Première plate-forme de cinéma numérique en Europe, le multiplexe Gaumont Aquaboulevard de Paris a répondu dès 2000 à l’appel d’offres lancé depuis les Etats-Unis par Texas Instruments pour étendre les tests d’expérimentation grandeur nature de la technologie DLP Cinema. « Toy story II » réalisé en images de synthèse a ainsi inauguré le 2 février 2000 une programmation pionnière dans une salle de 486 places équipée d’un écran de 19 mètres de base. Appartenant à la filiale EuroPalaces qui regroupe les enseignes Gaumont et Pathé, l’Aquaboulevard est équipé de deux serveurs Kodak. L’occasion pour son responsable technique, Philippe Binant, membre du département Imagerie Numérique et Multimédia de la Commission Supérieure Technique de l’Image et du Son, de dresser un premier bilan. Actions : Entre les débuts de la projection numérique à 1,3 K et son passage aujourd’hui à 2 K, que s’est-il exactement passé ? Philippe Binant : Lorsque la technologie DLP Cinema de Texas Instruments a été validée par Hollywood en 1999, il n’existait pas de norme propre au cinéma numérique. On estimait que le 1,3 K était équivalent au 35 mm, ce qui n’était pas tout à fait exact, mais permettait de différencier la projection cinéma numérique de la vidéoprojection. De 2000 à 2006, c’est donc un domaine qui a été en perpétuelle évolution face à des professionnels du cinéma argentique exigeants et à un certain nombre de directeurs de la photographie toujours sceptiques. Cela a contraint les constructeurs, tant au niveau des équipements de prises de vues que des systèmes de projection, à proposer des technologies avec une résolution de 2048 pixels (2 K) qui correspond d’après les expertises à la défi nition du 35 mm. Aujourd’hui, nous obtenons en 2 K des résolutions comparables à une copie tirée d’après négatif pour des projections haut de gamme comme celles qui ont lieu à Cannes ou dans les salles de vision privées. Le risque dans le temps avait été de se retrouver avec une diversité de standards propriétaires introduits par différents constructeurs. C’est pourquoi le DCI (Digital Cinema Initiatives), organisme américain regroupant les principales majors hollywoodiennes, a publié en 2005 un document très complet portant sur les spécifi cations relatives au cinéma numérique. L’objet de ce travail est d’aboutir à une norme internationale faisant du support cinéma numérique ou D-cinéma, un support aussi universel que le 35 mm. Ainsi, il est aujourd’hui possible de projeter un fi lm en D-cinéma à Paris, New York ou Tokyo avec des équipements cinéma numérique qui présentent entre eux le même degré d’interopérabilité que les équipements 35 mm. 12 a c t i on s 29 AU CŒUR DE LA PROJECTION NUMÉRIQUE Philippe Binant, responsable technique de l’Aquaboulevard A. : Est-ce à dire que ce système est proche de la perfection ? Ph. B. : La projection numérique est aujourd’hui parvenue à un niveau de qualité tout à fait exceptionnelle qui permet de reproduire exactement ce qu’un réalisateur a voulu tant du point de vue de l’image que de celui du son. En D-cinéma, on peut également contrôler des paramètres sur lesquels il n’était pas possible d’intervenir en 35 mm. Par exemple, le hublot de projection peut provoquer des aberrations chromatiques qu’il est possible de corriger, en intervenant au niveau de la tête de projection électronique, après avoir effectué en salle une mesure spectrophotométrique. De nouvelles réfl exions sont toujours possibles, notamment au niveau de la projection cinéma numérique en 3D ou sur la possibilité d’augmenter le nombre de sources audio dans la salle. D’autres pistes, comme le 4 K ou la projection à 48 Hz existent également. A. : Pourquoi l’Aquaboulevard est-il équipé de serveurs Kodak ? Ph. B. : En 1990, Kodak a créé la technologie CDS (Cinema Digital Sound) permettant la reproduction du son numérique dans les salles de cinéma. Au niveau du traitement numérique du signal, Kodak a proposé dès 1991 l’un des premiers systèmes de photographie numérique. En 2007, Kodak dispose d’une expérience considérable dans le domaine de l’imagerie numérique et apparaît comme l’un des acteurs majeurs dans la conception de serveurs cinéma numérique. Pour sa part, la plate-forme technologique du Gaumont Aquaboulevard développe, depuis 2000, un ensemble de programmes de tests, d’expérimentations dans le domaine du cinéma numérique, Matthieu Maillet |