisait feurir la grisaille et courir les feuilles sur des murs sans joie ? Eh bien, ouvrez l’œil, des jardiniers d’un genre nouveau ont décidé d’explorer à leur tour les pavés de Paris. Stimulées par les récents « Permis de végétaliser l’espace public » que délivre la Mairie à des projets de particuliers, des initiatives germent deci-delà sur le bitume. Les afcionados de la Rive Gauche ne s’étonneront donc pas de voir la boutique Aésop de la rue du Vieux-Colombier investir son trottoir pour le transformer en un joli buisson de repos. Bouleau, charme et troène du Japon, lierre et liquidambar enveloppent désormais un petit banc, sur lequel il n’est pas rare de voir des voisins papoter, des badauds prendre une pause ou une cliente se détendre en sirotant une tisane. Le projet, piloté avec la complicité des Mauvaises Graines, fait ainsi pousser un brin de verdure un peu folle au sein d’une rue sérieuse de minéralité. À l’intérieur du magasin, les bruits du dehors semblent soudain mis entre parenthèses, les repères se brouillent, entre l’esthétique rétro de l’architecture et cette vision quasi surnaturelle d’une micro-jungle dressée derrière les vitres. Chaque jour, les employés arrosent leur bosquet, surveillent les bourgeons, s’enquièrent des teintes du feuillage. Cela tombe bien, le personnel d’Aésop s’avoue absolument mordu par le virus horticole. Une douce obsession à aller chercher, peut-être, du côté de la formulation des produits de la marque australienne, qui vous plonge dans un herbier avant même d’avoir foulé une pelouse. Odeur botanique de feuille de géranium, vertus apaisantes de la camomille, extraits anti-oxydants de graine de persil. Il eut été étonnant que ces gens-là n’aient pas un jour envie de cultiver leur propre jardin. Planting Paris Prompted by the Paris City Hall’s new « permission to plant in public spaces, » granted to specifc projects dreamedup by private individuals, a number of initiatives have been sproutingup here and there amid the asphalt. Afcionados of the Left Bank were not surprised to see the Aésop store on Rue du Vieux-Colombier take over the sidewalk to transformit into a haven of greenery, with a small bench surrounded by birch, hornbeam, Japanese privet, ivy and liquidambar. Neighbors come to chat here, passersby stop for a rest and customers relax over herbal tea. The project, carried out in collaboration with Les Mauvaises Graines, introduced a bit of wild greenery into a concrete jungle. Inside the shop, the noise from outside is suddenly muffed and the boundary is blurred between the retro vibe of the architecture and the almost surreal vision of the tiny jungle sprouting outside the window. Every day, the employees water their grove, monitor the buds and check the hues of the foliage. This mild obsession refects the products of the Australian brand, which plunge you into a herbarium before you have even set foot on a lawn. |