12 NOVEMBRE 202 1 La langue des signes est très demandée dans les secteurs comme le médico-social et l’éducatif. Urbazon/Getty Images Une langue, et un geste vers l’autre Communiquer pour mieux comprendre l’autre ou se faire comprendre, mais aussi pour accéder à l’emploi ; la langue des signes est un formidable outil d’inclusion o L Lise Garnier es chiffres parlent d’eux-mêmes. Selon le réseau Visuel-LSF, qui propose des formations à la langue des signes (LSF) à travers toute la France, « sur les 240 personnes avec un statut de demandeur d’emploi que nous avons accompagnées en 2020, 68% ont été réinsérées socialement après avoir obtenu la certification CC LSF-L2 [un certificat de compétences en langue des signes française]. » Une compétence valorisée Parler avec les mains, la compétence est recherchée, mais elle ne suffit pas toujours à convaincre un employeur. En regardant de plus près les chiffres de Visuel-LSF, 27% des bénéficiaires de la certification ont trouvé un emploi en lien direct avec la langue des signes, 31% ont repris leurs études en continuité avec leur certification et 10% ont retrouvé du travail rapidement. Un peu moins d’un quart des apprenants certifiés sont toujours en DIALOGUER recherche d’emploi, et 9% ont mis leur projet en pause. Le care et le commerce, très demandeurs Gage d’inclusion, la langue des signes est encore plus importante dans certains domaines d’activité, comme le médico-social ou l’éducatif. « Les apprenants viennent principalement du secteur de la santé, du service à la personne, du commerce et de l’hôtellerie-restauration », précise Charles-Alexandre Peretz, directeur marketing de l’École française, qui propose depuis un an une formation à distance à la langue des signes. « Des centaines de milliers de personnes naissent chaque année sourdes et muettes. Aujourd’hui, ce n’est pas si difficile de faire un pas vers elles », lâche « Que tout le monde sache dire «bonjour» et «comment allez-vous ? » » C.-A. Peretz, L’École française le représentant de l’École française. Pour le réseau Visuel-LSF, les avantages des formations sont multiples. L’ajout de compétences « facilite l’insertion et la reconversion professionnelles », mais l’apprentissage est tout aussi enrichissant sur le plan personnel puisqu’il est synonyme de « reconnaissance et d’intégration ». « En favorisant l’inclusion de certaines personnes, on se valorise aussi soi-même. On est fier de ses compétences et heureux de les transmettre », commente Charles-Alexandre Peretz. « On n’a pas la prétention de rendre les gens bilingues, mais on aimerait amener le même mouvement que pour l’anglais : que tout le monde sache dire «bonjour» et «comment allez-vous ? » C’est un minimum. » Comment mettre la main à la pâte 11% de la population française est touchée par une déficience auditive. Pour échanger avec ces personnes, il existe un grand nombre de formations professionnelles réparties sur toute la France. Avec le compte personnel de formation (CPF), vous pouvez choisir votre dispositif d’apprentissage, sans passer par votre employeur. Et si vous voulez aller plus loin, pourquoi ne pas devenir interprète ou enseignant en Getty Images langue des signes ? Vous pouvez opter pour des licences professionnelles ou des masters spécialisés. Selon Anne- Marie Sinet, conseillère référente handicap du Centre d’information et de documentation jeunesse (CIDJ), « s’initier à la langue des signes permet d’acquérir une compétence complémentaire. Même si on ne l’utilise pas forcément, cela témoigne de l’acceptation de l’autre. » 2^ u Une librairie pour changer de regard sur la culture sourdeL.G. Lorsque l’on n’entend pas, ou mal, apprendre à lire peut s’avérer difficile. « Et la langue française est assimilée tardivement », constate Nathalie Sécolier, l’une des cofondatrices de L’Ouï-Lire, une librairie toulousaine indépendante, spécialisée en langue des signes. « Les enfants sourds signants apprennent tôt la «traduction» pour passer du français écrit à la langue des signes, et cela demande une certaine gymnastique cognitive qui ralentit l’apprentissage général », ajoute-t-elle. Chez les enfants sourds en âge de maîtriser la lecture et l’écriture, le taux d’illettrisme avoisine les 80%. Nathalie Sécolier et Delphine Agnesina ont alors monté la première librairie au monde dédiée à la culture sourde. « Notre clientèle est majoritairement signante (entendants et sourds, de tous niveaux), mais nous avons également des clients lambda », explique Nathalie Sécolier. La librairie compte pas moins de 8 900 ouvrages. Désormais, les deux amies se plaisent à rêver au-delà des murs de la Ville rose et envisagent de développer une franchise. Photo : L.’Ouï-Lire Les pompiers, chauds pour signer. Afin de lutter contre les discriminations dans l’accès aux soins dont sont parfois victimes des personnes en situation de handicap, les sapeurs pompiers du Calvados, du Doubs, du Var, de la Loire- Atlantique et du Puy-de-Dôme ont appris les bases de la langue des signes. D’autres soldats du feu devraient bientôt effectuer la même démarche. « La recherche de formation est en cours », assure Éric Brocardi, porte-parole des sapeurs-pompiers de France. |