32 àParis portrait Raconter le parfum des musées Arnauld Pontier, responsable des éditions Paris Musées, veut donner aux enfants le désir d’aller au musée comme on va à la fête. « Les musées ne rebutent pas les adolescents si on leur a montré, jeunes, que l’art y est vivant. » Quand on demande à Arnauld Pontier si une collection jeunesse a sa place parmi des catalogues de musées, il devient grave : « Oui, il faut parler des artistes aux enfants avec leur propre langage, décrire tel sculpteur à 10 ans en train de malaxer l’argile pour réaliser de petits animaux ou, à 20, faisant des croquis au jardin des Plantes. En faire les personnages de vraies belles histoires... » Parmi les beaux livres qu’il consacre aux musées parisiens, Arnauld Pontier réserve aux seuls enfants une dizaine de titres par an. C’est ainsi qu’aux éditions Paris Musées, certains livres d’art sont devenus des contes du réel (1). Les albums de Zadkine, Maillol et Bourdelle s’échangent dans les cours de récréation: « Les musées ne rebutent pas les adolescents si on leur a montré, jeunes, que l’art y est vivant, proche de nous et en constante évolution. » Arnauld Pontier a gardé intacte sa jeunesse, surtout les côtés rêveurs et aventuriers. Pas étonnant quand on est pratiquement né dans la jungle, au Laos, il y a quarante-cinq ans… « Je ne me contente pas de flâner, je lis Paris. » Tout jeune, pendant que les écoliers de Métropole apprenaient les confluents de la Seine et faisaient de la gym, le petit Arnauld révisait les confluents du Mékong avant une leçon de kung-fu. Ses parents coopérants enseignaient le français en Extrême- Orient. Ils s’établirent ensuite en bordure du désert algérien, avant de regagner définitivement la France. Quand il évoque sa jeunesse, Arnauld Pontier s’évade, avant de s’exclamer avec un authentique sourire de gamin: « J’ai mis des chaussures pour la premières fois à 14 ans. C’était dans les Alpes de Haute Provence, l’hiver. Il faisait –10°C. » Quelques années plus tard, il débarque à Paris après avoir parcouru le monde en bateau-stop. C’est tout naturellement sur le mode baroudeur qu’il pratique les métiers de l’édition avant de s’occuper, en 1989, du catalogue Modes et révolutions du musée Galliera. A l’époque, chaque musée publie ses catalogues sous un logo commun, mais leur fabrication n’est pas encore centralisée et leur diffusion ne se fait pas en librairie. Alors, pourquoi ne pas aller plus loin, perfectionner la structure, la rendre plus professionnelle ? Le 1 er janvier 1990, les éditions Paris Musées naissent. Cette branche de l’association Paris Musées emploie aujourd’hui une quinzaine de personnes et publie, outre les catalogues des expositions et des collections des musées de la Ville de Paris, des titres liés au patrimoine ou à l’art en général, soit près d’une soixantaine par an. Editeur, Arnauld Pontier est aussi un écrivain qui feuillette les rues et les arrondissements comme les pages: « Chaque ruelle, chaque porche est le paragraphe d’un livre dont l’histoire change sans cesse. Je ne me contente pas de flâner, je lis Paris. J’aime le Paristhéâtre d’Haussmannet le Paris canaille d’Eugène Sue. » Ainsi, il situe La Fête impériale, son premier roman dans le Paris haussmannien qu’il affectionne tant. La treizième cible, son deuxième, puise dans l’enfance exotique. Il a également écrit pour ses enfants La Légende du Jardin japonais, inventée de toute pièce, mais tellement réelle... Comme le sont toutes les légendes pour ce vieux gamin de Paris, venu du Laos. ■ (1) Des mains pour créer, les sculpteurs racontés aux enfants, collection Paris Musées. En coédition : Lumière, Paris Musées - Le Rouergue. Une nuit aux catacombes, Paris Musées - Albin-Michel. Les livres d’Arnaud Pontier sont publiés aux éditions Actes Sud et Albin Michel.