à Paris n°10 jui/aoû 2004
à Paris n°10 jui/aoû 2004
  • Prix facial : gratuit

  • Parution : n°10 de jui/aoû 2004

  • Périodicité : trimestriel

  • Editeur : Ville de Paris

  • Format : (210 x 265) mm

  • Nombre de pages : 48

  • Taille du fichier PDF : 4,9 Mo

  • Dans ce numéro : Paris insurgé, Paris libéré

  • Prix de vente (PDF) : gratuit

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II àParis Paris, août 1944. Depuis le débarquement des armées alliées en Normandie, il y a deux mois, la ferveur des Parisiens monte. La population espère une libération proche. Pourtant, l’option militaire choisie par les Alliés est d’éviter Paris considérant que la capitale ne représente pas un objectif stratégique. Les troupes anglo-américaines ont donc prévu de contourner la ville par le nord vers Mantes, et par le sud, aux abords de Melun. De son côté, le comité parisien de Libération (CPL), qui multiplie depuis juillet les appels aux manifestations patriotiques, s’organise pour déclencher une insurrection populaire. Le 10 août des grèves commencent à paralyser l’agglomération. La première est celle des cheminots : des rails sont déboulonnés, des locomotives bloquées, tous les réseaux sont touchés. Le mouvement s’étend aux postiers et aux gendarmes. Le 15 août, c’est au tour de la police parisienne. Peu à peu, à travers ces grèves à caractère insurrectionnel, les conditions d’un véritable soulèvement sont réunies. L’insurrection Le 18 août, le colonel Henri Rol-Tanguy, chef des Forces françaises de l’intérieur (FFI) d’Ile-de-France, fait afficher sur les murs de Paris l’ordre de mobilisation générale en accord avec les organes dirigeants de la Résistance. Ordre est donné à tous les Parisiens de rejoindre les FFI et « d’attaquer l’ennemi partout où il se trouvera ». Le 19 août est le jour J de l’insurrection. Vers 7 heures du matin, plus de 2000gardiens de la paix occupent la préfecture de police. Le préfet Bussière est arrêté et Charles Luizet, premier préfet de la Corse libérée, le remplace. D’autres opérations accompagnent cette initiative. Les comités locaux de Libération occupent à leur tour les mairies d’arrondissement tandis que les ministères, les commissariats, les bureaux de poste, l’Elysée tombent aux mains des résistants. Des combats acharnés se multiplient entre les forces françaises et allemandes. Au cours de la journée, les milices patriotiques s’emparent des Halles et de la poste centrale de la rue du Louvre et les FFI passent à l’attaque dans les 1 er, 11e, 13 e et 19 e arrondissements ainsi qu’à Saint-Denis, Neuilly, Vitry et Aubervilliers. Des résistants, aux brassards A partir du 22 août, sous l’impulsion du colonel Rol-Tanguy, les Parisiens dressent des barricades, comme ici à l’angle de la rue Saint-Placide et de la rue de Rennes (6 e). FFI bien visibles, patrouillent désormais dans les rues, armés de pistolets, de fusils ou de mitraillettes. Le 20 août à l’aube, une poignée d’hommes, menée par Léo Hamon du mouvement « Ceux de la Résistance », s’empare de l’Hôtel de Ville. Ils prennent possession de la maison commune au nom du gouvernement provisoire de la République française (GPRF) et pour le compte du comité parisien de Libération (CPL). Mais les insurgés commencent à manquer d’armes et de munitions. Une trêve est conclue à l’initiative du consul de Suède, Raoul Nordling auprès du général von Choltitz (nommé le 17 août par Hitler pour sa fidélité), commandant en chef du Gross Paris (Grand Paris). Les barricades La trêve est peu respectée de part et d’autre. De plus, elle suscite de violents débats au sein de la Résistance entre partisans et adversaires de cette suspension d’armes. Finalement, le 22 août, la trêve est rompue sur décision du comité parisien de Libération (CPL) et le colonel Rol-Tanguy relance l’insurrection : « Tous aux barricades ! » L’appel est entendu. En quelques heures, les Parisiens, hommes, femmes et enfants, s’affairent à rassembler sacs de sable, matelas, lits, baignoires, grilles et pavés. Près de 600 barricades de fortune sont édifiées dans Paris pour bloquer la circulation des chars allemands et paralyser les voies de communication de l’ennemi. Parmi les insurgés, Madeleine Riffaud. Arrêtée en juillet 1944 après avoir tué un officier nazi, puis torturée sans avoir parlé, elle est condamnée à mort. Libérée avant l’insurrection avec 3000 autres prisonniers politiques, grâce à l’intervention du consul de Suède, cette jeune résistante de 20 ans, rejoint son groupe de combat dans le 19 e arrondissement. « Nous tenions les barricades avec les gens de la rue qui s’étaient joints à nous, se souvient-elle aujourd’hui. La joie se reflétait dans le visage des uns et des autres. Il y avait une fraternité extraordinaire. La population venait se mettre à notre disposition et les femmes du quartier nous apportaient des brocs de café d’orge et de quoi manger. On àParis Le magazine d’information de la Ville de Paris juillet- août 2004
ne nous appelait pas les FFI mais les « fifis », car nous étions considérés un peu comme leurs enfants. Le plus âgé de notre groupe n’avait que 22 ans. C’était à la fois une atmosphère de combat, de joie intense et de délivrance intime. Paris était déjà libéré dans son âme. » Soixante après, Madeleine n’oublie pas ceux qui sont morts sur les barricades, en particulier ce tout jeune Gavroche: « C’était un petit gars de 10 ou 11 ans, se souvient-elle encore, qui était tout le temps dans nos jambes. Il nous réclamait sans cesse une arme. Devant notre refus, il s’est procuré une grenade qu’il avait récupérée je ne sais comment. L’enfant attendait une occasion pour l’utiliser mais on n’y a pas prêté attention. Au petit matin, un camion allemand s’approche de la barricade. Tout le monde est en alerte et se met en position de tir. Le véhicule avance toujours. Le gamin se saisit aussitôt de sa grenade, la dégoupille et s’apprête à la lancer quand, soudain, les passagers du camion brandissent et agitent des drapeaux tricolores. Ce sont les nôtres ! Le gosse, sa grenade toujours à la main, n’a plus que quelques secondes pour s’en débarrasser. Mais où qu’il la jette, il tue des copains ou de braves gens. Il s’est alors mis en boule, recroquevillé sur lui-même. Et, la grenade a explosé… Il s’est sacrifié pour tous nous protéger. On n’a pas eu le temps de pleurer, Le 25 août, les véhicules de la division Leclerc (2 e DB) entrent dans Paris par le sud et la place Denfert-Rochereau (14 e). des convois ennemis nous attaquaient. » Ailleurs, les affrontements se poursuivent avec des combats sévères près du Louvre, aux Batignolles ou bien aux Gobelins. Au cours de cette journée du 22 août, le général von Choltitz reçoit par radio un ordre très ferme de Hitler : « Paris doit être réduit en un monceau de ruines. » Le général allemand doit défendre la ville « jusqu’au dernier homme » et s’il le faut, « détruire tous les ponts ». Ces ordres de destruction ne peuvent être suivis, faute de moyens, et von Choltitz ne donne pas de consignes précises à ses troupes retranchées dans leurs « points d’appui », autour des grands hôtels Meurice, Crillon et Majestic, ainsi que l’Opéra, la caserne du Prince Eugène, les Invalides et le Palais du Luxembourg. L’arrivée de la 2 e DB Pendant ce temps, le général de Gaulle, chef du gouvernement provisoire de la République française, n’a de cesse de plaider la cause de ses compatriotes auprès des Alliés. Depuis la capitale, même le colonel Rol-Tanguy appelle les forces américaines à la rescousse. Le général américain Eisenhower accepte enfin de modifier ses plans et de lancer ses troupes sur la capitale. En attendant, l’ordre est donné au général Leclerc, commandant la 2 e division blindée III INTERVIEW Rendre hommage à l’engagement des Parisiens « „ àParis : Quelle est la portée de la commémoration du 60 e anniversaire de la Libération de Paris ? Odette Christienne : La Libération de Paris, où le peuple contribue à la défaite de l’envahisseur, revêt une importance exceptionnelle. C’est l’occasion de rendre hommage aux principaux acteurs de cet événement majeur de l’histoire de Paris au XX e siècle. Il faut souligner la volonté constante des Parisiens à s’engager totalement pour des causes nobles, à réagir quand on porte atteinte à des valeurs fondamentales et, en particulier, à l’une de celles qui constituent la devise de notre République : la Liberté. Ce comportement a valu à notre ville trois distinctions : la Légion d’Honneur en 1900 ; la Croix de Guerre en 1919, décernée par Georges Clémenceau, et la Croix de la Libération en 1945, remise par Charles de Gaulle. Cette dernière, reconnaissance du combat des Parisiens pour la libération de leur ville, a une portée singulière. Quelle est l’action de la municipalité pour préserver le devoir de mémoire vis-à-vis des jeunes générations ? Elle agit sous de multiples formes, mais signalons la distribution aux élèves de publications, véritables supports pédagogiques pour les enseignants. Trois ouvrages ont été publiés pour la période 1939-1945, d’autres sont en cours d’élaboration pour la rentrée scolaire, comme Paris, Ville Compagnon de la Libération et Les Martyrs de la Cascade du Bois de Boulogne. Cette démarche se traduit-elle aussi à travers les manifestations du 60 e anniversaire ? Bien sûr. Et nous invitons les jeunes Parisiens, héritiers de l’histoire de la Libération de notre ville, à assister aux cérémonies, colloques et forums organisés à cette occasion avec des historiens et des témoins combattants. Ils pourront aussi profiter pleinement des festivités qui veulent rappeler ce débordement de joie que déclencha chez les Parisiens la liberté retrouvée. Odette Christienne, adjointe au Maire de Paris chargée de la Mémoire, du Monde combattant et des Archives



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